Premier grand spectacle lyrique de la 25e édition du Festival Lyrique-en-Mer de Belle-Île, l’opéra Didon et Enée de Purcell bénéficie d’une conception particulièrement réussie. Avec peu de moyens, la metteuse en scène Véronique Roire, parvient à créer un spectacle d’une réelle beauté. Elle a eu l’excellente idée de faire précéder l’opéra lui-même par un prologue qui, sur des musiques de Purcell, conte, par des extraits de l’Énéide en voix off, le départ d’Enée, avec ses enfants, de Troie à Carthage. Son errance est évoquée poétiquement par une sorte de théâtre d’ombres. Les chœurs interprétés par les jeunes stagiaires de l’Académie préludent à l’entrée en scène d’Énée, de Didon et sa servante Belinda chantant, chacun en sa solitude, des airs de divers opéras de Purcell. Le rideau tombe. Cette scène a fortement impressionné le public.
Quand commence l’opéra lui-même, la rencontre et l’amour entre Enée et Didon prennent dès lors tout leur sens. Un jeu raffiné de lumières dans des décors simplement suggérés, une direction d’acteurs précise et l’intervention pleine d’humour d’un jeune enfant – lutin malin et facétieux – créent une atmosphère propice au rêve. Dans la scène des sorcières, interprétée par les jeunes stagiaires, la jeune soprano maltaise, Raisa Marie Micallef, fait un début remarqué.
La reine de Carthage est interprétée, en grande tragédienne, par la soprano afro-américaine Jazmin Black Grollemund. Sa voix au timbre riche et puissant rayonne dans l’air final « Remember me ».
A ses côtés la soprano Maria Koroleva est une Belinda touchante. Le baryton américain Michael Kelly, au timbre particulièrement émouvant, trouve dans Enée un rôle à sa mesure. Son interprétation tout en nuances allie la puissance aux pianissimi les plus intimes. Poète et acteur à ses heures, il est bouleversant d’humanité dans les adieux d’Enée.
Le Festival a commencé par l’ensemble Roots dirigé par l’exubérant violoniste Nemanja Radulovic, et les concerts vont se succéder jusqu’à l’hommage à Sarah Bernhardt à la Pointe des Poulains, face à l’océan, et le récital final de la pianiste Anne Quéfellec et de son fils Gaspard Dehaene.
Le public, enthousiaste, est à tous les rendez-vous. Un défi brillamment relevé par le Festival.