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BLAGNAC
29/03/2008
Les Sacqueboutiers de Toulouse
© Patrice Nin
Claudio Monteverdi
Le Combat de Tancrède
Monteverdi : Il Combattimento di Tancredi e Clorinda
Castello : Sonata sedici, sopra la battaglia, Sonate concertate
Qualiati : Carro di fedelta d’amore, petit opéra donné sur un char
Monteverdi : Tirsi e Clori
Goehr : Paraphrase sur le Combat de Tancrède pour clarinette solo (1969)
Adriana Fernandez (soprano), Juan Sancho, Furio Zanasi (ténor)
Les Sacqueboutiers : Jean-Pierre Canihac, Marie Garnier-Marzullo
(cornets), Daniel Lassalle, Sylvain Delvaux (sacqueboutes), Christine
Payeux (viole et violone), Eduardo Egüez (luth), Yasuko
Uyama-Bouvard (orgue positif)
Chorégraphie et danse : Bruna Gondoni et Marco Bendoni
Samedi 29 mars 2008, Odyssud, Blagnac
concert donné dans le cadre
de la 1ère Rencontre des Musiques anciennes en Midi-Pyrénées
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Un combat à fleurets mouchetés
Le Combat de Tancrède et de Clorinde de Monteverdi avec cornets et sacqueboutes ? L’on frémit devant l’audace hérétique de Jean-Pierre Canihac et de ses Sacqueboutiers
téméraires, fraîchement nominés aux
Victoires de la Musique. Alors même que la partition
spécifie un ensemble de cordes (violon, viola da bracio,
violetta), le chef a décidé d’introduire les
cuivres anciens que son ensemble promeut depuis plus de 30 ans. Avant
que nous allumions un bûcher avec l’aide de quelques
inquisiteurs grincheux, Jean-Pierre Canihac s’est expliqué
sur ses choix interprétatifs lors de la table Ronde
« du Manuscrit au Concert »
précédant le concert, avec sa bonhomie naturelle.
D’abord, l’artiste l’avoue avec une désarmante
simplicité, il en avait envie depuis longtemps, confiant que
« ça devrait rudement bien sonner » avec
des cuivres, d’autant plus que le caractère martial du
madrigal s’y prête tout à fait, pour rehausser les
trois passages guerriers. En outre, les sacqueboutes et cornets sont
des instruments tout à fait contemporains de Monteverdi, et aux
mêmes tessitures. Une transposition, pratique courante à
l’époque où l’on écrivait pour un
pupitre plus que pour un instrument précis, devient alors
aisément envisageable.
Furio Zanasi
© Patrice Nin
Mais au-delà, de la rigueur musicologique, qu’en est-il réellement de ce Combat
renouvelé, pièce à la fois centrale et finale (si
l’on peut dire) de ce concert ? Eh bien… force est de
constater que la présence des sacqueboutes et cornets n’a
absolument pas parue scandaleuse ou incongrue. Au contraire, le choc
attendu n’en était pas un. Car les Sacqueboutiers et les
musiciens du continuo ont
joué avec tendresse et douceur, privilégiant une
sensualité alanguie, ronde et moelleuse au détriment du
sang et des armes. Seul le luthiste a insufflé des accords plus
mordants dans une lecture poétique et assez contemplative. Ce
fut donc un Combat intimiste, mélange d’Ucello et de Raphael pour l’hiératisme archaïsant des mouvements. Furio Zanasi,
rompu au répertoire monteverdien, a malheureusement
montré des signes d’engorgement à la fin du
programme (esquissant même une quinte de toux dès les
applaudissements). Le timbre demeure toujours chaleureux,
l’émission stable et posée, le recitar cantando intelligent et intelligible. Juan Sancho
possède des accents nobles, doublé d’une bonne
projection. Le trille monteverdien n’est pas toujours des plus
précis mais les ensembles sont magnifiques, en particulier dans
le rare Carro di fedelta d’amore de Qualiati. Enfin Adriana Fernandez
a laissé percevoir des aigus dynamiques, et un chant idiomatique
et contrôlé. Ces remarques demeurent valides pour
l’interprétation de Tirsi e Clori qui précédait la Paraphrase sur le Combat de Tancrède
pour clarinette solo de Goehr au sujet de laquelle nous avouons
notre incompétence la plus totale. On regrettera au passage que
la Sonate de Castello, riche de couleurs, manque un peu
d’énergie.
© Patrice Nin
Pour finir il faut ajouter que la représentation de concert
était enrichie par la présence d’un couple de
danseurs, qui permettait par leur chorégraphie
épurée de situer l’action. Cette initiative, bien
qu’un peu déplacée sur le plan scénique (les
évolutions des danseurs distraient l’attention des
chanteurs et des musiciens et l’absence de décor ou
d’éclairage spécifique nuit à la
cohérence des tableaux), s’est avérée utile
afin de rendre l’intrigue compréhensible à un
public ne bénéficiant ni du livret, ni de surtitres. Un
enregistrement du Combat de Tancrède
est prévu par les Sacqueboutiers, dont on espère
qu’il conciliera la beauté des timbres à la
rutilance dont ils avaient fait montre dans leur Musique à la Cour de Kromeriz (Ambroisie).
Viet-Linh NGUYEN
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