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ROSSINI, La Cenerentola – Barcelone

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Spectacle
20 mai 2024
Cendrillon au Pays des jouets

Note ForumOpera.com

4

Infos sur l’œuvre

La Cenerentola, ou La Bontà in trionfo,
Dramma giocoso en deux actes,
Musique de Gioachino Rossini,
Livret de Jacopo Ferretti d’après le conte de Charles Perrault (1697), et les livrets de Charles Guillaume Étienne (opéra Cendrillon de Nicolas Isouard) et de Francesco Fiorini (opéra Agatina de Stefano Pavesi).
Créé à Rome (Teatro Valle) le 25 janvier 1817.
Production du Teatro dell’Opera di Roma, 2016.

Détails

Mise en scène
Emma Dante
Scénographie
Carmine Maringola
Costumes
Vanessa Sannino
Chorégraphie
Manuela Lo Sicco
Lumières

Cristian Zucaro

Angelina, dite la Cenerentola
Maria Kataeva
Don Ramiro
Javier Camarena
Dandini
Florian Sempey
Don Magnifico
Paolo Bordogna
Alidoro
Erwin Schrott
Tisbe
Marina Pinchuk
Clorinda
Isabella Gaudi

Cor Madrigal (Père Lluis Biosca, chef du chœur)
Orchestre symphonique du Gran Teatre del Liceu
Direction musicale
Giacomo Sagripanti

Barcelone (Gran Teatre del Liceu), samedi 18 mai 2024, 19 h

Une annonce devant le rideau avant le début du spectacle, c’est toujours mauvais signe… Eh bien non, ce soir, il s’agit de rappeler que cette série de représentations est dédiée à une grande contralto, qui a souvent chanté au Liceu, et qui est récemment disparue, Ewa Podleś. Une immense ovation emplit la salle, et ce n’est que justice, d’autant qu’elle allait ainsi galvaniser plus encore une troupe déjà dans une forme qui allait s’avérer exceptionnelle.

La Cenerentola a été créée à Barcelone dès 1818 (Teatre de la Santa Creu), puis a été jouée au Liceu quarante-deux fois, en 1854, 1862, 1954, 1961 (Fiorenza Cossotto), 1970 (Teresa Berganza), 1979 et 1991, enfin 2007 avec le couple mythique Joyce DiDonato et Juan Diego Flórez qui a fait les beaux soirs de nombreux autres théâtres, dont la Scala de Milan. Œuvre jouée très souvent à travers le monde, la Cendrillon de Rossini nous a habitués à des chanteurs exceptionnels, avec des Angelina aussi habiles actrices qu’étonnantes pyrotechniciennes. Mais pour la présente série de représentations, les deux distributions prévues ont dû s’accommoder de plusieurs défections, de Gaëlle Arquez et Roberto Tagliavini, « pour raisons personnelles », à Carlos Chausson qui abandonne les rôles scéniques.

Rossini et son librettiste ayant gommé toute référence au domaine de la magie du récit original de Perrault, on s’attend à trouver dans les productions scéniques l’émerveillement un peu enfantin qui se doit de découler de l’œuvre. Ce soir, la mise en scène de la cinéaste sicilienne Emma Dante se fonde sur un groupe de cinq danseuses et cinq danseurs-figurants qui, une grande clé dans le dos, constituent des doubles automates, chargés de traduire les sentiments de l’héroïne et du prince. Évoquant Casse-Noisette, la poupée Olympia et Babes in Toyland (Laurel et Hardy), l’exercice se situe entre un surréalisme pop et les dessins animés de Walt Disney. On peut dire que, dans des décors et des costumes plutôt disneyens, il est globalement réussi, permettant l’absence de tout temps mort et des transitions souples, mais il n’est pas sans engendrer une certaine monotonie du fait de la répétitivité des principes chorégraphiques.

Comme tout conte de fées doit dégager une morale, tout en restant léger, drôle et éducatif, on a droit ce soir à des moments comiques, mais tempérés par des éléments tragiques inventés par la metteuse en scène, qui souhaite dénoncer le harcèlement et la violence de genre en insistant sur la psychologie des personnages. C’est ce qui explique qu’à la fin Tisbe et Clorinda deviennent à leur tour ainsi que leur père, des jouets avec un grande clé dans le dos. Il faut dire que dans la production originale, à l’Opéra de Rome (2016), elles se suicidaient, et cette nouvelle fin est quand même à la fois plus inventive, plus drôle et mieux en phase avec le conte et l’ensemble de la production. Reste, à la fin du bal chez le prince, le suicide collectif au revolver de toutes les autres prétendantes, les unes après les autres, qui a de quoi impressionner nos chères petites têtes blondes qui seraient venues au Liceu rêver princesse et prince charmant…

Photos © A. Bofill/Liceu

La Cenerentola de Rossini est certes un opéra difficile, dans la mesure où les interprètes doivent équilibrer les moments de comédie avec d’autres plus dramatiques, tout en assurant une partition périlleuse, avec des airs difficiles et de longs ensembles, sans parler des prouesses belcantistes qui ont rendu l’œuvre célèbre. Le jeune et énergique chef Giacomo Sagripanti connaît parfaitement Rossini et les écueils du bel canto, et sait à bon escient entraîner les chanteurs au-delà de leurs limites en leur imposant des tempi vigoureux. L’orchestre et le chœur répondent parfaitement, les ensembles vocaux scéniques (« Siete voi? – Questo è un nodo avviluppato ») sont parfaitement en place, le résultat musical est parfait.

Il faut dire que ce soir le plateau est superlatif, et que l’on assiste vraiment à une représentation exceptionnelle. Par qui commencer, tant chacun a donné le meilleur ? À l’applaudimètre final, c’est Florian Sempey (Dandini) qui l’emporte haut la main (mais tous ses partenaires reçoivent un accueil également triomphal). On ne sait ce que l’on doit le plus admirer, de la voix avec ses inflexions variées, du phrasé, de l’interprétation (« Come un’ape ne’ giorni d’aprile »), des sous-entendus, de la prestance, du jeu en général, de la synchronisation parfaite des gestes avec la musique, bref du grand art qui entraîne une totale adhésion des spectateurs.

On suit depuis quelques années la belle carrière de la cantatrice russe Maria Kataeva (Angelina), qui confirme ce soir une fois de plus toutes les qualités de sa voix chaude et ensorcelante (en particulier « Una volta c’era un re » et son rondeau final), parfaitement adaptée à Rossini avec son art de la colorature, ses excellentes qualités d’actrice, et puis ne boudons pas notre plaisir, un physique idoine. Ce n’est plus seulement une jeune chanteuse prometteuse, elle a d’ores et déjà gagné ses galons de diva. Le Mexicain Javier Camarena (Don Ramiro) est peut-être un peu en-deçà au premier acte, mais c’est le rôle qui le veut (mais qu’il est donc mal costumé !). Il se rattrape bien évidemment au second acte, donnant tous les aigus avec une grande insolence (« Sì, ritrovarla io giuro »), sans toutefois arriver à donner au personnage la nonchalance, la prestance, ni le charme que d’autres lui ont imprimé par le passé.

Paolo Bordogna
incarne un Don Magnifico qui tire bien son épingle du jeu, imprimant sa propre personnalité à un personnage qui a lui aussi connu des titulaires prestigieux. Même s’il chante parfaitement ses deux airs, d’une voix noble et bien assurée (« Miei rampolli femminini » et « Sia qualunque delle figlie »), c’est peut-être dans les ensembles et dans ses échanges avec ses partenaires qu’il tire le meilleur de ses dons de comédien. L’Alidoro d’Erwin Schrott, dont on connaît la voix méphistophélique et les graves profonds, est lui aussi exceptionnel de prestance, de drôlerie et d’à-propos. Enfin, la mezzo biélorusse Marina Pinchuk (Tisbe) et la soprano catalane Isabella Gaudi (Clorinda) forment le couple attendu de chipies aussi bêtes, ridicules que méchantes, dotées de voix puissantes et bien assorties.

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La Cenerentola, ou La Bontà in trionfo,
Dramma giocoso en deux actes,
Musique de Gioachino Rossini,
Livret de Jacopo Ferretti d’après le conte de Charles Perrault (1697), et les livrets de Charles Guillaume Étienne (opéra Cendrillon de Nicolas Isouard) et de Francesco Fiorini (opéra Agatina de Stefano Pavesi).
Créé à Rome (Teatro Valle) le 25 janvier 1817.
Production du Teatro dell’Opera di Roma, 2016.

Détails

Mise en scène
Emma Dante
Scénographie
Carmine Maringola
Costumes
Vanessa Sannino
Chorégraphie
Manuela Lo Sicco
Lumières

Cristian Zucaro

Angelina, dite la Cenerentola
Maria Kataeva
Don Ramiro
Javier Camarena
Dandini
Florian Sempey
Don Magnifico
Paolo Bordogna
Alidoro
Erwin Schrott
Tisbe
Marina Pinchuk
Clorinda
Isabella Gaudi

Cor Madrigal (Père Lluis Biosca, chef du chœur)
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