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SCHUBERT, Schwanengesang — Bruxelles (La Monnaie)

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Spectacle
4 octobre 2014
In coda venenum !

Note ForumOpera.com

2

Infos sur l’œuvre

Auf dem Wasser zu singen

Die Mainacht

Ständchen

Klage

Nur wer die Sehnsucht kennt

Nacht und Träume

Schwanengesang

Du bist die Ruh

Wiegenlied

Abschied

Détails

Conception et mise en scène

Roméo Castellucci

Interférences

Scott Gibbons

Dramaturgie

Christian Longchamp

Assistante à la mise en scène

Silvia Costa

Cosutmes

Laura Dondolfi

Sofia Valentini

Kerstin Avemo, soprano

Valérie Dréville, comédienne

Alain Franco, piano

Bruxelles, samedi 4 octobre 2014, Théâtre Royal de la Monnaie

Le récital de lieder est un genre codé qui connaît peu d’évolution et se prête rarement à la fantaisie. Que Roméo Castellucci ait voulu en bousculer un peu le protocole empesé, voilà qui n’étonnera personne. L’affiche annonce un récital mis en scène, la curiosité du spectateur est en éveil.

Sur un plateau entièrement nu et noir, Kerstin Avemo s’avance ; un seul halo de lumière, au centre de la scène, éclaire son visage. Le piano relégué dans la fosse semble extérieur au spectacle. Le premier lied peine à mettre la chanteuse et son pianiste d’accord sur le tempo : de nombreux décalages, un rubato non coordonné compromettent un peu l’entame du concert, mais les choses s’arrangent après Ständchen. La confiance s’établit entre les deux musiciens et, la tension dramatique croissant au fil du déroulement du cycle, un climat intime très propice finit par prévaloir. Klage, Nur wer die Sehnsucht kennt et surtout Nacht und Träume, tout en retenue, sont particulièrement réussis, avec une très belle intensité et un sens du texte remarquable. Les interventions de mises en scène, jusque là réduites au minimum, se font un peu plus présentes. La chanteuses feint un mal de tête, frémit et halète avant d’entamer Du bist die Ruhe, qu’elle chantera dos au public. Toute la fin du récital sera comme une lente disparition, un anéantissement progressif : la chanteuse rejoint petit à petit le fond de scène, les lumières s’estompent. Wiegenlied est murmuré, entendu par bribes comme la berceuse qu’entendrait un enfant qui s’endort à travers les brumes d’un premier sommeil. L’effet est particulièrement réussi et pousse l’auditeur à une attention accrue qui ajoute encore à l’émotion. Abschied sera donné dans une quasi obscurité, comme si la voix venait de l’au-delà, dans une atmosphère de recueillement et d’extrême simplicité qui confine au sublime.

L’interprétation des musiciens n’est pourtant pas particulièrement soignée : Alain Franco paraît peu à l’aise dans son rôle et développe un jeu peu coloré. Il connaît quelques failles techniques au début, puis s’améliore dans les derniers lieder où le rôle du piano est moins présent. Kerstin Avemo connaît une évolution parallèle ; sa voix met quelque temps à s’affirmer, puis la chanteuse finit par trouver le ton juste, même si, ici aussi, les couleurs sont assez peu variées. Son sens du texte, excellent, et sa belle musicalité finissent par emporter l’adhésion, l’infinie beauté des dernières langueurs schubertiennes s’épanouit enfin.

Le récital aurait pu s’arrêter là, et on aurait eu le sentiment d’un travail achevé – certes peu interventionniste mais très réussi – de la part du metteur en scène. Hélas, une comédienne entre sur le plateau : Valérie Dréville vient prendre la place de la chanteuse et répète dans un  allemand aux couleurs parisiennes la dernière strophe du dernier lied. La chanteuse est sortie de scène, le pianiste referme son instrument et quitte la fosse, le public reste quelques instants livré à lui-même. La comédienne entame alors une sorte de chorégraphie mystérieuse puis vocifère, en français cette fois, une série d’invectives particulièrement violentes adressées au public, qui se voit ainsi injurié de la plus abjecte façon dans un climat d’extrême violence particulièrement désagréable. Certains spectateurs outrés quittent la salle, d’autres réagissent et ripostent, répondant à la provocation, et entrent ainsi dans le jeu du metteur en scène. Un haut parleur diffuse des bribes du concert qu’on vient d’entendre, des jeux de lumière simulent un incident technique, la comédienne réapparaît avec un masque, puis s’abîme dans une grande souffrance et finit par s’excuser auprès des spectateurs en tendant les bras vers eux. Tout cet épisode parfaitement superflu et particulièrement dévastateur de la belle intimité créée plus tôt par la musique aura duré une bonne vingtaine de minutes, laissant abasourdis et complètement décontenancé la plus grande partie du public.

N’est-ce pas Talleyrand qui affirmait que tout ce qui est excessif est insignifiant ? Une telle violence n’a rien à voir avec la musique de Schubert ni avec les textes romantiques qui en constituent la trame poétique et qui se trouvent ici complètement dévoyés. Le propos du metteur en scène, dès lors, ne porte pas, n’est pas reçu parce qu’il est exprimé dans un contexte inapproprié devant un public non préparé. C’est l’émotion musicale elle-même qui, avec le public, est ici prise en otage pour servir les interrogations métaphysiques du metteur en scène et assouvir sa soif d’en découdre avec le théâtre, mais en vain.

Souvenons-nous que la Monnaie a placé sa saison sous le signe des sept péchés capitaux : c’est sans doute la colère, mais surtout l’orgueil qui se trouvaient ainsi illustrés.

 

 

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Dramaturgie

Christian Longchamp

Assistante à la mise en scène

Silvia Costa

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Bruxelles, samedi 4 octobre 2014, Théâtre Royal de la Monnaie

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