Après Le Chant intime. De l’interprétation de la mélodie française en 2004, le baryton François Le Roux prend de nouveau la plume avec l’aide de Romain Raynaldy et signe un remarquable ouvrage consacré à l’opéra français.
Le livre s’ouvre sur un constat : le monde lyrique, de plus en plus internationalisé, tend à faire disparaître les spécificités d’interprétation propres à chaque langue et à chaque répertoire. François Le Roux nous invite ainsi à nous pencher sur les œuvres françaises afin d’en discerner les enjeux, et la beauté qui leur sont propres.
On recommandera à tous la première partie de l’ouvrage qui, après des considérations historiques sur la naissance de l’opéra français et son évolution, s’intéresse aux livrets : à leurs sujets mais aussi – et c’est là que l’étude est remarquable – à l’évolution de leur prosodie. Cette question aurait mérité plusieurs chapitres, mais le baryton pose au moins des clés de compréhension qui éclairent le rapport de la musique au texte.
S’en suivent des remarques tout à fait précieuses sur la typologie vocale propre à l’opéra français. Le style est concis, les informations précises, le propos accessible. On apprécie d’autant plus que derrière la théorie émane, parfois, les souvenirs de l’interprète.
La deuxième partie de l’ouvrage est quant à elle consacrée à vingt-cinq œuvres bien connues de François Le Roux puisqu’il les a, à une exception près (La Voix humaine de Poulenc), toutes chantées. L’occasion d’évoquer pour chacune le compositeur, l’action, le style, les voix attendues pour les rôles, mais aussi de proposer une analyse musicologique plus poussée d’un acte ou d’un air. En émanent des pistes d’interprétation dictées non par la tradition, mais directement par la partition, fouillée, travaillée par le regard expert du baryton.
Là encore, des anecdotes viennent enrichir le propos, lui donner une saveur plus personnelle. C’est un rapport éminemment intime aux opéras qu’il nous est donné d’apprécier, et quatre chapitres méritent tout particulièrement qu’on s’y attarde : l’étude de la déclamation dans Iphigénie en Tauride, l’analyse musicale extrêmement fine de Pelléas, les remarques concernant la typologie vocale de Carmen, et enfin le très rare Verlaine Paul de Georges Bœuf, qui nous entraîne dans les coulisses d’une création.
François Le Roux et Romain Raynaldy signent donc un ouvrage qu’il convient de mettre entre toutes les mains. Excellente introduction au répertoire français, il permettra aux connaisseurs de puiser de nouvelles pistes d’écoute et de réflexion.