Inusable Barbier, proposé cette saison un peu partout en France, et repris à Tours dans la mise en scène de Gilles Bouillon créée en 2006 au même endroit. Sept ans après, le spectacle n’a pas pris une ride. Peut-être parce qu’il ne s’embarrasse ni de préjugés, ni de complications. Servir la pièce sans la déformer, ni l’encombrer de gags. Compenser la modestie des moyens par un dispositif astucieux qui s’inspire des tréteaux de foire : une scène surélevée, des jeux d’ombre chinoise, quelques accessoires éloquents. Ajuster le mouvement au rythme de la musique. Voilà la recette d’un succès qu’applaudit chaleureusement un public conquis une fois de plus par le génie de Rossini.
Faut-il alors bouder son plaisir si les chanteurs réunis ne répondent pas à toutes les exigences de la partition ? Leur jeunesse et leur enthousiasme rachètent les quelques défauts de style. L’élégance de Manuel Nunez-Camelino (Almaviva), l’énergie de Pierre Doyen (Figaro), la fantaisie de Romie Esteves (Rosina) aident à faire passer l’approximation des vocalises, les aigus à l’arraché ou mal à propos, la sobriété des ornementations et autres manquements aux règles rossiniennes. Même le Bartolo drolatique de Luciano Di Pasquale, pourtant rompu au chant syllabique, parait ici moins précis qu’à Bordeaux en début de saison. Jean Teitgen (Basilio) fait son petit effet avec une « calomnie » bon enfant. Sophie Fournier en Berta s’époumone dans le finale du premier acte et, dans son aria du second, boit à la bouteille. La salle s’esclaffe. La bonne humeur rejaillit jusque dans la fosse où Emmanuelle Trenque au piano forte improvise sur le thème de « Ouvrez la cage aux oiseaux » quand Rosine se retrouve derrière les barreaux. Vincent de Kort dirige l’ensemble avec fantaisie, rafle sa réplique à l’Officier (« ho inteso ») mais a parfois du mal à tenir la cadence horlogère des mouvements les plus rapides. Il en faut davantage pour enrayer la mécanique comique de l’ouvrage. Oui, décidément, inusable Barbier.
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