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11 & 14/06/05
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Giuseppe Verdi Opéra en 4 actes
Filippo II : Giacomo Prestia
Chef de Choeur : Jordi Casas Bayer
Teatro Real, Madrid, 11 juin 2005 *****
Chef de Choeur : Ernst Dunshirn
Wiener Staatsoper, Vienne, 14 juin 2005
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LE
ROI D'ESPAGNE TRIOMPHE EN CASTILLE.
Il est toujours intéressant
de comparer deux représentations d'un opéra aussi riche que
Don
Carlo. Les deux théâtres proposaient une production traditionnelle
mais disons tout de suite que Madrid l'emporte sur Vienne en ce qui concerne
les représentations que nous avons pu voir.
Madrid l'emporte haut la main aussi pour l'aspect visuel. La reprise par le Teatro Real de la production de Hugo de Ana (coproduite avec Gênes et Turin) est pleinement justifiée. Certes la mise en scène est plus convenue qu' une production "façon Konwitschny" (cf Don Carlos critiquée ici en octobre). En revanche les yeux se régalent. Hugo de Ana a observé l'Espagne de Philippe II, son architecture, ses costumes. Il a travaillé de longs mois sur le legs artistique du règne de ce monarque. On a rarement vu dans un théâtre d'opéra des costumes aussi raffinés que ceux qu'il a dessinés : soie, taffetas, brocarts. Le spectateur aimerait pouvoir les observer de près, à commencer par les luxueuses chapes des six évêques présidant l'autodafé. Si l'on ajoute à cela des éclairages soignés, certaines scènes deviennent des tableaux du siècle d'or espagnol. On retrouve bien la pompe et le faste du grand opéra. La production de Pizzi paraît plus économique, plus grise, plus austère, elle tire vers Zurbaran. Les choristes sont souvent habillés de gris, de noir, de blanc ; l'étoffe rappelle plus l'habit de moine que l'habit de cour. Une ou deux grilles, avec ou sans crucifix, sont les seuls décors. Il faut attendre l'autodafé pour retrouver une certaine magnificence. L'orchestre du Teatro Real a bien progressé sous la direction de son chef titulaire Lopez Cobos. Sans se hisser au niveau du Philharmoniker il offre une lecture cohérente de l'oeuvre. Les choeurs madrilènes et viennois sont excellents et les directions de Jordan et de Lopez Cobos sont également convaincantes et équilibrées. Côté chant, les voix masculines de Madrid éclipsent celles de Vienne. Certes Walter Fraccaro pourrait adopter un chant plus nuancé et améliorer son phrasé, mais le chant est généreux. Son homologue Johan Botha est parfois couvert par l'orchestre et la voix paraît plus terne. Simon Keenlyside n'a aucun mal à éclipser Georg Tichy en beauté du timbre, en projection et en qualité de jeu. Du duel Paata Burchuladze/Giacomo Prestia l'Italien sort grand vainqueur. La basse georgienne semble prisonnière de défauts d'articulation et son italien est difficile à supporter. Prestia est LA révélation de la soirée : émouvant dans son grand air de l'acte III, superbe de classe et de retenue, il impressionne par des moyens vocaux confondants : aigus percutants, graves sonores : une interprétation modèle. Les deux inquisiteurs manquent de coffre et leur voix sonnent en retrait par rapport à celle de leurs collègues. Vienne a cependant le dessus pour les voix féminines. Miriam Gauci est une Elisabetta parfois couverte par l'orchestre mais au chant bien conduit, au souffle contrôlé, ce qui lui permet quelques beaux piani. Ana Maria Sanchez ne démérite pas mais le souffle est plus court, l'actrice un peu empruntée et les extrêmes de la tessiture la montrent moins à l'aise. La princesse Eboli de Carolyn Sebron cède le pas devant Marianne Cornetti. La mezzo américaine bénéficiait il y a quelques années d'un timbre intéressant propre aux chanteuses noires mais la voix semble de plus en plus fatiguée au cours de la soirée. Le dernier air est emporté de haute lutte contre une voix érodée ; on frôle l'incident. Marianne Cornetti, tout comme sa consoeur, n'est pas agile dans les doubles croches de l'air du voile, mais ses réserves étant faites, la voix est homogène et l'incarnation satisfaisante. Dans la supériorité de
Madrid sur Vienne, pour ce qui est de cette représentation, faut-il
voir un signe historique ou géographique ? Le Prado est à
quelques centaines de mètres du Teatro Real et l'Escorial à
quelques kilomètres...
Valéry FLEURQUIN
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