Cette année, c’est au tour de la Cenerentola de Rossini d’être raccourcie et métamorphosée en « Une Cenerentola » d’1h30 en français afin d’être adaptée au jeune public venu toujours plus nombreux assister à leur tout premier ou l’un de leurs tous premiers opéras. Cette démarche est fabuleuse, à l’instar des initiatives d’autres institutions comme la Philharmonie, car les enfants s’approprient réellement les œuvres qui leur sont ainsi présentées : une chef de chœur remarquable prépare quelques airs qui seront repris en chœur par les enfants pendant le spectacle, impressionnés mais ravis de donner la réplique aux chanteurs. Echauffement, répétitions, livrets, tout est organisé pour que la rencontrer avec l’art lyrique soit un succès.
Les metteurs en scène y ajoutent chaque fois un grain de folie très agréable, proposant des transpositions nécessairement lisibles et toujours très bien rythmées. Cette année, Daniele Menghini a fait le choix de raconter le célèbre conte dans un Grand Hôtel fort onirique, lieu de rencontres par excellence. Les décors et costumes chatoyants, robes rose bonbon, jaune poussin, caleçons longs et chaussettes dans la même gamme chromatique soulignaient, avec quelques gags bien nourris, la dimension pétillante de l’œuvre que la direction d’Alphonse Cemin faisait ressortir à chaque accord.
Une Cenerentola © Vincent Pontet
Sur le plateau, les jeunes chanteurs s’en donnent à cœur joie, fiers de participer à cette transmission nécessaire aux plus jeunes. Vocalement très équilibrée, la distribution contribua largement au succès de ces représentations. Antoine Foulon campe un Alidoro majestueux avec sa voix puissante et bien projetée couplée à une excellente diction à l’instar du Dandini de Sergio Villeglas Galvain, remarquable du début à la fin de la représentation. Impeccable Don Magnifico de Nicolas Brooymans également. Le Don Ramiro de Benoît-Joseph Meier n’est pas en reste et régale son auditoire de piani colorés dans « Si, ritorvarla io giuro ». Les duos de Sara Gouzy et Laurène Paterno qui incarnent les deux horribles sœurs (respectivement Tisbe et Clorinda) sont délectables et aussi ravissants que leurs personnages sont cruels. Quant à Anne-Sophie Vincent, la douceur de son timbre et la pureté de ses aigus font ressortir toutes les facettes de Cenerentola.
Une Cenerentola – Tisbé et Clorinda – © Vincent Pontet
Un régal pour les yeux et les oreilles qui a suscité un vif enthousiasme des jeunes auditeurs, hilares et heureux.
Impossible de conclure ce compte rendu sans remercier chaleureusement le TCE : en quelques années les enfants ont découvert Mozart, Verdi, Rossini et demandent à assister à un opéra de grand, ce qui mérite plus qu’une standing ovation de louanges. Peut-être tient-on ici la seule réponse à l’éternelle question du rajeunissement du public de l’opéra : faire plonger les enfants dans le grand bain le plus tôt possible, de manière intelligente et adaptée, comme avec ces opéras participatifs (tout en développant une pratique instrumentale ou chorale en parallèle).