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MONTREAL
03/11/2007
Gertrude (Geneviève Després)
Juliette (Maureen O'Flynn) Roméo (Marc Hervieux)
Frère Laurent (Denis Sedov)
Opéra de Montréal 2007 © Yves Renaud
Charles GOUNOD (1818-1893)
ROMÉO ET JULIETTE
Opéra en cinq actes
Livret de Jules Barbier et Michel Carré
d’après la pièce Romeo and Juliet
de William Shakespeare
Direction musicale : Jean-Yves Ossonce
Mise en scène : Michael Cavanagh
Décors : Claude Girard
Costumes : Opéra de Montréal
Éclairages : Guy Simard
Chef de chœur : Claude Webster
Orchestre Métropolitain du Grand Montréal
Chœur de l’Opéra de Montréal
Roméo : Marc Hervieux
Juliette : Maureen O’Flynn
Frère Laurent : Denis Sedov
Mercutio : Alexander Dobson
Stéphano : Sarah Myatt
Capulet : Chad Louwerse
Tybalt : Antoine Bélanger
Gertrude : Geneviève Després
Grégorio :Stephen Hegedus
Benvolio : Bernard Cayouette
Pâris : Pierre-Étienne Bergeron
Le Duc de Véronne : Alexandre Sylvestre
Place des Arts, Salle Wilfrid Pelletier
Montréal, le 3 novembre 2007
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Avec une photo en prime...
La mise en scène de cette production veut actualiser Roméo et Juliette
en situant son déroulement vers le milieu du vingtième
siècle. Il est vrai que l’œuvre a beaucoup vieilli,
ce qui pourrait expliquer le recours à de tels expédients
pour tenter de la rajeunir. Même si on ne peut nier le pouvoir de
séduction de ses mélodies, elle manque de
caractère et peut franchement devenir ennuyeuse à la
longue si une distribution de haut vol ne vient pas lui donner un peu
de lustre. Ce n’est pas le cas ce soir et ce ne sont pas les
vêtements des gens de Vérone qui y changent quelque chose
même si le bal masqué des Capulet au premier acte
reproduit un peu l’atmosphère du quatorzième
siècle. En fait, cette transposition temporelle ne donne pas le
résultat recherché et débouche sur des actions un
peu vaudevillesques : éclairage aux lampes de poche dans le
prologue, prise de photo par Gertrude après la
célébration du mariage au troisième acte,
promenade à bicyclette de Stéphano un peu avant sa
provocation. On n’est pas loin d’un ensemble de
clichés et il ne manque qu’une automobile sur la
scène pour nous plonger en plein dans l’esprit de
l’époque choisie.
Le metteur en scène Michael Cavanagh
nous propose quand même des choses intéressantes. On
retiendra une assez bonne direction d’acteurs, quelques tableaux
visuellement attrayants, des jeux d’ensemble fermement
construits, tel ce déplacement des clans rivaux dans
l’affrontement du troisième acte, des éclairages
particulièrement évocateurs et parfois même
suggestifs et les magnifiques décors déjà
utilisés pour deux productions antérieures de
l’Opéra de Montréal (OdM) et pour celle
d’Opéra Lyra à Ottawa en septembre 2005.
Tout cela ne suffit cependant pas à nous réconcilier avec
une œuvre qui ne possède plus ce pouvoir
d’attraction qui jadis attirait les foules. On ne
s’étonne donc pas que ce soir de première ne fasse
pas salle comble. Plusieurs sièges sont inoccupés et
d’autres le deviendront à la fin de chacun des deux
entractes. Les deux premiers actes, présentés
consécutivement, suffisent d’ailleurs à donner une
idée de ce que sera la soirée et ce n’est
malheureusement pas du côté des principaux protagonistes
qu’il faut en chercher les grands moments.
Roméo (Marc Hervieux) Mercutio (Alexander Dobson) Stéphano (Sarah Myatt)
Opéra de Montréal 2007 © Yves Renaud
Marc Hervieux
ne trouve pas ses marques en Roméo. Un chant tout en force et
des éclats de voix qui seraient plus à leur place dans
certains rôles véristes, révèlent un manque
de nuances particulièrement flagrant surtout dans «Ah
lève-toi soleil». Les «viens paraît» de
la fin souffrent de ces attaques qui surprennent et qui montrent ses
limites pour ce rôle de demi-caractère. Lorsqu’on y
a déjà entendu un Roberto Alagna au sommet de son art, la
comparaison tourne cruellement à son désavantage. Le
timbre doit être solaire alors qu’ici il a tendance
à s’épaissir. Les moyens sont impressionnants, mais
encore faut-il qu’ils soient judicieusement employés ce
qui n’est pas le cas ce soir. De plus son jeu scénique est
peu convaincant. Pourquoi le metteur en scène exige-t-il
qu’il grimpe jusqu’au balcon de Juliette alors que sa
taille ne facilite pas la manœuvre ? Et lorsqu’il enfourche
la rampe pour aboutir sur le balcon on se demande s’il va pouvoir
y arriver.
Avec le physique de l’emploi, Maureen O’Flynn
fait une très belle Juliette, mais sa voix, sans grande
personnalité, n’émeut pas. On applaudit le
scintillement de sa valse au premier acte, mais l’air
«Amour ranime mon courage» manque de sensibilité. On
aimerait un plus grand investissement, une meilleure
caractérisation alors qu’elle se contente de tout chanter
de façon monochrome. Denis Sedov
incarne un frère Laurent sincère tout en étant
drôle par moments tel celui ou il confisque la
«caméra flash» de Gertrude dans le but de remettre
la photo du mariage à Juliette au quatrième acte
lorsqu’il l’encouragera à fuir avec celui
qu’elle aime après son réveil dans la crypte des
Capulet. On souhaite seulement qu’il puisse corriger un vibrato
qui l’afflige, car sa basse ample et bien timbrée est en
parfaite adéquation avec des rôles de ce genre.
Juliette (Maureen O'Flynn)
Opéra de Montréal 2007 © Yves Renaud
Alexander Dobson joue convenablement Mercutio et projette un baryton plein de vaillance sans nous faire oublier la magie qu’un Aaron St. Clair Nicholson
imprimait au personnage dans la production d’Ottawa dont il a
été question plus haut. Nous accordons une mention
spéciale à l’espiègle Stéphano de Sarah Myatt, à l’irrésistible Gertrude de Geneviève Després, au Capulet très actif de Chad Louwerse et au violent Tybalt d’Antoine Bélanger ;
ils apportent fraîcheur ou tension à une
représentation plutôt terne globalement. Les autres
parties sont adéquatement tenues.
Toujours aussi impressionnant, le Chœur de l’OdM
livre une performance très engagée comme il a maintenant
l’habitude de le faire. À la direction, Jean-Yves Ossonce,
de l’Opéra de Tours, met en valeur les détails de
l’orchestration sans jamais sacrifier la structure
d’ensemble d’une pâte sonore limpide. On oublie
rapidement quelques imprécisions chez les cuivres au tout
début du prélude pour plutôt retenir les
sonorités contrastées que le chef tire de sa phalange.
Très tôt, tout rentre effectivement dans l’ordre et
on a droit à une lecture poétique de l’œuvre
avec ses moments diaphanes comme avec d’autres de plus grande
intensité. C’est le travail du chœur et de
l’orchestre qui sauve la soirée de l’ennui
Réal BOUCHER
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