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PARIS
14/09/2007
© DR
Richard STRAUSS
CAPRICCIO
La Comtesse : Solveig Kringelborn
Le Comte : Olaf Bär
Flamand : Charles Workman
Olivier : Tassis Christoyannis
La Roche : Jan-Hendrik Rootering
Clairon : Doris Soffel
Une Chanteuse italienne : Elena Tsallagova
Un Ténor italien : Juan Francisco Gatell
Monsieur Taupe : Robert Tear
Le Majordome : Jérôme Varnier
Serviteurs : Jason Bridges, Igor Gnidii, Mihajlo Arsenski, Etienne
Dupuis, Bartlomiej Misiuda, Johannes Weiss, Vincent Delhoume, Mark
Richardson
Une Danseuse : Laura Hecquet
Orchestre de l’Opéra national de Paris, dir. Hartmut Haenchen
Mise en scène : Robert Carsen
Décors : Michael Levine
Costumes : Anthony Powell
Lumières : Robert Carsen, Peter Van Praet
Dramaturgie : Ian Burton
Chorégraphie : Jean-Guillaume Bart
Vendredi 14 septembre 2007
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Vertige des Abymes
Reprise du merveilleux spectacle créé pour Renée Fleming en fin de saison 2003-2004, ce Capriccio nous revient avec une distribution très largement remaniée (sauf erreur de notre part, seul le Monsieur Taupe de Robert Tear
a survécu !). Malgré des critiques émises
alors sur le manque d’intimité de cette mise en
scène, ce qui était alors pour certains un repoussoir
absolu dans cette œuvre qui demande à rester toujours dans
un cadre de la conversation et du demi-mot, force est de constater que
le rendu visuel est non seulement remarquable d’intelligence,
mais tout simplement – pardonnez notre naïveté de
spectateur – d’une beauté sidérante. Sans
doute épurée par rapport à la création,
cette mise en scène joue, comme il se doit, des innombrables
mises en abyme dont Richard Strauss et Clemens Krauss se sont
régalé, et que Carsen nous rend avec un bonheur palpable.
Deux exemples seulement : le jeu réalisé avec le
célèbre rideau de scène peint du Palais Garnier,
qui laisse découvrir, au fur et à mesure qu’il se
lève sur la dernière scène, un
« double » exact quelques mètres plus en
arrière, comme le « faux » foyer de la
danse dans lequel se meut l’héroïne laissera place au
vrai foyer, en fond de scène, à la toute fin de
l’ouvrage. Virtuosité vaine ? Pur jeu
technique ? Pas du tout, car c’est ici à
l’émotion que touche Robert Carsen.
On ne s’étendra pas davantage sur des dispositifs
scénographiques qui tentent, autant que faire se peut, de jouer
avec l’espace pour faire oublier que nous ne sommes
décidément pas dans un salon clos et douillet. Et la
gageure est relevée avec un réel bonheur.
Côté distribution, le bonheur, avouons-le, est moindre.
Certes, le souvenir de l’équipe de la création ne
rendait pas la tâche aisée. Charles Workman et Olaf
Bär, respectivement Flamand et le Comte, s’en sortent avec
les plus grands honneurs, vocalement et scéniquement parfaits.
Le rôle plus ingrat d’Olivier laisse toutefois entendre
chez le baryton grec Tassis Christoyannis
un matériau vocal d’une grande richesse, qui ne demande
qu’à s’exprimer dans une tessiture moins basse.
Passons sur le La Roche de Rootering (au volume sonore inversement proportionnel à son empâtement physique) et sur la Clairon bien vinaigrée de Doris Soffel… Les seconds rôles sont, eux, excellents, avec une mention spéciale pour la Chanteuse italienne d’Elena Tsallagova, dont la présence physique s’accorde à l’impact vocal. Un nom à suivre. La Comtesse de Solveig Kringelborn,
quant à elle, ne démérite pas, mais laisse
malheureusement un sentiment d’inabouti. La voix est pourtant
fort belle, mais la composition du personnage semblera un rien trop
fabriquée (mais n’est-ce pas là une volonté
de mise en scène, car c’est un caractère que
l’on avait déjà ressenti chez Renée
Fleming ?). Comtesse peut-être trop solide, chez laquelle on
attendrait un peu plus d’alanguissement… Mais
n’est-ce pas là, peut-être, une vision fort juste de
ce personnage ? Hartmut Haenchen,
dans la fosse, s’en donne à cœur joie,
débordant plus d’une fois les nuances dynamiques que
Strauss jugeait indispensables à la bonne compréhension
de ses chanteurs/diseurs, mais quelle vie, et quelles couleurs !
Lui, en tout cas, semble avoir moins de doutes que la Comtesse :
c’est la musique qu’il a choisi de mettre au premier plan.
Nous ne nous en plaindrons pas.
David FOURNIER
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