Une semaine avant Noël, et vingt ans après sa naissance, le Concert de l’Hostel Dieu, sous la direction de Franck-Emmanuel Comte, proposait une soirée où alternaient les œuvres de trois grands maîtres italiens de l’ère baroque et des chants populaires ainsi que des laudes – chants de louanges religieux entonnés après les matines – des XVIIe et XVIIIe siècles. Écriture savante et composition plus simple convergeaient dans la célébration de la Nativité, dont Franck-Emmanuel Comte, dans son propos introductif, a rappelé la double dimension d’allégresse et de recueillement.
Parfaitement à l’aise dans ces styles divers, l’orchestre de chambre du Concert de l’Hostel Dieu donne une interprétation fluide et enlevée de ces œuvres, où se distingue la virtuosité du premier violon François Costa. L’audition permet véritablement de qualifier le Concerto grosso de Corelli de tableau instrumental de la Nativité, auquel les chants populaires collectés dans les provinces italiennes (notamment du sud de l’Italie) font pendant, telles des miniatures musicales.
Le chœur, assuré et musicalement très homogène pour ce qui est des voix féminines, semble en revanche moins solide et manquant parfois de volume dans les tessitures plus basses des voix masculines, mais la musicalité et la précision de l’ensemble sont constantes.
Les deux solistes, la soprano Heather Newhouse et la mezzo-soprano Anthéa Pichanick, apportent une contribution de belle facture. La première déploie une voix homogène et ronde, la seconde, plus sonore, dévoile un timbre capiteux et une personnalité affirmée.
Dans la Cantate de Noël de Scarlatti, les effets d’échos entre voix et instruments sont particulièrement réussis – le compositeur innove en donnant aux instruments à vent une place qui fait d’eux des partenaires des cordes et des voix.
Le Gloria de Vivaldi est exécuté avec bonheur, malgré une certaine fragilité de la trompette mise à rude épreuve, et exprime toute l’allégresse de Noël. Les voix se mettent au service de ce lyrisme d’ensemble dans lequel se détachent les ornements. La direction de Franck-Emmanuel Comte donne toute la vivacité requise à ces morceaux de circonstance qui conservent leur dimension intemporelle. En même temps, l’interprétation des chœurs et des solistes fait ressortir la dimension opératique de l’écriture musicale : la mise en valeur de certains mots par des mélismes, les vocalises de l’allegro Laudamus te, le contraste avec l’adagio Gratias agimus tibi. Le fugato de l’allegro Propter magnam gloriam tuam et la grande fugue du dernier allegro (Cum sancto spiritu) sont particulièrement bien traités à cet égard, tandis que la partie de mezzo bénéficie du timbre particulier d’Anthéa Pichanick, illustrant la manière dont Vivaldi a souhaité ici utiliser les ressources du bel canto dans la musique sacrée.