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Matthias Goerne et l’Orchestre National de France — Paris (TCE)

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Spectacle
19 mars 2022
Les tableaux crépusculaires d’un Maître

Note ForumOpera.com

4

Infos sur l’œuvre

Détails

Richard Strauss

Sérénade pour instruments à vent

Richard Wagner

Wesendonck-Lieder (orchestration de Hans Werner Henze)

Anton Webern

Passacaille

Franz Schubert

Symphonie n° 4 D. 417 « Tragique »

Matthias Goerne, baryton

Orchestre National de France

Direction musicale

Cristian Măcelaru

Paris, Théâtre des Champs Elysées, jeudi 17 mars 2022, 20h

Matthias Goerne revient à Paris pour nous donner à entendre le joyau wagnérien consacré au Lied, les Wesendonck-Lieder. Nous imaginions retrouver ces pièces dans leur écrin d’origine à savoir un dialogue piano et voix, mais c’est dans une parure symphonique qu’ils nous sont présentés dans une orchestration de Hans Werner Henze, alors qu’elles sont de nature fondamentalement intimiste et s’apprécient comme telles. Mais la soirée en elle-même n’avait rien d’intimiste et n’était pas davantage dédié au chant, tant la part belle a été faite ici aux œuvres orchestrales de Strauss à Schubert. On peut en effet regretter que Matthias Goerne n’ait passé en tout et pour tout que 20 minutes sur scène, le temps des lieder wagnériens, et qu’il n’a pas reparu à la fin du spectacle pour quelques bis de son cru. A l’instar de Ian Bostridge au même TCE, c’est désormais une habitude pour des artistes de ce niveau de réduire leur intervention à la portion congrue, laissant ensuite à l’orchestre toute la scène. Mais au contraire du concert Bostridgien, et de son « Mahler intimiste », la couleur était ici clairement énoncée à la lecture du programme. Tout cela n’a toutefois guère d’importance, quand l’interprétation est de si haut niveau, et qu’elle offre un infini plaisir d’écoute pour les mélomanes de tous horizons.

Après une Sérénade pour instruments à vent, en ouverture de programme, alliant à la fois une douceur infinie et la puissance nécessaire au répertoire straussien, Matthias Goerne a livré une interprétation bouleversante des cinq pièces wagnériennes, préfigurant le drame lyrique de Tristan, de par l’amour interdit mais aussi ses thèmes récurrents, telle la luminescence de la nuit préférée au jour ou l’extase dans la mort. Revenant à la simplicité des mots et à la sincérité que renferme chaque Lied, Matthias Goerne laisse s’exprimer l’exaltation des sentiments toute en nuance et retenue. La voix n’a plus tout à fait le même éclat que par le passé, le grave sonne parfois un peu rugueux, mais peu importe, l’interprétation nous saisit par sa beauté fulgurante, ses clairs-obscurs qui nous mènent du crépuscule à l’aube. Son phrasé, son souffle long, ses nuances sont toujours aussi admirables, et l’intelligence de l’interprétation force le respect. L’orchestre National de France joue quant à lui davantage qu’un rôle d’accompagnateur, et offre au dialogue constant avec la voix dans un écrin symphonique somptueux. Matthias Goerne est à la scène un Kurwenal exceptionnel dans Tristan et Isolde de Wagner : il aborde les Wesendonck-Lieder avec les mêmes affinités profondes. Entre des graves ronds et habités, un registre medium homogène et plein, et des aigus d’une fragilité à fleur de peau, sa tessiture entière se met au service d’un sens du legato et des conduites de phrases parfaitement assurées. Tout concourt à faire entendre une puissance expressive savamment dosée agrémentée d’une capacité descriptive sans égal. Matthias Goerne donne ici une leçon de chant, fusse-t-elle cantonnée à une parenthèse.

Après cette prestation vocale de haute volée, acclamée à juste titre par le public, l’Orchestre national de France sous la direction de Cristian Măcelaru s’est taillé la part du lion d’abord dans une Passacaille d’Anton Webern pleine de fougue puis dans la symphonie n°4 dite « Tragique » de Schubert. Le chef d’orchestre donne une vitalité rythmique, des respirations et une virtuosité parfaite. Sa direction est électrisante. Son geste est d’une souplesse inhabituelle et ses phrasés se caractérisent par la musicalité et par la finesse. L’intonation des instruments est irréprochable. Les cordes se distinguent par la variété des teintes, et l’on admire les timbres idéaux des bois et ceux des cuivres.

Une soirée plus symphonique que vocale, mais néanmoins splendide, où le grand Matthias Goerne aux côté d’un orchestre aux sonorités somptueuses, nous fait redécouvrir Wagner. Avec lui, le soleil crépusculaire de la douleur se pare des lumières de l’aube.

 

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Wesendonck-Lieder (orchestration de Hans Werner Henze)

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Symphonie n° 4 D. 417 « Tragique »

Matthias Goerne, baryton

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Paris, Théâtre des Champs Elysées, jeudi 17 mars 2022, 20h

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