De Mozart à Offenbach
Récital de chant
Airs et duos de
W. A. Mozart, G. Berthold (d’après G. Rossini), A. Catalani, G. Puccini, L. Delibes,
J. Offenbach, J. Strauss, F. Lehár, A. Messager, H. Christiné et R. Friml
Danielle Chlostawa, soprano
Sophie Darmon, piano et chant
Grand Nancy, Centre culturel « des Ecraignes » de Villers-Lès-Nancy, 6 décembre 2009
Danielle Chlostawa : un radieux retour
Un timbre étonnamment rond et chaleureux, en plus de brillant ! Une remarquable aisance scénique au geste toujours sûr et juste, et donc un charme intact depuis une époque où Danielle Chlostawa faisait les belles soirées d’opérette de sa ville de Nancy. Si la voix s’estcorsée, cela lui permet d’aborder des airs requérant une importante progression dans l’intensité, comme dans La Wally d’Alfredo Catalani. L’opéra n’est pas une acquisition récente du reste, Madame Chlostawa ayant abordé La Fille du régiment, Lakmé, Les Contes d’Hoffmann, Mignon… conjointement à un bouquet d’opérettes classiques françaises ou viennoises. Ce soir le récital comportait aussi bien des airs de Le Nozze di Figaro que de La Bohème ou Gianni Schicchi, en plus d’une partie opérette nous montrant que le temps s’était arrêté, puisque l’on retrouvait intactes ses minauderies espiègles et gracieuses, jamais apprêtées ou agaçantes, mais sympathiques au possible par leur justesse naturelle.
Et voilà notre diva jouant ses rôles malgré l’aspect récital : revenant changée et tenant un boa rouge et un noir, s’indignant bientôt gentiment et s’amusant du fait que l’un des deux perdait ses plumes ! Armée d’un balais pour le besoin d’un air, la voici qui rassemble tout naturellement les plumes dont la chute n’était pas prévue…
Entrant dans le jeu… scénique, la pianiste accompagnatrice non seulement chantait des répliques ou participait délibérément à des duos, mais faisait remarquer à la diva qu’elle avait encore à chanter, ou alors l’exhortait à l’aigu final d’une valse de La Chauve-Souris, que la diva faisait mine de ne pas avoir envie de faire… Pour le pousser en fait, plus resplendissant que jamais, à tel point que le public, débordant d’enthousiasme, n’attendait pas la fin de la conclusion fortissimo de la valse au piano !
On remarquait d’autre part une prononciation de l’italien courageuse et méritante pour quelqu’un qui fit l’essentiel de sa carrière avec des oeuvres chantées en français. Il y eut même un morceau sans langue précise pour ainsi dire, joli bis inattendu, ce Duetto buffo di due gatti (Duo bouffe des deux chats) appelé couramment en français Duo des chats. Longtemps attribué à Rossini il semble être le fait d’un arrangeur qui, sous le pseudonyme de G. Berthold aurait emprunté des passages de son Otello (1816). Nos deux Artistes eurent le mérite de l’habiter véritablement, ajoutant aux minauderies habituelles et quelque peu convenues, des impatiences chatales (avec menaces !) fort cocasses !
Enfin, dernier bis joliment dédié à quelques personnes du public en particulier, l’émouvant Chant indien de l’opérette Rose-Marie, que l’entraînante diva réussit à faire reprendre par le public.
Un public du reste ravi par ce grand talent et cette facilité à aborder les rôles, et enjoignant « la » Chlostawa à se reproduire dans cette Capitale des ducs de Lorraine qu’elle a ensoleillé de son chant lumineux et chaleureux.
Yonel Buldrini