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PARIS
24/03/2008
Cecilia Bartoli
© EFE
Concert de gala
Cecilia Bartoli, mezzo-soprano
Orchestre Philharmonique de Radio France
Scetlin Roussev, violon solo
Myung-Whun Chung, direction
Vadim Repin, violon
Lang Lang, piano
Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Ouverture de Le Nozze di Figaro K.492
Air « Chi sa, qual sia » K.582
Air « Parto, parto » - Extrait de La Clemenza di Tito K.621
Ouverture de Die Zauberflöte K.620
« Exsultate, jubilate », Motet K.165
Frédéric Chopin (1810-1849)
Andante spianato
et Grande Polonaise brillante en mi bémol majeur op.22
Niccolo Paganini (1782-1840)
La Campanella – Troisième mouvement du Concerto pour violon n°2
Gioacchino Rossini (1792-1868)
Aria del Salice & Preghiera di Desdemona, extrait d’Otello
Ouverture de L’Italiana in Algeri
Cavatine et Cabaletta « Bel raggio lusinghier », extrait de Semiramide
Encore :
« Infelice », scène pour Voix & Violon de Félix Mendelssohn
« Yo son contrabandista », de Manuel Garcia
« Rataplan », de Maria Malibran
Journée exceptionnelle
en hommage à Maria Malibran.
A l’occasion du bicentenaire de sa naissance, le 24 mars 2008.
Salle Pleyel, Paris
Lundi 24 mars 2008 à 20 heures 45
La Folle Journée Malibran, épisode III.
Lire également :
Episode II (La Cenerentola)
Episode I (Le Salon romantique de Maria Malibran)
Maria Malibran
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L’apothéose d’une folle journée…
De l’univers quasi familial de l’après-midi, on est
surpris par le changement radical d’atmosphère pour la
soirée de gala. Evènement peopolisé jusque dans le
grand écart : premier ministre, ministre de
l’économie, les perdants de certaine mairie avoisinante,
l’icône de Des chiffres et des lettres, le redoutable
responsable des albums Pagny et autre jury
« staraquisant », rien ne sera
épargné à notre Cecilia Bartoli…En
attendant vraisemblablement les petits fours, Pleyel sortit
également ses grands plats. L’impressionnant dispositif de
l’orchestre de Radio France ainsi que le matériel
nécessaire à France Musique pour immortaliser
l’apothéose de cette folle journée que
n’aurait pas renié Beaumarchais et les siens. Juste le
temps pour nous de saluer sa maman et Cecilia fraîche comme une
rose, s’élance sur la scène … Rayonnante,
gourmande de chant et de musique.. Cela dépasse tout bonnement
l’entendement…
La première partie du concert sera intégralement consacrée à Mozart et à Bartoli donc.
Imposant un très beau recueillement à l’auditoire
et grâce au contrôle sonore de l’orchestre par Chung
(saluons au moins cela…), Bartoli va encore une fois nous
surprendre par ses qualités d’instrumentiste au sein des
pièces de Mozart qu’elle affectionne tant.
L’air de Sesto est une nouvelle occasion de démontrer sa
paradoxale supériorité au moyen d’une lecture de la
partition scrupuleusement parfaite mais tellement humaine.
Le motet « Exsultate, jubilate » sera le terrain
de jeu d’une enfant dans toute sa ferveur, remarquable partie
lente à fleur de lèvre et d’émotion.
Chung apprécie et travaille de longue date avec Bartoli. On
comprend dès lors sa présence. Nous avouons être
restés assez hermétiques à ses propositions. A la
limite du pompeux en place d’une solennité pour
l’ouverture de la Flûte et une telle phalange
était-elle nécessaire pour ce programme, s’il est
indispensable de la réduire au silence la moitié du
programme par souci d’équilibre ? Le Maestro
retrouvera une partie de ses marques pour le début de la
deuxième partie, notamment avec les solistes instrumentaux.
Naturellement, tout son travail se trouve à un incroyable niveau
technique mais que faire d’une Rolls si l’on a un grand
prix de formule 1 à courir ?
Ovation supplémentaire pour Lang Lang et sa Grande Polonaise,
ovation amplement méritée même si nous le
préférons dans l’intimité d’un
discours moins brillant (cf. le programme du matin…) et
décidément, cela n’était pas notre jour avec
les prestations de Vadim Repin qui nous offrit une Campanella
rondement menée. Très subjectivement, je pense
qu’il s’agit de notre sensibilité qui une fois
encore, préfère un jeu, peut-être moins parfait
techniquement mais plus immédiatement viscéral..
Néanmoins, techniquement et musicalement, on se trouve avec nos
deux solistes à un niveau stratosphérique de
qualité…
On oubliera très vite la vision – assez particulière – de Chung dans l’ouverture de L’Italianà in Algeri,
confondant d’incompatibilité d’humeur, des divorces
ont été prononcé pour moins que cela.
Bartoli retrouve le serio
rossinien et bien entendu, elle devait chanter Desdemona ce soir. Elle
le fit comme chante une fauvette blessée. Très grand
moment de chant et de théâtre, à vous donner des
idées pour une intégrale… Elle y déploie
son sens du mot, du récit, de la nuance et du murmure dans
lequel elle finit et n’en sortira qu’au bout d’un
long moment, libérée par le public. En parfaite
belcantiste, elle offre immédiatement le change avec une
Semiramide beaucoup plus extérieure de panache, de joie et
d’amour exprimé. Grande cabaletta où elle laisse
s’exprimer de nouvelles folies. Folie contagieuse, à en
juger par la réaction débraillée du public en
délire.
On estime que la messe est dite, nombre de grands-mères aux
cheveux bleus rassemblant fourrures et autre pelisse. Que nenni !
Cela est bien mal connaître LA Bartoli ! Après
quelques saluts, la voilà qui réapparaît avec Repin
afin de nous offrir un des bijoux de son dernier disque, la superbe
scène « Infelice » où en un
instant, elle retrouve un calme olympien et un phrasé intact,
souverain de soutien après l’excitation des minutes de
rappels. Du très grand art ! Cette scène au
delà de ses qualités musicales, témoigne pour nous
de la passion qui unissait Malibran au violoniste belge de
Bériot… Nouvelle valse des rappels et Cecilia annonce de
sa voix fluette « une surprise »…
Entrée de son groupe de guitaristes Manouches et nouveaux cris
tumultueux dans la salle. Elle incendie Pleyel avec les rythmes de
« Yo son contrabandista ». Enfin, après de
nombreuses minutes de rappels, à tout seigneur, tout honneur, un
dernier Rataplan de la
Malibran pour clôturer ce que fut cette journée, un
véritable hommage à Madame Malibran…
Il est 23.15 bien frappé, Cecilia ne pourra
s’échapper qu’après une série
incroyable d’ovations… Elle aura passé près
de 7 heures en scène aujourd’hui. Elle avait promis la
journée Malibran, elle l’a fait !
Philippe PONTHIR
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