Le festival de Garsington s’est depuis longtemps fait une spécialité des opéras de Mozart pour lesquels il semble un cadre idéal. Le cru 2017 ne fait pas exception avec ces Nozze di Figaro pleines d’entrain et d’énergie. La mise en scène très théâtrale de John Cox anime chacun des chanteurs jusque dans les moindres détails dans une production qui sonne « vraie ». Les beaux décors modulaires de Robert Perdziola occupent parfaitement le large plateau, et sont en écho avec les jardins environnants sur lesquels le théâtre, aux murs transparents, est ouvert.
La distribution est dominée par le Comte de Duncan Rock, physiquement beaucoup plus jeune que ce l’on voit habituellement. Le personnage n’est plus celui d’un homme mûr atteint du Démon de midi, mais d’un jouisseur bien incapable de se plier à son nouveau rôle d’époux. La voix est puissante et le timbre plaisant, la technique impeccable : rien d’étonnant à ce que le baryton britannique ait déjà entamé une carrière internationale. Jennifer France est une délicieuse Susanna. Le timbre est un peu passepartout, mais le chant est coloré et ses inflexions dramatiques toujours fines et bien venues. L’actrice est excellente. Le Figaro de Joshua Bloom n’a pas toute la vivacité virevoltante de ses prédécesseurs dans le rôle. Il serait même plus sage que le Comte ! La basse australo-américaine a de beaux graves, mais l’aigu est un peu tendu. La Comtesse de Kirsten MacKinnon est malheureusement un peu verte. Même si la jeune chanteuse tire son épingle du jeu, on attend dans ce rôle un timbre plus rond et moins acide, une voix plus stable. Le Cherubino de Marta Fontanals-Simmons passe assez inaperçu faute de projection suffisante. Le timbre est joli, l’actrice efficace, mais la voix bien trop peu puissante. Janis Kelly est une Marcellina épatante dans ce qui lui reste de rôle (son air est, classiquement, coupé). Le Bartolo de Stephen Richardson est un peu à la peine dans l’aigu. La Barbarina de la toute jeune Alison Rose est plaisante, mais la projection est encore bien faible pour l’instant, même pour cette acoustique clémente. Timothy Robinson est un Don Basilio sonore. Enfin, les derniers comprimari, le Don Curzio d’Alun Rhys-Jenkins et l’Antonio d’Andrex Tipple, sont d’un excellent niveau.
La réussite de la soirée doit énormément à la direction de Douglas Boyd. Son Mozart est vif et pétulant, en un mot : théâtral. Mais le chef écossais sait aussi aller chercher dans la partition des détails d’orchestration inhabituels, nous donnant alors l’impression de redécouvrir l’ouvrage. Boyd nous propose ainsi un tapis sonore quelque fois inédit mais toujours authentiquement mozartien.