Les bonnes raisons d'assister à
ce Benvenuto Cellini proposé par la Maison de Radio France
ne manquaient pas : bicentenaire de la naissance du grand Hector, rareté
de l'oeuvre, affiche éblouissante, enregistrement du concert par
EMI/Virgin Classics afin d'offrir aux discophiles une alternative à
la version de Colin Davis... Hélas, à l'arrivée, la
salle n'est qu'aux trois quarts remplie. A qui la faute ? A Berlioz qui,
deux cent ans après, n'est toujours pas prophète en son pays
? A l'oeuvre qui n'a jamais réellement trouvé son style et
qui, à force d'hésiter entre comédie et tragédie,
se perd parfois dans des longueurs (le dernier acte surtout) ? A la mise
à pied de Roberto Alagna, dont la prise de rôle était
très attendue, remplacé au dernier moment par Gregory Kunde
?
Mystère. Mais, une fois de
plus, les absents ont eu tort car la soirée méritait largement
le détour dans ce recoin ouest de la capitale.
La première bonne surprise s'appelle
justement Gregory Kunde. Le ténor dont, dernièrement, au
Châtelet, l'Enée fut mis plus d'une fois en péril,
porte mieux la cape du sculpteur florentin que celle du prince troyen.
Le rôle n'est pas moins écrasant pourtant mais l'acteur s'y
retrouve mieux. Le timbre semble moins ingrat. La prononciation du français
est toujours satisfaisante. Les passages les plus techniques sont négociés
avec succès. Le critique, tel Fieramosca, rend les armes. Il faut
avouer que la dimension de la salle Olivier Messiaen, de taille plus humaine,
lui donne un sérieux coup de pouce. Chapeau bas tout de même.
Sa Térésa a également
un petit format vocal. Patrizia Ciofi n'est pas une grande voix en termes
de puissance, mais, sa Lucie au Châtelet nous l'avait déjà
démontré, elle est une grande actrice, une bonne technicienne
et le français ne lui pose pas de problème. Dans ces conditions,
elle s'empare aisément de notre coeur en même temps que de
celui de Cellini.
Le Fieramosca très expressif
de Jean-François Lapointe complète idéalement le duo.
A leurs côtés, Laurent Naouri maîtrise vocalement le
rôle moins flatteur de Balducci, mais curieusement, le comédien
nous a semblé bien sérieux. Le gros barbon mérite
un autre traitement.
Le meilleur pour la fin, du moins à
l'applaudimètre : Joyce di Donato, en spécialiste des grands
rôles rossiniens, ne fait qu'une bouchée d'Ascanio et triomphe
dans le grand air du troisième acte.
John Nelson est à son aise dans
Berlioz. On le voit, on l'entend. L'orchestre, les choeurs sont portés
et tenus à bout de bras. Mission accomplie. Le finale du deuxième
acte se transforme en une formidable cathédrale sonore. Les spectateurs
des premiers rangs ont d'ailleurs dû y laisser un bout de leur tympan.
Indéniablement donc, les absents
ont toujours tort. Il leur reste toutefois un lot de consolation : le disque
qui devrait sortir très prochainement.
Christophe RIZOUD
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