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PARIS
08/12/2006
© DR
Concert Ben HEPPNER
Richard Wagner (1813 – 1883)
Tannhäuser
Ouverture (version de Dresde)
Lohengrin
de "In fernem Land" à "Ich bin Lohengrin gennant" (acte 3)
de "Mein lieber Schwan" à "Leb wohl! Leb wohl!" (acte 3)
Parsifal
Prélude
"Nur eine Waffe taugt" (acte 3)
Entracte
Tristan et Isolde
Prélude de l'acte 1
de "Dünk dich das ?" à "Wann wird es Ruh im Haus?" (acte 3)
de "Isolde kommt !" à "Verflucht, wer dich gebraut!" (acte 3)
Bis
" Mein Freund! In holder Jugendzeit"
(Die Meistersinger von Nürnberg, acte 3)
Orchestre Philharmonique de Radio France
Myung-Whun Chung : direction
Salle Pleyel, Paris, le 8 décembre 2006, 20 heures
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Rebelote !
Boulette (1) ou pas, quel bonheur ! Ben Heppner, trois semaines après avoir interprété Siegfried et Siegmund au Théâtre des Champs Elysées,
accroche aux parois blanches de la Salle Pleyel une nouvelle
série de portraits wagnériens sous la baguette attentive
de Myung-Whun Chung.
Le début de ce concert fait craindre de s’être
réjoui trop vite ; l’inquiétude ne provient
pas de l’Orchestre Philharmonique de Radio France -
l’ouverture de Tannhäuser
s’avère d’une redoutable efficacité - mais
plutôt du ténor canadien. Loin des trésors de
robustesse, d’égalité et de vaillance
déployés l’autre soir dans les extraits du Ring,
« In fernem Land » et surtout, « Mein
lieber Schwan » présentent un Lohengrin chancelant,
mis à mal par l’écriture vocale au point de ne
pouvoir éviter l’accident. La sollicitation permanente du
haut-medium et l’utilisation fréquente des notes de
passage lui posent problème. La ligne vacille dangereusement
même si, une fois libéré, l’aigu
éclate avec assurance. A défaut de fermeté, la
clarté du timbre et la délicatesse de la composition
demeurent mais la voix du chevalier du Saint Graal, à mi-chemin
entre le lyrique et le dramatique, est-elle encore celle de Ben
Heppner ?
Avec Parsifal, le chanteur
reprend plus ou moins ses marques. Les tensions subsistent mais le
rôle s’inscrit mieux dans son registre ; la puissance,
indéniable, suffit à passer l’orchestre.
L’impression de fragilité, pour ne pas dire de fatigue,
participe à la rédemption et ajoute à la
leçon d’humanité que délivre le chaste fol.
C’est après l’entracte que ces faiblesses deviennent
vraiment forces, dans un troisième acte de Tristan et Isolde
où l’interprétation, fabuleuse, se nourrit de ses
propres blessures. Les réserves formulées en
d’autres temps sur le manque de pathos ou de noirceur ne tiennent
plus, balayées par l’intense ardeur qui se dégage
de la narration, par la noblesse du phrasé et la richesse des
couleurs. L’expression ne recourt pas aux cris ou au parlando
pour produire son effet ; elle s’impose sans hystérie
avec une justesse bouleversante ;
l’intériorité supplée à
l’héroïsme. On touche alors au mystère
sacré de l’art lyrique, celui qui permet au chant de
devenir reflet de l’âme.
Après une telle performance, le jeune Walther Von Stolzing des Maîtres Chanteurs de Nuremberg, offert en bis,
n’a plus grand-chose à dire. Le ténor y
démontre les mêmes qualités – beauté
du timbre, limpidité - et les mêmes défauts –
tension, raideur - que dans la première partie. Le soupir de
soulagement qu’il pousse à l’issue de l’air
donne la mesure de l’épreuve. Malgré les
applaudissements du public et l’esquisse d’une standing
ovation, il n’y aura pas de deuxième bis. Ce n’est
pas pour rien que Ben Heppner confiait à Christian Merlin (2)
la veille du concert : « Vivre la mort de Tristan est
une véritable psychanalyse » ; apprécions
notre chance d’avoir pu jouer ce soir les Docteur Freud.
Christophe Rizoud
Christian Merlin, dans Le Figaro,
explique la programmation consécutive des deux concerts de Ben
Heppner à Paris par une « boulette » dans
la signature des contrats.
Le Figaro, édition du 7 décembre, conférer la note précédente.
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