C O N C E R T S 
 
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COMPIEGNE
10/04/05
 
Matthieu Lecroart
Armand Arapian
Bruno Comparetti
CHARLES VI

Opéra en 5 actes de Fromental HALEVY
Livret de Germain et Casimir Delavigne
Créé à l'Académie royale de musique, le 15 mars 1843

Mise en scène et scénographie : Pierre JOURDAN
Costumes : Jean-Pierre CAPEYRON
Lumières : Thierry ALEXANDRE

Charles VI : Armand ARAPIAN
Isabeau de Bavière : Isabelle PHILIPPE
Odette : Anne-Sophie SCHMIDT
Le Dauphin : Bruno COMPARETTI
Le Duc de Bedford : Armando NOGUERA
Raymond : Matthieu LECROART
Lionel, Gontran : Mathias VIDAL
Ludger, l'homme de la forêt, Dunois : Eric SALHA
Louis d'Orléans, Tanneguy : Pierrick BOISSEAU
Marcel, l'étudiant, Jean sans Peur, Lahire : Jean-Loup PAGESY
Clisson, Xaintrailles : Stéphane MALBEC GARCIA 
Orchestre Français Albéric Magnard
Choeur Orfeon Pamplones

Direction musicale : Miquel ORTEGA

Dimanche 10 avril 2005
Théâtre impérial de Compiègne

[ Lire également la critique de Brigitte CORMIER ]

C'est dans l'excitation que nous avons assisté à la résurrection de Charles VI, grand opéra historique en cinq actes de Fromental Halévy, créé à l'Opéra de Paris au mois de mars 1843 et disparu des scènes depuis un siècle. Une fois de plus, il a fallu le courage et la passion de Pierre Jourdan pour redonner vie à l'un des fleurons du genre musical qui fit les grandes heures de l'Académie royale de musique, infligeant une sévère leçon à ceux qui traitent ce répertoire avec condescendance, voire avec mépris, sans même se donner la peine de l'écouter. En effet, cette oeuvre de large dimension (près de quatre heures de musique) témoigne de bout en bout d'une inspiration généreuse et d'une réelle habileté. On s'amuse certes du patriotisme pré-barrésien du livret et de son anglophobie forcenée, mais on sait gré à ses auteurs de ménager nombre de situations propices à l'expressivité du chant et de soumettre à l'inspiration du compositeur de véritables scènes de genre : celle de la folie du roi à l'acte 2, ou l'apparition des spectres à l'acte 4. Conformément aux usages de l'époque, la vérité historique est copieusement maltraitée, mais on remarque ici, ce qui est plus inhabituel, le peu de place laissé à l'épanouissement d'une passion amoureuse. 

Ne disposant bien évidemment pas des moyens fastueux déployés par l'Opéra de Paris pour la création de l'ouvrage, Pierre Jourdan a opté pour une présentation dépouillée. En l'absence de décors et avec des costumes minimalistes, ce sont des projections de gravures qui ont la charge d'évoquer le cadre historique. Le choeur intervient de manière statique, mais les solistes sont solidement dirigés, l'action et les situations restant toujours lisibles. La solution adoptée a le mérite de nous offrir à moindre coût la possibilité de jauger le potentiel dramatique de l'ouvrage, et c'est déjà fort appréciable. Notre attention est de toute façon entièrement tournée vers la partition qui révèle une inspiration mélodique assez constante, une réelle maîtrise de l'écriture d'ensembles et quelques heureux détails d'instrumentation.

La méforme vocale d'Armand Arapian ne peut nous faire oublier sa formidable composition d'un monarque livré à sa folie et qui ne trouve l'apaisement qu'auprès de la jeune Odette. Celle-ci est chantée par Anne-Sophie Schmidt qui ne possède pas les graves renommés de la créatrice Rosine Stoltz mais donne néanmoins pleine satisfaction, dans la douceur comme dans l'impétuosité. La jeune Isabelle Philippe aborde le rôle de la reine Isabeau qui culmine au contre-fa, avec une grande virtuosité et fait preuve d'une remarquable musicalité dans son grand air du deuxième acte. Quant au vaillant et très prometteur Bruno Comparetti, il s'empare avec panache de la partie du Dauphin, créée par Duprez, et domine aisément cette tessiture très tendue, émaillée de nombreuses contre-notes.

Les seconds rôles sont eux aussi globalement bien tenus, avec mention pour le baryton basse Matthieu Lécroart. Il faut féliciter tous ces chanteurs qui se sont pleinement investis pour cette représentation unique et ont réalisé un travail stylistique remarquable. Nous savons gré à tous les acteurs de cette production d'avoir respecté une partition qui le mérite incontestablement, aussi pardonnons-nous aisément certaines défaillances de l'orchestre, ainsi que la prononciation parfois exotique des choeurs. L'essentiel est ailleurs : ce Charles VI, comme le Gustave III messin de la saison passée, démontre qu'au delà de la Juive et des grands opéras de Meyerbeer, ce répertoire mérite absolument d'être exploré et promu.
 
 

Vincent DELOGE
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Lire également la critique de Brigitte CORMIER

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