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Aida Garifullina, récital – Evian

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Spectacle
3 juillet 2023
C’est dans son arbre qu’on chante le mieux

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Détails

Gerónimo Giménez
« Me llaman la primorosa » ext. de El Barbero de Sevilla

Carlos Gardel
Por una cabeza

Frédéric Chopin
Valse en bémol majeur, op. 64/1

Jules Massenet
Élégie, op. 10/5

Georges Bizet
« L’amour est un oiseau rebelle », ext. de Carmen

Léo Delibes
Les Filles de Cadix

Liszt-Schubert
Ständchen, S. 560

Antonin Dvořák
– « Když mne stará matka » op. 55/4
– « Měsičku na nebi hlubokém », ext. de Rusalka

Nikolaï Rimsky-Korsakov
« Oevet’ mne zorkoe svetlo », ext. de Le Coq d’or

Serge Rachmaninov
– « Zdes’ khorosho », op. 21/7
– Prélude en ut dièse mineur, op. 3/2

Nikolaï Rimsky-Korsakov
Chant de l’Invité indien, ext. de Sadko

Piotr Ilitch Tchaïkovski
– « Atchevo eta prezhde ne znala », ext. de Iolanta
– « О дитя, под окошком твоимn », sérénade op. 63/6

Franz Liszt
Paraphrase de concert sur Rigoletto, S. 434

Franz Schubert
Ave Maria

Giacomo Puccini
« Vissi d’arte », ext. de Tosca

BIS
Giacomo Puccini
« O mio babbino caro », ext. de Gianni Schicchi

Ruggero Leoncavallo
Matinata

 

Aida Garifullina, soprano
Maciej Pikulski, piano

Rencontres musicales d’Évian
La Grange au Lac
1er juillet 2023, 20h

On aurait eu tort de partir à l’entracte, idée qu’on avait caressée un instant. D’abord on aurait manqué la robe verte, un nuage de mousseline adorné d’un boa de plume et d’une traîne aérienne, le tout évoquant quelque forêt tropicale où gazouillerait un oiseau, d’un style tout aussi diva que la robe fuchsia de la première partie, un zéphyr impalpable, une brise, un rêve. Aida Garifullina est ravissante, c’est un bonheur de la voir entrer et sortir de scène escortée de son digne pianiste.
Et d’ailleurs dans la salle quelques jeunes femmes russes, non moins délicieuses, nimbées de soieries diaphanes et juchées sur les obligatoires stilettos, armées des dernières trouvailles de la maroquinerie et de la téléphonie, immortalisaient ce moment, dans le décor d’isba onirique de la Grange au Lac. Gageons qu’on retrouvera leurs images sur les réseaux sociaux où Aida Garifullina est une star (1,4 millions d’abonnés sur Instagram, ce qui semble le record pour une artiste lyrique).

© Matthieu Jaffrès

Les fées l’ont dotée, non seulement d’une silhouette de rêve, mais aussi d’une voix de soprano lyrique, au timbre riche et capiteux, aux aigus faciles et aux médiums opulents. Élève de Siegfried Jerusalem à Nuremberg, lauréate du concours Operalia en 2013, elle fut de la troupe du Staatsoper de Vienne (2013-2016) où on lui confia Musetta, Susanna, Zerlina, Norina, Adina, Juliette, Elvira (L’Italienne à Alger) ou la Princesse Eudoxie (La Juive).

Elle a incarné au Bolshoi la Volkhova de Sadko, dans la mise en scène de Tcherniakov (un beau DVD en témoigne) et fut à la Scala Mimi dans La Bohème (2020) et récemment Violetta au Maggio musicale fiorentino. On l’a vue à Paris (2017) dans La Fille des Neiges et en Musetta. Mentionnons que la guerre en Ukraine lui valut d’être remplacée au Met de New York en avril 2022 où elle devait chanter Susanna des Noces de Figaro, mais qu’on put l’entendre la même année à Berlin ou Munich.

Un accomplissement au fil du concert

Si elle chante donc le répertoire italien ou français, c’est dans le répertoire russe que, très naturellement, sa voix et sa sensibilité se déploient le mieux. C’est ainsi que selon nous, dans une dramaturgie peut-être involontaire, ce récital accomplit une jolie courbe, d’une première partie un peu artificieuse à un accomplissement plus émouvant à mesure qu’on avançait.

© Matthieu Jaffres

Le déclic fut sans doute l’Hymne à la Lune de Rusalka où enfin elle délaissa un brio quelque peu fabriqué (qu’on avait encore constaté dans la romance « Když mne stará matka » de Dvořák, d’une jolie ligne mais d’une rutilance très extravertie) pour laisser libre cours à une émotion sincère. Une tessiture idéale pour elle, de subtils pianissimos, de la chaleur, un vibrato maîtrisé et expressif, un pathétique discret, une voix très ouverte, des notes hautes finales transcendantes, tout cela en dépit du piano décidément très prosaïque de Maciej Pikulski.

Les vocalises de « Oevet’ mne zorkoe svetlo », air extrait du Coq d’or, certaines un peu serrées, voire brinquebalantes, laissaient penser que cette voix était faite davantage pour les opulences et les longues lignes du Chant de l’Invité indien, extrait de Sadko (air de ténor ici transcrit pour soprano) ou pour la tendresse de « Atchevo eta prezhde ne znala », tiré de Iolanta, aux belles effusions, ardentes et touchantes, appuyées sur un bas médium solide. Une maîtrise du legato, une manière de laisser respirer la musique de Tchaïkovski, une intériorité qui transfigurait jusqu’au visage de l’artiste, comme une porte s’ouvrant sur autre chose… Un style enfin en adhésion avec l’esprit de la musique.

© Matthieu Jaffres

Même impression pour la sérénade « Ô mon enfant, sous ta fenêtre » aux allures de valse 1900, chantée ici avec un abattage de divette qui aurait de grands moyens, comme l’avait été la romance de Rachmaninov « Zdes’ khorosho », d’un chic voluptueux.

Volutes enivrantes

Le public, de toutes façons acquis d’avance, allait fondre pour l’Ave Maria de Schubert. On entendit là le timbre dans toute sa beauté, et dans toute sa chaleur, appuyé sur un souffle impeccable, dessinant de longues volutes enivrantes.
La même musicalité sensible allait éclairer une autre prière, le « Vissi d’arte » de Tosca, d’une ligne constamment soutenue, ponctuée d’accents très judicieux, et culminant sur un si bémol impavide, avant un impeccable crescendo sur le mi bémol final.

En bis un « Mio babbino caro » ardent et tendre, avec là encore des crescendo-decrescendo, des notes filées, attestant d’une technique idéale pour le stile spianato, puis une Matinata de Leoncavallo, ébouriffante de chic allait achever de jeter aux oubliettes les incertitudes de la première partie.

© Matthieu Jaffres

C’est ainsi qu’on ne dira rien du brio extraverti (et pas espagnol pour deux pesetas) de l’air de zarzuela de Giménez, ni du tango de Gardel, le moins idiomatique qu’on entendit jamais, ni de l’Élégie de Massenet, intempestivement gazouillante, ni de l’air de Carmen, qui n’était dans l’esprit ni de la musique ni du personnage, ni des Filles de Cadix, minaudantes et dont les dentelles montraient quelques accrocs.
On ajoutera que Maciej Pikulski nous sembla ce soir-là en petite inspiration, le toucher en berne, et peu convaincant dans les pièces en solo, sinon dans la Paraphrase de Rigoletto, véloce à souhait, et à un moindre titre dans le prélude de Rachmaninov.

De toutes façons, le public n’avait d’oreilles et d’yeux que pour la si belle dame.

© Matthieu Jaffres

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Gerónimo Giménez
« Me llaman la primorosa » ext. de El Barbero de Sevilla

Carlos Gardel
Por una cabeza

Frédéric Chopin
Valse en bémol majeur, op. 64/1

Jules Massenet
Élégie, op. 10/5

Georges Bizet
« L’amour est un oiseau rebelle », ext. de Carmen

Léo Delibes
Les Filles de Cadix

Liszt-Schubert
Ständchen, S. 560

Antonin Dvořák
– « Když mne stará matka » op. 55/4
– « Měsičku na nebi hlubokém », ext. de Rusalka

Nikolaï Rimsky-Korsakov
« Oevet’ mne zorkoe svetlo », ext. de Le Coq d’or

Serge Rachmaninov
– « Zdes’ khorosho », op. 21/7
– Prélude en ut dièse mineur, op. 3/2

Nikolaï Rimsky-Korsakov
Chant de l’Invité indien, ext. de Sadko

Piotr Ilitch Tchaïkovski
– « Atchevo eta prezhde ne znala », ext. de Iolanta
– « О дитя, под окошком твоимn », sérénade op. 63/6

Franz Liszt
Paraphrase de concert sur Rigoletto, S. 434

Franz Schubert
Ave Maria

Giacomo Puccini
« Vissi d’arte », ext. de Tosca

BIS
Giacomo Puccini
« O mio babbino caro », ext. de Gianni Schicchi

Ruggero Leoncavallo
Matinata

 

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1er juillet 2023, 20h

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