Légende vivante, pudique mais diserte, le baryton-basse José van Dam, retiré des scènes, se livre à l’exercice du Questionnaire de Proust lyrique.
Mon meilleur souvenir dans une salle d’opéra ?
L’ovation du public du Colón de Bueno Aires après un spectacle de Simon Boccanegra. Quel public !
Mon pire souvenir dans une salle d’opéra ?
La mise en scène (et la réaction du public !) des Maîtres Chanteurs au Théâtre du Châtelet de Paris en 1991. Je voulais quitter la production durant les répétitions, mais cinq de mes collègues (dont la regrettée Lucia Popp) voulaient m’imiter si je partais et je suis donc resté.
Le livre qui a changé ma vie ?
Cyrano de Bergerac n’a pas changé ma vie, mais c’est devenu mon livre de chevet.
Le chanteur mort que je voudrais ramener à la vie pour chanter avec ?
Jussi Björling et sa voix si touchante et si reconnaissable.
Mon plus grand moment de grâce dans un musée ?
Musée Frick à New York devant les tableaux de Turner, peintre que j’adore.
La ville où je me sens chez moi
Bruxelles et mes amis ! Et son accent si savoureux …et ses frites délicieuses ! (et sa bière, son chocolat, sa Grand Place, sa Galerie de la Reine, ses restaurants et bistrots…)
La ville qui m’angoisse ?
Paris que je qualifierais de ville brutale.
Ce qui, dans mon pays, me rend le plus fier ?
Je dois avouer qu’actuellement les sujets de fierté s’effacent de ma mémoire dans un marasme de pauvre politique et de contraintes sanitaires malheureusement nécessaires pour le moment. Heureusement, il me reste mon voisin…Manneken pis !
Le metteur en scène dont je me sens le plus proche ?
Peter Sellars, et sa drôlerie, sa sensibilité, sa musicalité. Jamais je n’oublierai sa mise en scène du Saint François d’Assise d’Olivier Messiaen à Salzbourg et Paris.
Mon pire souvenir avec un chef ?
Un chef anglais, bon musicien, mais imbuvable sur le plan humain. J’espère qu’il se reconnaîtra.
Si j’étais une symphonie ?
La 8e de Beethoven.
Et une sonate ?
Pratiquement toutes celles de Mozart.
Et un quatuor à cordes ?
Der Tod und das Mädchen de Schubert.
Si je devais chanter à mes propres funérailles, quel serait le dernier extrait ?
Ich bin der Welt abhanden gekommen de Gustav Mahler.
Le chanteur du passé qui me rend fou ?
Franco Corelli.
Le chanteur du présent qui me rend fou ?
Piotr Beczala.
Si j’étais un personnage de Harry Potter ?
Je n’ai jamais rien lu ou vu d’Harry Potter.
Le compositeur auquel j’ai envie de dire « mon cher, ta musique n’est pas pour moi » ?
Pierre Boulez.
Si l’étais un Lied ou une Mélodie.
An Die Musik de Schubert.
Mon pire souvenir historique des 30 dernières années.
11 septembre 2001.
Le rôle que je ne chanterai plus jamais.
Tous. Explication à la réponse de « Ma devise ».
Ma devise
Il vaut mieux s’arrêter de chanter tant que le public dit : quel dommage qu’il ne chante plus, plutôt que : quel dommage qu’il chante encore.