Le librettiste Felice Romani n’a pas réservé un sort très tendre à la pauvre Beatrice di Tenda, victime passive d’amours ou de complots auxquels elle ne peut rien. Comme c’est une brave fille, elle pardonne à ses ennemis dans une cabalette décoiffante avant de passer chez le bourreau. Nous vous en proposons quelques exemples.
1. Joan Sutherland fut la première cantatrice célèbre à remettre à l’honneur cette oeuvre rare après-guerre. On lui doit également un enregistrement studio exceptionnel avec Josephine Veasey et Luciano Pavarotti. Nous l’entendons ici sur le vif à la Scala en 1961.
2. June Anderson fut considérée comme l’héritière de Joan Sutherland, mais elle n’aimait guère cette comparaison. Elle nous offre à la Fenice de Venise en 1987 une interprétation engagée mais toujours scrupuleusement belcantiste de cette scène finale.
3. Edita Gruberová s’est beaucoup consacrée au grands rôles belcantistes en seconde partie de carrière. Elle l’interprète ici à Zurich en 2002. L’action est transposée sur le Titanic mais seule la mise en scène est un naufrage.
4. Authentique belcantiste, Mariella Devia, toujours stylistiquement parfaite, défend ici le rôle au Teatro degli Arcimboldi de Milan en 2004 (la Scala était en travaux à l’époque).
5. Cecilia Gasdia fut également une grande interprète du rôle, certes avare de suraigus mais certainement pas de couleurs (Scala, 1993).
6. Contemporaine de June Anderson et Cecilia Gasdia, Adelaide Negri n’a pas eu la carrière qu’on aurait pu lui imaginer. Dotée d’une voix étonnamment sombre, elle disposait elle aussi d’une belle technique (Liceu, 1987).
7. Le répertoire de Mariana Nicolesco allait du baroque au contemporain. On appréciera ici un engagement dramatique remarquable (studio, 1986).
8. Angeles Gulin fut un beau soprano précocement retirée des scènes pour des raisons de santé, et dont la carrière fut surtout provinciale. Plus à l’aise dans Verdi, elle offre ici quelques limites techniques mais un réel engagement (Turin, RAI, 1973).
9. Malgré ses qualités, Mirella Freni n’eut jamais les moyens d’une belcantiste, mais sa juvénilité reste séduisante (Bologne, 1976).
10. Sans disposer des moyens phénoménaux de certaines de ses collègues, Dimitra Theodossiou a défendu avec honneur le belcanto (Catane, 2010).
11. Lucia Aliberti fut souvent comparé à Callas et les similarités avec le timbre de la Divina sont effectivement flagrantes (Catane, 1997).
12. Grande belcantiste de sa génération, Jessica Pratt ne pouvait manquer de défendre ce rôle. Sa prise de rôle date de 2023 à Naples.