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CARAFA, Masaniello ou le pêcheur napolitain – Bad Wildbad

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Spectacle
22 juillet 2024
Curieux ne pas s’abstenir !

Note ForumOpera.com

4

Infos sur l’œuvre

Drame historique en quatre actes ( Théâtre royal de l’Opéra-Comique, Paris, 27 décembre 1827)

Musique de Michele Carafa

Livret de Moreau et Lafortelle

Partition d’après la propre édition du compositeur

Détails

Version de concert

Lumières
Marcel Hahn

Surtitres allemand et français
Reto Müller

 

Le gouverneur de Naples
Francesco Bossi

Le comte de Torellas
Luis Magallanes *

Masaniello
Mert Süngü

Leona (son épouse)
Catherine Trottmann

Théresia (sa belle-sœur)
Camilla Carol Farias *

Matteo (frère de Masaniello)
Juan Jose Medina

Ruffino (Génois fourbe et intrigant)
Nathanaël Tavernier

Giacomo (Jardinier de Pozzuoli)
Francesco Bossi

Calatravio (Percepteur des taxes)
Luis Magallanes *

Pedro (Homme du peuple)
Massimo Frigato *

Un montreur de marionnettes
Massimo Frigato

*Elèves de l’Académie

Soldats de la garde espagnole/ Gens du peuple napolitain

Chœur mixte

Chef de chœur

Piotr Piwko

Orchestre Szymanowski-Philharmonie de Cracovie

Direction musicale
Nicola Pascoli

Trinkhalle, Bad Wildbad, vendredi 19 juillet 2024 à 19h30

 

 

 

 

 

 

 

 

En 1647 l’Espagne a besoin d’argent pour financer la Guerre de Trente Ans qui n’en finit pas. Pour en obtenir le nouveau vice-roi de Naples décide, en juillet, d’augmenter les taxes sur les fruits. Une émeute éclate sur un marché pour obtenir l’annulation de la mesure et le rétablissement des privilèges antiquement accordés à la ville par les souverains espagnols. Le vice-roi tergiverse mais finit par traiter avec le meneur, le pêcheur Masaniello, qui perdra la raison et sera assassiné.

Sur ces événements historiques, qui le concernaient particulièrement en tant que Napolitain et membre d’une famille princière dont un représentant fut condamné à mort par Masaniello, le compositeur Michele Carafa écrivit en 1827 un opéra qui fut créé avec succès à Paris à l’Opéra-Comique. Hélas, deux mois plus tard le même sujet traité par Scribe et Auber parut sur la scène de l’Académie Royale de Musique sous le titre La Muette de Portici  et  le Masaniello de Carafa perdit peu à peu la faveur du public jusqu’à disparaître du répertoire.

C’est donc à une résurrection que nous conviait le Festival de Bad Wildbad, dans une version de concert enregistrée en vue de l’édition d’un disque. En 1827, le compositeur est installé à Paris depuis plusieurs années ; l’y a retrouvé en 1824 celui dont il est devenu l’émule après avoir été son rival au San Carlo, Gioachino Rossini, pour lequel il avait écrit la prière de Mosè dans la première version de Mosè in Egitto. La critique française de l’époque souligne la dépendance stylistique de Carafa envers son cadet. Cela le pique-t-il ? Avec Masaniello il semble chercher à prouver qu’il peut s’émanciper et écrire lui aussi « à la française », comme Rossini l’a fait dans Le Siège de Corinthe et Moïse et Pharaon.

Et en effet, les lignes de chant sont simplifiées, les fioritures assez parcimonieuses, les agilités raréfiées, mais les couleurs, les timbres, les procédés orchestraux, l’usage du cor, la présence d’un orage, les réminiscences, involontaires ou non, l’imprégnation rossinienne est si forte qu’il ne peut – ou ne veut, car malgré tout la vogue rossinienne est au plus haut – s’en dépouiller. Comme il semble avoir du mal – à moins qu’il ne faille y voir malice – à renoncer aux marches militaires, lui qui fut officier dans les armées napoléoniennes, où l’on pourrait percevoir un écho de ces « marches de l’Empire » composées pour les parades du régime impérial. Ce pourrait être une entourloupe à la censure tatillonne au service de Charles X – qui renâcla à admettre le sujet – que de passer en fraude plusieurs allusions sonores au règne de « l’usurpateur ».

Cet allant guerrier, marqué avec force percussions et cuivres, va au paroxysme au quatrième acte quand il s’agit de faire entendre l’explosion de l’éruption du Vésuve. L’orchestre de la Philharmonie Szymanowski de Cracovie ne s’épargne pas, pas plus que Nicola Pascoli, qui dirige sans temps mort. Par moments on se demande si autant de volume est nécessaire, car les couleurs des timbres sont assez explicites, et on en revient à s’interroger sur l’évolution de la facture des instruments et l’intérêt qu’aurait représenté une exécution sur instruments d’époque.

L’œuvre est donnée sans coupures majeures, quand d’autres se permettent de retrancher des personnages les simples « utilités », comme le couple des marquis Caraccioli. Cependant certains interprètes doivent chanter plusieurs rôles et on imagine quelle confusion cela a pu représenter pour les spectateurs, en dépit des surtitres. Ainsi le ténor Massimo Frigato, à la voix bien projetée et bien timbrée, est tour à tour un montreur de marionnettes et un homme du peuple. Le Vénézuélien Luis Magallanes, ténor lui aussi, est d’abord l’odieux Calatravio, chef des percepteurs de taxes, avant d’être le comte de Torellas, le gentilhomme espagnol qui soupire pour la belle plébéienne à qui il doit la vie sans jamais se départir d’une courtoisie chevaleresque, incarnations qu’il impose grâce à une émission vigoureuse qu’il sait nuancer. Tous deux sont de la cuvée actuelle de l’Académie.

Le baryton Francesco Bossi est successivement le Gouverneur de la ville de Naples, et le rebelle Giacomo, celui qui sera la dupe de Torellas ; couronné ici même l’an dernier du prix Belcanto, il confirme son talent dans un trio de l’acte II, qu’on aurait souhaité plus nettement comique. Matteo, le frère de Masaniello, est échu au ténor paraguayen Juan José Medina, qui exploite ce rôle ingrat sans forcer le trait. Son épouse, Therésia,  trouve en Camilla Carol Farias – revenue à l’Académie dont elle fut lauréate l’an dernier – une interprète réactive, à la voix longue et souple, qui a bien canalisé un tempérament dramatique expansif si bien que la musicalité est intacte.

Leona, l’épouse de Masaniello, est celle qui met le feu aux poudres en choisissant de renverser son étal plutôt que de payer la taxe, ce qui lui vaut d’être arrêtée et enfermée à moins de consentir à payer une amende exorbitante. Mais avant tout c’est une jolie femme et sa beauté, bien qu’elle soit vertueuse – c’est-à-dire fidèle et réservée – fait l’objet de commentaires, de convoitises, d’insinuations, autant de moyens de faire pression sur elle et d’éveiller la jalousie de son mari. Le personnage est dans l’action, tour à tour énergique, attentif ou attentiste, en fonction de l’évolution de la situation, et Catherine Trottmann met en lumière ces facettes, mais c’est sa romance qui lui offre l’occasion de déployer ses moyens vocaux dans des volutes et des hauteurs  dignes des soprani rossiniens.

Leona est la cible d’un personnage dont on ne sait trop comment il a obtenu l’oreille du gouverneur de Naples, alors qu’il ne cesse de manœuvrer pour nuire aux Espagnols, qu’il accuse de l’avoir ruiné. Ruffino – on entend la racine ruffian – vise à manipuler l’influençable Masaniello en excitant sa jalousie contre le comte de Torellas, qu’en intrigant bien informé il a reconnu même s’il feint le contraire, dans une scène dont la drôlerie n’a pas été rendue perceptible. Cette âme sans foi ni loi qui a un aplomb à toute épreuve permet à Nathanaël Tavernier de faire montre d’une excellente diction et d’exprimer par l’arrogance de l’extension sa voix de basse le cynisme du personnage.

Apparemment remis de son indisposition de la veille, Mert Süngü affronte victorieusement l’épreuve du rôle-titre. Que parfois la tension soit perceptible dans certains aigus en force est véniel, car la contrainte de devoir rester en scène pour cette version de concert s’ajoute à la longueur du rôle où les airs s’enchaînent, comme entre l’acte I et II. La recherche de nuances est indéniable, et appréciée, mais elle est entachée par un relâchement de la diction, en particulier au dernier acte. A noter que globalement la prononciation du français n’est pas rédhibitoire pour les non-francophones même si elle est parfois très appliquée.

Il serait injuste de ne pas mentionner l’apport des chœurs de la Philharmonie Szymanowski, qui parviennent malgré un effectif modeste – 25 participants ? – à fournir une  matière sonore convaincante.

L’assistance était maigre, il faut l’admettre. Certains commentaires estimaient que l’œuvre aurait pu rester où elle était. Au-delà de notre satisfaction de l’avoir découverte, il nous a semblé que pour un titre aussi riche de péripéties, travestissements, double jeu, méprises, contrastes entre place populaire et décor palatial, la meilleure option serait une version scénique. Mais son coût pourrait être exorbitant, à moins que les ressources techniques contemporaines ne permettent de trouver des équivalents aux dispositifs nécessaires pour faire fonctionner un grand spectacle. Une des raisons de la désaffection du public parisien consécutive à la création de La muette de Portici résidait d’ailleurs dans la supériorité du spectaculaire proposé à l’Académie Royale de Musique en comparaison de la proposition de l’Opéra-Comique. En attendant une hypothétique résurrection, on guettera l’enregistrement.

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Drame historique en quatre actes ( Théâtre royal de l’Opéra-Comique, Paris, 27 décembre 1827)

Musique de Michele Carafa

Livret de Moreau et Lafortelle

Partition d’après la propre édition du compositeur

Détails

Version de concert

Lumières
Marcel Hahn

Surtitres allemand et français
Reto Müller

 

Le gouverneur de Naples
Francesco Bossi

Le comte de Torellas
Luis Magallanes *

Masaniello
Mert Süngü

Leona (son épouse)
Catherine Trottmann

Théresia (sa belle-sœur)
Camilla Carol Farias *

Matteo (frère de Masaniello)
Juan Jose Medina

Ruffino (Génois fourbe et intrigant)
Nathanaël Tavernier

Giacomo (Jardinier de Pozzuoli)
Francesco Bossi

Calatravio (Percepteur des taxes)
Luis Magallanes *

Pedro (Homme du peuple)
Massimo Frigato *

Un montreur de marionnettes
Massimo Frigato

*Elèves de l’Académie

Soldats de la garde espagnole/ Gens du peuple napolitain

Chœur mixte

Chef de chœur

Piotr Piwko

Orchestre Szymanowski-Philharmonie de Cracovie

Direction musicale
Nicola Pascoli

Trinkhalle, Bad Wildbad, vendredi 19 juillet 2024 à 19h30

 

 

 

 

 

 

 

 

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