La résurrection en concert, à Munich uniquement, du dernier opéra de Gounod ce 28 janvier devrait enfin permettre de savoir s’il faut se fier au jugement sévère des contemporains et de la postérité sur Le Tribut de Zamora
Composition : septembre 1878 à octobre 1880
Création : 1er avril 1881 à l’Opéra de Paris. C’est le douzième et dernier des opéras de Gounod.
Cette année-là : A l’Opéra-Comique, le rideau se lève le 10 février sur Les Contes d’Hoffmann, mais Offenbach n’est plus là pour savourer ce succès. C’est à Bruxelles que Massenet peut voir créer son Hérodiade, le 19 décembre. A Saint-Pétersbourg, on donne en février La Pucelle d’Orléans de Tchaïkovski.
Librettistes : Jules B… Non, pas Jules Barbier, mais Jules Brésil (Gounod n’en était pas ravi) et Adolphe d’Ennery.
Genre : Grand opéra en quatre actes
Intrigue : En Espagne au Xe siècle. Le jour du mariage de Manoël et Xaïma, une délégation arabe conduite par Ben-Saïd vient exiger le tribut annuel de cent vierges, conséquence de la défaite des chrétiens à Zamora. Ben-Saïd est frappé par la beauté de Xaïma, qui figure parmi les noms tirés au sort, avec son amie Iglésia. Une fois Xaïma dans le harem de Ben-Saïd – auquel elle se refuse –, la folle Hermosa découvre que la jeune femme n’est autre que sa fille. Pendant ce temps, Manoël vient tenter de sauver sa fiancée, mais Hadjar, frère de Ben-Saïd, reconnaît en lui le soldat espagnol qui lui a jadis sauvé la vie. Hermosa veut persuader Ben-Saïd de libérer Xaïma : comme il refuse, elle le poignarde, mais sa démence la protège. A la fin, Xaïma et Manoël partent, libres de s’aimer.
Personnages : Xaïma, soprano ; Hermosa, soprano ; Iglésia, soprano ; Manoël, ténor ; Ben-Saïd, baryton ; Hadjar, basse ; Le roi des Asturies, basse
Les créateurs : Le rôle de Ben-Saïd était destiné à Victor Maurel (qui n’était pas encore la star qu’il deviendrait en créant Iago puis Falstaff), mais échut finalement à Jean-Louis Lassalle, entré à l’Opéra de Paris en 1872, où il assura les créations mondiales du Roi de Lahore de Massenet, de Polyeucte de Gounod, d’Ascanio et d’Henry VIII de Saint-Saëns (il fut aussi le premier Grand-Prêtre lors de la création française de Samson et Dalila).
Le tube : Selon Gérard Condé, particulièrement sévère envers l’ouvrage, « il faut attendre la déclaration de Ben Saïd à Xaïma [au dernier acte] pour trouver quelques lueurs d’inspiration ». La belle romance de Xaïma au premier acte a néanmoins su plaire aux oreilles de Dame Joan Sutherland, qui l’a enregistrée.
La scie : Toujours selon Gérard Condé, l’hymne patriotique « Debout ! Enfants de l’Ibérie », au premier acte, « évoque surtout la marche Sambre et Meuse »…
Anecdote : Le Tribut de Zamora fut perçu comme une prise de position de la part de Gounod dans la controverse opposant wagnériens et anti-wagnériens, mais pour son dernier opéra, le compositeur semble avoir poussé un peu loin l’adhésion à l’opéra « à numéros ». « L’auteur de Faust s’essayant à pasticher Le Trouvère, voilà qui peut passer pour le comble de la nouveauté. Malheureusement c’est à peu près la seule chose qu’il y ait dans Le Tribut », écrivit La Revue du Monde musical et dramatique.
CD recommandé : Patience, le concert donné à Munich en janvier 2018 débouchera sur un enregistrement publié par le Palazzetto Bru Zane (à paraître en octobre 2018). En attendant, Youtube propose la « Danse grecque » extraite du ballet du troisième acte, et l’air d’Hermosa au deuxième acte, « Pitié car je ne suis qu’une tendre hirondelle ».
DVD recommandé : Néant, vous auriez dû vous en douter.