Herbert
Wernicke est mort. C'est une nouvelle stupéfiante autant que douloureuse.
Il n'avait après tout que cinquante- six ans.
Je repense aujourd'hui à
certaines de ses productions avec beaucoup d'émotion. Pour un jeune
mélomane il a été en quelque sorte un incontournable,
surtout pour un jeune mélomane Bruxellois vu son très grand
attachement à la Monnaie. L'inventaire est vite fait : il a été
mon premier Orphée aux enfers, ma première Belle- Hélène
mais surtout mon premier Boris, mon premier Pelléas, ma première
Calisto.
L'heure n'est pas au décompte
scrupuleux de ce qu'on trouvait admirable ou agaçant chez ce personnage;
ce serait en revanche lui rendre un bien triste hommage que de louer chacune
de ses productions. Il y avait chez cet homme - comme chez la plupart de
ses collègues terriens - une part de déchet, des moments
de plus faible inspiration.
Très franchement,
au moment où je suis amené à me pencher avec attention
sur cette carrière, comment ne pas être béat d'admiration
face à une production qui aura toujours été marquée
par une lecture scrupuleuse, intellectuelle, littéraire, humoristique
et partisane des oeuvres traitées.
Quel spectateur, présent
au festspielhaus de Salzbourg pour la création au festival de Pâques
de Boris Godounov, sous la direction de Claudio Abbado, quel spectateur
pourra contester la force d'une production dont la moindre scène
est à elle seule un motif de profonde admiration ?
Et il en va de même
pour ce Pelléas d'un esthétisme bouleversant donné
un soir de mars 1999 à la Monnaie où José van Dam
gagna une fois pour toutes ses gallons de Golaud du siècle. Sans
la stimulation d'un travail dramaturgique passionnant, en aurait-il été
de même ? J'en doute.
Mais je reviens à
cet Orphée aux enfers, un de mes premiers coups de coeur lyriques,
qui aura tant déplu en France ! L'opinion publique en Dame Pipi,
un train grandeur nature tombant du ciel, Eurydice en godiche allumée...
ce spectacle n'était certainement pas du meilleur goût, mais
quel spectateur aura l'affront de prétendre qu'il n'aura pas jubilé
tant ce spectacle était bien ficelé ?
Cet article ressemble à
un patchwork d'impressions relativement mal formulées. Que dire
d'intelligent quand on ressent déjà le manque d'un homme
qui rendait cet art passionnant qu'est l'opéra... encore plus passionnant...
et intelligent ?
Rien de plus.
Camille De
Rijck
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l'hommage de Mathilde Bouhon