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AVIGNON
16/03/03

Ewa Podles (Malcom)
Gioacchino Rossini

La donna del lago

Elena : Iano Tamar
Malcolm : Ewa Podles
Uberto : Rockwell Blake
Rodrigo : Harald Quaaden
Douglas : Simone Alberghini

Orchestre lyrique de Région Avignon-Provence
Direction musicale : Alberto Zedda

Mise en scène : Claire Servais
Décors : Dominique Pichou

Opéra-théâtre d'Avignon, 16 mars 2003


L'opéra d'Avignon proposait pour deux représentations une rarissime Donna del lago en coproduction avec l'Opéra Royal de Wallonie, dans une distribution quelque peu renouvelée par rapport aux premiers concerts belges.

La mise en scène de Claire Servais qui parvenait encore à passer à Liège, devient à Avignon carrément indigeste, car la salle est plus petite, et les ridicules en sont d'autant plus grossis qu'ils se déroulent sous le nez des spectateurs. Il est ainsi difficile de ne pas se laisser aller à rire quand on entend distinctement le bruit des "scratchs" lorsque Douglas endosse son armure, ou quand Malcolm s'escrime sur la poire mal dissimulée dans le manche de son poignard pour en faire jaillir le sang.

Claire Servais est une habituée des mises en scène lyriques, elle commet malgré cela une erreur de débutante, en envahissant le dispositif efficace et relativement esthétique conçu par Dominique Pichou, constitué d'un escalier et de panneaux coulissants, d'objets incongrus autant qu'inutiles : des épées descendent des cintres et restent suspendues en l'air pendant le duel, de grossiers mannequins de plastique décapités et couverts de peinture rouge gisant près d'un cheval éventré également en plastique figurent les morts de la bataille, un photomaton de Rossini semble faire un clin d'oeil à la fin du premier acte. Et j'en oublie dans ce festival kitsch...

Obnubilée par ces gadgets, la metteuse en scène en néglige la direction d'acteur. Les protagonistes sont plantés là, sans un mouvement, les choeurs sont disposés en rang d'oignons. 

Les costumes de Jean-Pierre Capeyron sont, en revanche, seyants, alors qu'il est si difficile de ne pas tomber dans le ridicule dès qu'il s'agit de kilts.

Vocalement, c'est la fête, une fête amplifiée par l'enthousiasme du public avignonnais, qui applaudit, acclame, tape des pieds...un véritable triomphe est fait aux interprètes, et tout particulièrement à Rockwell Blake et à Ewa Podles.

L'usure de la voix du ténor rossinien absolu commence à s'entendre, il le sait et redouble de précautions. Cela dit, il a bien plus que de beaux restes, son souffle est inépuisable, sa technique toujours sans défaut, et la comparaison avec Harald Quaaden est cruelle lorsque dans l'acte deux les ténors se répondent en écho. Et encore, Rockwell Blake, magnanime, ne force pas le trait : après son grand air, il ne lui reste plus rien à prouver.

On connaissait par ses différents récitals au disque le Malcolm d'Ewa Podles. Qu'il suffise de dire que sa prestation scénique fut encore largement supérieure. Le timbre est splendide, l'engagement farouche, la vocalisation précise. Le public ne s'y est pas trompé, qui lui a réservé, debout, plusieurs minutes d'ovation après son deuxième air. Une très grande, comme on en rencontre peu dans une vie de mélomane.

Le rôle de la douce Elena convient mal à Iano Tamar, à la fois vocalement et psychologiquement. Cette Médée, cette lady Macbeth est gênée aux entournures par le caractère émouvant de son personnage, et son beau timbre sombre et sauvage s'accommode mal des duos d'amour et des explosions de joie de la poétique dame du lac. Son interprétation s'en ressent, propre, correcte, mais sans flamme.

Simone Alberghini, bien connu des habitués du festival de Pesaro et coutumier des rôles de basses rossiniennes, est un Douglas bien chantant. Par charité, nous ne parlerons en revanche pas de Harald Quaaden qui a eu le mérite de sauver la représentation en remplaçant Bruce Fowler, lui-même appelé à la rescousse après la défection de John Osborn.

Pour terminer, ayons une pensée émue pour Alberto Zedda, que l'on dit perfectionniste, et qui, s'il a su tirer le meilleur de l'orchestre lyrique de Région Avignon-Provence, s'est trouvé affublé d'un orchestre de coulisses évoquant irrémédiablement la fanfare de La Belle Hélène, réussissant l'exploit de ne pas jouer une seule note juste !
 
 

Catherine Scholler
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