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PUTS, The Hours — New York

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Spectacle
12 décembre 2022
En direct de New York : Une création spectaculaire pour le retour de Renée Fleming

Note ForumOpera.com

3

Infos sur l’œuvre

Opéra de Kevin Puts

Livret de Greg Pierce d’après le roman de Michael Cunningham et le film de Stephen Daldry

Créé à New-York, au Metropolitan Opera le 22 novembre 2022

Détails

Mise en scène

Phelim McDermott

Décors et costumes

Tom Pye

Lumières

Bruno Poet

Chorégraphie

Annie-B Parson

Clarissa Vaughan

Renée Fleming

Laura Brown

Kelli O’Hara

Virginia Woolf

Joyce DiDonato

Barbara / Mrs Latch

Kathleen Kim

Kitty / Vanessa

Sylvia d’Eramo

Sally

Denyce Graves

Richard

Kyle Ketelsen

Louis

William Burden

Leonard Woolf

Sean Panikkar

Dan Brown

Brandon Cedel

L’homme sous l’arche / Le réceptionniste de l’hôtel

John Holiday

Walter

Tony Stevenson

Richie

Kai Edgar

Nelly

Eve Gigliotti

La saison dernière, le Metropolitan opera avait proposé trois ouvrages contemporains parmi ses spectacles retransmis dans les cinémas. Cette année l’institution poursuit sa politique de renouvellement du répertoire en affichant en première mondiale The Hours de Kevin Puts sur un livret de Greg Pierce, d’après le roman du même nom de Michael Cunningham, lauréat du Prix Pulitzer de la fiction en 1998,  qui a été porté à l’écran par Stephen Daldry en 2002 avec Meryl Streep, Julian Moore et Nicole Kidman. C’est Renée Fleming elle-même qui a convaincu Puts d’en faire un opéra afin d’effectuer son grand retour sur la scène du Met après y avoir fait ses adieux il y a cinq ans dans Le Chevalier à la rose.

Le livret raconte une journée dans la vie de trois femmes à des époques et dans des lieux différents. La première, Virginia Woolf, dont la raison vacille, s’est retirée avec son mari dans la campagne anglaise au cours des années 1920 afin d’achever son roman Mrs Dalloway qui, à travers les décennies, va influencer l’existence des deux autres. La deuxième, Laura Brown, est une femme au foyer enceinte et déprimée dans l’Amérique des années 50. Entre deux tâches ménagères elle essaie de lire le roman de Virginia Woolf. La troisième, Clarissa Vaughan, une brillante éditrice, réside à New-York à la fin des années 90. Elle partage la vie d’une autre femme et s’occupe de son ancien amant atteint du sida, Richard Brown, qui finit par se défenestrer sous ses yeux alors qu’elle essayait d’organiser une réception à l’occasion du prix littéraire qui devait lui être attribué. Clarissa est une sorte de version moderne de Mrs Dalloway dont elle porte le prénom.


© Evan Zimmerman – Met Opera

Sur cette trame, Phelim McDermott a réalisé une mise en scène virtuose dans les décors spectaculaires et ingénieux créés par Tom Py. Sur le plateau, nous voyons simultanément l’intérieur de la maison de Clarissa, la cuisine de Laura et le bureau de Virginia disposés sur des plateformes coulissantes. Les changements de décors à vue permettent de voir aussi l’immeuble délabré de Richard, l’intérieur de son appartement et la chambre d’hôtel où Laura s’enferme pour lire le livre de Virginia Woolf en songeant secrètement au suicide. Périodiquement la scène est envahie par une foule en mouvement – les chœurs – ainsi que par un groupe de danseurs qui exécutent des chorégraphies succintes.

Kevin Puts, dont c’est le quatrième opéra, a composé une partition au lyrisme assumé, attribuant à chacune des héroïnes un style musical qui lui est propre. Pour Virginia, une ambiance intimiste et dépouillée, les notes d’un piano austère accompagné essentiellement par les vents. Pour Laura, un rythme léger de swing qui évoque son époque, enfin pour Clarissa une musique typiquement américaine dans l’esprit de Bernstein ou d’Aaron Copland. L’opéra s’ouvre sur un chœur planant avant que les personnages commencent à s’exprimer dans une sorte de conversation en musique avec par instant de grandes envolées lyriques. On notera l’omniprésence des chœurs qui commentent l’action comme dans une tragédie antique. La partition comporte de nombreux ensembles qui permettent aux personnages de s’exprimer simultanément par-delà le temps et l’espace. Ainsi Laura, dans sa chambre d’hôtel, chante les mots que Virginia écrit dans son bureau en contrebas. Clarissa interprète deux trios, le premier, en compagnie de Richard et de son ex amant Louis, le second, qui conclut l’ouvrage, réunit les trois héroïnes comme à la fin du Chevalier à la rose, un hommage sans doute à l’opéra fétiche de Renée Fleming. Enfin quelques mesures de musique répétitive notamment dans les passages dévolus à Virginia constituent un clin d’œil à Philip Glass qui avait composé la musique du film de Stephen Daldry.


©​ Evan Zimmerman – Met Opera

Le Met, comme à son habitude, a réuni une distribution sans faille. Ainsi, Eve Gigliotti incarne une gouvernante plus vraie que nature et les interventions du contre-ténor au timbre cristallin John Holiday ne manquent pas de poésie. Sean Panikkar et Brandon Cedel campent deux maris aux tempéraments opposés, le premier, attentif et anxieux, couve son épouse Virginia avec des accents de tendresse dans sa voix de ténor, le second, doté d’une voix sombre et solide ne manque pas de bonhommie en mari satisfait, inconscient des tourments qui agitent son épouse. William Burden est pleinement convaincant dans la peau de l’ancien amant de Richard, jaloux de Clarissa. Kyle Ketelsen effectue une composition tout à fait remarquable en écrivain désabusé, rongé par la maladie avec dans la voix des sonorités rauques qui évoquent son mal être. Kathleen Kim incarne avec le même bonheur les deux rôles qui lui sont dévolus. Dans celui de Barbara, chanteuse ratée reconvertie en fleuriste, elle interprète avec Fleming un duo « des fleurs » joliment mis en scène, émaillé de coloratures brillantes dans lesquelles passent furtivement quelques échos de Papagena et de la Reine de la nuit. Le passage des ans ne semble pas affecter la voix de Denyce Graves dont le timbre cuivré fait merveille dans le rôle de Sally, la compagne de Clarissa. Citons également les interventions impeccables de Sylvia d’Eramo en sœur de Virginia et Tony Stevenson en écrivain pressé ainsi que le petit Kai Edgar qui interprète avec aplomb Richard enfant.


©​ Evan Zimmerman – Met Opera

C’est dans cet environnement vocal de haut niveau qu’évoluent les trois protagonistes principales à qui les spectateurs du Met ont réservé un accueil enthousiaste au salut final. Kelli O’Hara, diva des scènes de Broadway, est parfaite en mère au foyer neurasthénique, sorte d’Emma Bovary moderne, qui se réfugie dans la lecture pour oublier sa vie routinière et frustrante. Son allure compassée rappelle les gravures de mode des années 50. Ensemble pastel, coiffure impeccable, elle a quelque chose de Grace Kelly dans Fenêtre sur cour. Sa voix de soprano léger, pauvre en harmoniques, colle parfaitement à son personnage un peu nunuche, qu’elle incarne impeccablement en grande professionnelle. Joyce DiDonato, méconnaissable en brune, le visage sévère, le teint pâle, habillée comme une villageoise des années 20 est une Virginia Woolf époustouflante. Il s’agit là sans doute d’une des meilleures prestations de la mezzo-soprano qui déclame en grande diseuse les divers monologues de l’écrivaine avec une attention particulière aux mots. Vocalement, la cantatrice a paru en grande forme dans une partition qui sollicite essentiellement son medium. Enfin, pour ses retrouvailles avec le public new-yorkais dans un rôle écrit sur mesure pour ses moyens actuels, Renée Fleming, rayonnante dans un élégant ensemble blanc, brûle littéralement les planches. Elle incarne avec conviction tous les affects de ce personnage de maîtresse femme en apparence qui cache une blessure enfouie que la mort de son ancien amant va rouvrir. Le rôle, qui sollicite peu son registre aigu, met en valeur son medium qui n’a presque rien perdu de son moelleux d’antan.


©​ Evan Zimmerman – Met Opera

Yannick Nézet-Seguin dirige avec enthousiasme cette partition luxuriante dont il met en valeur les moindres détails sans pour autant masquer certaines longueurs au cours du premier acte. Signalons pour conclure que le cinéma dans lequel nous assistions à cette retransmission était très bien rempli.

Le samedi 14 janvier 2023, le Metropolitan Opera retransmettra dans les cinémas du réseau Pathé Live, Fedora d’Umberto Giordano avec dans le rôle-titre, Sonya Yoncheva.

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Livret de Greg Pierce d’après le roman de Michael Cunningham et le film de Stephen Daldry

Créé à New-York, au Metropolitan Opera le 22 novembre 2022

Détails

Mise en scène

Phelim McDermott

Décors et costumes

Tom Pye

Lumières

Bruno Poet

Chorégraphie

Annie-B Parson

Clarissa Vaughan

Renée Fleming

Laura Brown

Kelli O’Hara

Virginia Woolf

Joyce DiDonato

Barbara / Mrs Latch

Kathleen Kim

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