À l’occasion de la sortie d’un nouvel enregistrement de l’œuvre sur leur label discographique, Château de Versailles Spectacles proposait deux représentations du Messie. Dans le superbe écrin de la Chapelle Royale, c’est avec les forces locales – orchestre et chœur – que le chef-d’œuvre de Haendel a rayonné de tout son éclat, dans une version très enlevée.
La réussite de cette soirée vaut d’abord pour la direction flamboyante et inventive de Gaétan Jarry. Durant toute la représentation, le chef réussit le parfait équilibre entre passages de grande puissance dramatique (« Surely » en début de deuxième partie) et moments de recueillement (très belle symphonie pastorale en première partie). Par ailleurs, avec l’énergie que l’on lui connaît, Gaétan Jarry obtient le meilleur des instrumentistes et chanteurs, comme en témoignent les très belles fugues de l’ouvrage ou encore un irrésistible « Hallelujah ».
La vingtaine de choristes du Chœur de l’Opéra Royal est ainsi d’une belle précision et d’une grande lisibilité. Si les passages les plus virtuoses secouent un peu le pupitre des basses (« For unto us a child is born ») et que l’on peut regretter un pupitre d’altos un rien effacé, le jeune chœur réussit une très belle prestation dans une œuvre qui l’expose constamment. De même, les musiciens de l’Orchestre de l’Opéra Royal, dynamiquement emmenés par leur première violon Fiona Poupard, répondent avec ferveur aux demandes de leur chef. Les solistes brillent, de Chloé de Guillebon à l’orgue solo dans « If God be for us, who can be against us ? » à Serge Tizac dans « The trumpet shall sound ».
Le quatuor de solistes est d’excellente tenue. Fière de son récent CD consacré à la cantatrice Anna Maria Strada, Marie Lys aborde la partie de soprano telle une prima donna. Son « Rejoice greatly » est ainsi une parfaite démonstration : beauté du trille, éclat de l’aigu, sens aigu de l’ornementation. Très impliquée, la soprano n’en oublie pas les moments plus tendres, avec notamment un rayonnant « I know that my Redeemer liveth ». Confier la partie d’alto au contre-ténor soprano Nicolò Balducci pouvait s’avérer un choix un peu curieux. Le jeune chanteur italien y révèle toutefois un timbre percutant, compensant un léger manque d’assise dans le grave par de beaux ornements et da capi dans l’aigu (« He was despised »). Dès son entrée dans le récitatif « Comfort ye my people » (merveilleuse cadence jusqu’au si aigu), Laurence Kilsby éblouit par son aisance et la qualité de sa déclamation. Formidablement épanouie sur toute la tessiture, la voix du jeune ténor, subtile et pure, est un enchantement. Enfin, la basse Alex Rosen impressionne par des graves spectaculaires et une belle présence (récitatif accompagné « Thus saith the Lord »), même si les airs où la tessiture est plus aiguë (« The trumpet shall sound ») le trouvent un peu moins à l’aise.
En rappel, c’est évidemment avec un « Hallelujah », chanté par chœur, solistes et public, que se clôt cette très belle représentation du Messiah.