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L'Enfant prodigue|Alcyone — Paris (Musée d'Orsay)

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Spectacle
24 mars 2012
De la cantate comme sport national

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Claude DEBUSSY Le Printemps Pour soprano solo, choeur mixte et piano à quatre mains Maurice RAVEL Alcyone Cantate sur un livret d’Eugène et Edouard Adénys Alcyone Sophie-Nouchka Wemel Sophrona Fanny Lustaud Céyx Alexandre Pradier Claude DEBUSSY Salut Printemps Pour soprano solo, choeur mixte et piano à quatre mains L’Enfant prodigue Cantate sur un livret d’Edouard Guinand Lia Sophie-Nouchka Wemel Azaël Kaëlig Broché Siméon Thibault de Damas José Teunissen, Rick Hancké et Adrian Mirza, comédiens Mise en scène et conception vidéo Eric de Kuyper et Emile Poppe Costumes José Teunissen Lumières Marie Maguet Astrid Marc et Agnès Rouquette, piano Jeune Choeur de Paris, dir. Henri Chalet et Olivier Bardot Ensemble Cairn, dir. Guillaume Bourgogne Auditorium du Musée d’Orsay, Paris, samedi 24 mars, 20h

 

A l’exception de Rodrigue et Chimène, c’est toute la production lyrique de Debussy que Paris aura proposée au cours de ce premier trimestre 2012 : Le Martyre de saint Sébastienà la Cité de la Musique, Pelléas et les fragments d’après Edgar Poe à la Bastille, et enfin L’Enfant prodigue au Musée d’Orsay. Encore que cette cantate du prix de Rome ne soit guère, selon le compositeur lui-même, qu’une « forme hybride », une « symphonie avec personnages chantants ». Fallait-il donc mettre en scène un exemple de ce que Debussy appelait le « sport national » ? On hésite d’autant plus à répondre affirmativement que le spectacle proposé à l’auditorium d’Orsay laisse un sentiment mitigé. Conscients de la brièveté de L’Enfant prodigue (1884) les responsables de la programmation ont souhaité compléter la soirée avec deux autres pièces de Debussy conçues dans le cadre du « concours d’essai » du Prix de Rome : Salut printemps (1882) et Le Printemps (1884). Et comme cela faisait encore un peu maigre, au lieu d’y ajouter Le Gladiateur, cantate qui valut à Debussy un deuxième prix en 1883 (enregistrée en 2009chez Glossa), on a préféré aller chercher l’une des trois cantates composées par Ravel dans le même cadre, Alcyone (1902), qui ne remporta aucune distinction. Les vingt années qui séparent les deux compositeurs frappent d’autant plus qu’ils imitent chacun des maîtres différents : pour Debussy, L’Enfant prodigue est clairement un exercice dans le style de Massenet, tandis qu’Alcyone relève d’un wagnérisme très modéré.

 

Si les deux cantates sont mises en scène, on y reviendra, les chœurs de Debussy sont en revanche interprétés comme au concert : chanteurs tout de noir vêtus, dirigés successivement par les deux chefs du Jeune Chœur de Paris. Cet ensemble réunit des élèves du Conservatoire à rayonnement régional de Paris, et on a notamment pu l’entendre dans le disque Debussy de Natalie Dessay (voir recension). Si le chœur présente une belle qualité de son, la diction gagnerait à être améliorée, reproche qu’on adressera en particulier à la soliste Julie Prola, parfaitement incompréhensible.

 

Pour Alcyone et L’Enfant prodigue, les solistes viennent également du Jeune Chœur de Paris, Sophie-Nouchka Wemel assurant le principal rôle féminin des deux œuvres. Lourde charge pour de jeunes épaules (lors de la première audition, le rôle de Lia fut chanté par la grande Rose Caron), mais assumée avec courage, et même avec éloquence chez Debussy, la prestation de la soprano chez Ravel étant un peu moins convaincante. Cela tient peut-être au fait qu’Alcyone fait l’objet d’une mise en scène traditionnelle, dans un décor néo-classique (méridienne à la Récamier placée devant un drapé blanc), où les chanteurs en costumes pseudo-grecs, doivent donc concilier les exigences du chant et celles du jeu d’acteur. La difficulté est moindre pour L’Enfant prodigue, où Eric de Kuyper formule une proposition plus étrange : les solistes en noir interprètent une version de concert, sur la gauche de la scène ; à droite, trois comédiens (le père, la mère, le fils) restent assis dans un décor de salon bourgeois ; au centre, sur un écran, est projetée une sorte de pantomime filmée, où des acteurs (les mêmes qu’on voit assis à droite ?) jouent le peu d’action qu’inclut cette cantate, en costumes vaguement historiques, devant un fond sur lequel la palette graphique s’en donne à cœur joie, parfois avec des effets assez heureux de pointillisme multicolore, en écho au texte même (« Les fleurs, leur couleur diaprée… »). Tout cela n’est pas déplaisant, mais paraît quand même assez vain : à quoi bon ce trio immobile à droite (le père lit son journal, la mère tricote, le fils reste avachi ?) ? Pourquoi ne pas avoir demandé aux chanteurs d’interpréter eux-mêmes la pantomime filmée ? Le peu d’intérêt de ce qui se passe sur scène permet du moins de se concentrer sur les trois solistes. La basse Thibault de Damas a peu de choses à chanter, et c’est dommage car il possède une belle prestance. Le ténor Kaëlig Broché a un très joli timbre et une diction claire, mais il craque hélas les deux aigus de son rôle. Dans Alcyone, son collègue Alexandre Pradier assure sans mal une tessiture plus tendue, tandis que la mezzo Fanny Lustaud écope elle aussi d’un rôle sacrifié.

 
Pour les deux cantates, le Musée d’Orsay a commandé une réduction pour petit ensemble, que dirige le transcripteur lui-même, Guillaume Bourgogne. Au quintette à cordes et au quatuor à vent s’ajoute une harpe et surtout un accordéon, dont Ravel aurait sans doute goûté les sonorités inédites. Cette transcription met particulièrement en valeur l’orientalisme de la partition de Debussy, que l’on aurait sans doute aussi bien goûté en version de concert, tout compte fait
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