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FOURDRAIN, Les Contes de Perrault – Paris (Athénée)

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Spectacle
15 avril 2025
Le conte est bon

Note ForumOpera.com

4

Infos sur l’œuvre

Féérie lyrique en trois (originellement en quatre) actes

Musique de Félix Fourdrain sur un livret d’Arthur Bernède et Paul de Choudens

Créée le 27 décembre 1913 au Théâtre de la Gaîté de Paris

Détails

Mise en scène, adaptation
Valérie Lesort, assistée de Florimond Plantier

Scénographie, costumes, décors
Vanessa Sannino et Ninon Le Chevalier

Création Lumières
Pascal Laajili et Boris Pijetlovic

Chorégraphies et mouvements
Rémi Boissy et Julie Galopin

Création des marionnettes et masques
Caroline Allemand

Conseiller artistique
Christophe Mirambeau

Cendrillon, le Petit Poucet
Anaïs Merlin

La fée Morgane
Julie Mathevet

Olibrius
Romain Dayez

Le prince Charmant
Enguerrand de Hys

Le Chat Botté
Camille Brault

Barbe-Bleue, La Pinchonnière
Philippe Brocard

Croquemitaine, Meunier
Richard Delestre

Madame de Houspignoles
Lara Neumann

Les Frivolités parisiennes

Direction musicale
Dylan Corlay

 

Paris, Théâtre de L’Athénée-Louis-Jouvet, samedi 12 avril, 20h

Un serpent menace un oiseau bleu : ce ravissant épisode pour marionnettes (et moirures rimski-korsakoviennes à l’orchestre) lance le récit. Vaillamment, le Petit Poucet protège l’oiseau, qui se révèle être la fée Morgane, poursuivie par son mortel ennemi, le maléfique génie Olibrius. En remerciement, Morgane fait du Petit Poucet un Prince Charmant. Qui, bien entendu, s’éprend immédiatement de Cendrillon. Mais Olibrius veille et, vindicatif, change le prince en monstre bossu : Riquet à la houppe. Puis il cherche à marier Cendrillon à Barbe-Bleue – ou, à défaut, à la faire dévorer par le Croquemitaine. Pour protéger l’héroïne, Morgane la dissimule sous une peau d’âne. Pas galant pour un sou, Charmant, qui a retrouvé ses attraits, ne veut plus de sa promise. Qu’Olibrius, toujours aussi néfaste, endort pour cent ans…

Avouons avoir, par moments, perdu le fil de cette dinguerie, habilement resserrée par Valérie Lesort, qui a aussi modernisé (mais heureusement sans excès) les dialogues. Qu’importe ! Le livret de Bernède et de Choudens ne brille ni par sa cohérence, ni par sa langue, prodigue en vers de mirliton. Il s’applique surtout à caser le plus de contes possibles dans un canevas assez lâche et souvent répétitif, au sein duquel certains personnages font de la figuration – un Chaperon rouge à la voix caverneuse passe trente secondes, tandis que le rôle du Chat Botté, introduit par une trépidante symphonie de chasse, peine à s’intégrer. Héritier des opéras-fééries d’Offenbach (Orphée aux enfers ; Le Roi Carotte ; Le Voyage dans la lune), cet ouvrage aux multiples tableaux semble surtout annoncer les revues ou les musicals de Broadway – par exemple, Into the woods de Stephen Sondheim, au procédé narratif similaire.

les contes de perrault
@ Fabrice Robin

La musique du sieur Félix Alfred Dourdrain (1880-1923), dont nous n’avions jamais entendu parler, témoigne de sa formation au sein de l’école Niedermeyer et sous la férule de Massenet : riche en sucre comme en valses, elle évoque à Christophe Mirambeau « Esclarmonde ou Sigurd » (rien que ça), mais l’on peut y renifler aussi des relents de Tchaïkovski. Cela manque de netteté mélodique, et, si les états d’âme de Cendrillon durent trop, on a regretté que ne soient pas plus développées les belles idées de la scène du bal – l’ensemble « Je suis duc », lancé par le père de Cendrillon, puis l’air d’Olibrius sur lequel tous renchérissent, « Regardez-le comme il est laid ! ». L’orchestration (ou l’arrangement ?), pour être attendue, n’en est pas moins délicieuse : le basson introduit le Petit Poucet, les cuivres bougonnent avec la marâtre et les méchantes sœurs, la harpe accompagne la fée, le violon solo ourle les cils de Cendrillon, les bois ténorisent avec le prince tandis que cors et castagnettes pétaradent avec le Chat botté. Et l’on n’a pas lésiné sur l’orchestre : Les Frivolités parisiennes qui, au disque, nous ont si bien chatouillé l’oreille (dans Le Testament de la Tante Caroline de Roussel, chez Naxos, et dans Yes d’Yvain, chez Alpha) sont une bonne trentaine, tous les pupitres étant représentés. Sans que jamais, grâce à la brillante direction de Dylan Corlay, l’équilibre avec les voix ne devienne problématique.

© Fabrice Robin

On sait pourtant combien est délicat l’exercice d’équilibriste réclamé par l’alternance du parlé et du chanté : la douzaine d’interprètes – campant deux fois plus de rôles et à laquelle s’ajoute un chœur de sept voix – le maîtrise à merveille. On ne saurait tous les citer. Saluons seulement la vaillante et versatile Anaïs Merlin, que l’on préfère cependant dans les passages comiques (hilarant sabir campagnard de Peau d’Âne !) que dans des pages lyriques un peu forcées, le tordant Enguerrand de Hys, en prince pleurnichard et zézayant, la tintinnabulante Morgane de Julie Mathevet, le Chat Botté plein de panache de Camille Brault et le rougeoyant Olibrius de Romain Dayez, dont la technique relève du cabaret plutôt que du lyrique proprement dit. Quant à l’excellent Philippe Brocard, il met l’auditoire dans sa poche avec ses « couplets du bicarbonate », avant que son Barbe-Bleue ne finisse rôti par ses défuntes femmes, dont le chœur parodie Robert le diable de Meyerbeer.

Les mises en scène d’opéra réalisées par Valérie Lesort aux côtés de son compagnon Christian Hecq ne nous ont pas toujours convaincu (on pense notamment à un Ercole amante trop bouffon). Ici, dans un répertoire moins balisé, moins contraignant, elle peut donner libre cours à sa fantaisie, à son sens du rythme, à sa finaude direction d’acteurs. Il faut dire qu’elle est fort bien secondée par une costumière à l’imagination délirante et un créateur de lumières attentionné. Si les décors restent légers et allusifs – un moulin et une demi-lune en carton, quelques cadres dorés –, le recours ponctuel aux marionnettes et aux ombres chinoises suffit à créer la poésie : quelle jolie (et simple) idée que ces papillons qui habillent Cendrillon !

En sortant, nous entendons les enfants composant un tiers du public évoquer Shrek et Lady Gaga : c’est dire qu’une opérette pourtant très connotée 1900 peut encore leur parler, un bon siècle plus tard. Coproduit par les opéras de Reims, Compiègne, Tourcoing et Dijon (où il fera escale en novembre), ce spectacle sémillant, qui ne se prend nullement au sérieux, séduira petits et grands.

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Féérie lyrique en trois (originellement en quatre) actes

Musique de Félix Fourdrain sur un livret d’Arthur Bernède et Paul de Choudens

Créée le 27 décembre 1913 au Théâtre de la Gaîté de Paris

Détails

Mise en scène, adaptation
Valérie Lesort, assistée de Florimond Plantier

Scénographie, costumes, décors
Vanessa Sannino et Ninon Le Chevalier

Création Lumières
Pascal Laajili et Boris Pijetlovic

Chorégraphies et mouvements
Rémi Boissy et Julie Galopin

Création des marionnettes et masques
Caroline Allemand

Conseiller artistique
Christophe Mirambeau

Cendrillon, le Petit Poucet
Anaïs Merlin

La fée Morgane
Julie Mathevet

Olibrius
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Le prince Charmant
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Le Chat Botté
Camille Brault

Barbe-Bleue, La Pinchonnière
Philippe Brocard

Croquemitaine, Meunier
Richard Delestre

Madame de Houspignoles
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Les Frivolités parisiennes

Direction musicale
Dylan Corlay

 

Paris, Théâtre de L’Athénée-Louis-Jouvet, samedi 12 avril, 20h

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