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NEW-YORK
11/12/04

Sondra Radvanovsky
www.sondraradvanovsky.com
I VESPRI SICILIANI

Opéra en 5 actes de Giuseppe Verdi

Livret de Eugène Scribe et Charles Duveyrier 
Version italienne d' Eugenio Caimi

Mise en scène : John Dexter,
reprise par Peter McClintock
Décors : Josef Svoboda
Costumes : Jan Skalicky
Eclairages : Wayne Chouinard

Elena : Sondra Radvanovsky
Arrigo : Francisco Casanova
Guido di Monforte : Leo Nucci
Giovanni da Procida : Samuel Ramey
Bethune : Peter Volpe
Vaudemont : Andrew Gangestad
Tebaldo : Eduardo Valdes
Roberto : Sebastian Catana
Danieli : Ronald Naldi
Manfredo : Tony Stevenson
Ninetta : Jane Bunnell

Choeurs et orchestre du Metropolitan Opera de New York
Direction : Frédéric Chaslin

New York, le 11 décembre 2004 (matinée)



Créée en 1974 avec Montserrat Caballé, Nicolai Gedda, Sherrill Milnes et Justino Diaz, la présente production des Vespri Siciliani n'avait plus été vue au Metropolitan depuis 1982 (1). 

La mise en scène minimaliste de John Dexter n'a pas pris une ride : un immense escalier tel qu'on en voit dans les villes de Sicile, à la couleur noire près (2), auquel vient s'ajouter, suivant les scènes, des éléments complémentaires symbolisant les lieux de l'action (tour, grille, etc.). Bref, on dirait la récente production de Serban pour Bastille, mais en négatif. 

Les Siciliens sont en noir ; les Français en bleu ; les costumes vaguement moyenâgeux.
Le spectacle vaut surtout pour une utilisation très étudié d'éclairages qui sont le véritable moteur de la mise en scène.

Sans atteindre les sommets des distributions précitées, les chanteurs de cette nouvelle édition sont loin de démériter.

Entendue à Bastille en 2003 dans la version française, Sondra Radvanovsky est encore plus à l'aise qu'à Paris (on n'avait d'ailleurs pu remarquer à cette occasion qu'elle progressait au fil des représentations). Les problèmes de justesse semblent résolus, la chanteuse sait faire preuve de nuances et varie les colorations. Ajoutez à cela un formidable contre mi à la fin du boléro et vous obtenez une salle en délire.

Francisco Casanova avait, lui aussi, interprété la version française, mais en concert à Amsterdam. Cet artiste, au français excellent, se révèle encore meilleur dans la version italienne du rôle. La voix a gagné en volume, elle est également mieux projetée, certaines outrances véristes entendues hier sont totalement gommées. Quant à la tessiture, elle ne lui pose aucun problème (on regrette au passage la coupure de sa courte strette qui suit le Boléro : il aurait été intéressant de voir comment le chanteur gère le contre ré final). Stylistiquement, certains accents font carrément penser à l'art d'un Bergonzi.

C'est également à Bergonzi que l'on pense quant à la tenue de scène. Le chanteur italien était passé maître dans l'art de faire passer les trains, bras gauche écarté, main droite sur le rognon. Avec Casanova, on fait même plus fort : le chanteur enlevant rarement les mains de ses poches et ne tournant pratiquement jamais la tête, on pense à Danny de Vito dans le Pingouin de Batman.

A l'ère des "chanteurs-qui-ont-le-physique-du-rôle", Casanova part avec un handicap certain : comment expliquer sinon pourquoi cet artiste ne mène pas la carrière internationale qu'il mérite ?

Le vibrato de Samuel Ramey atteint maintenant de telles proportions que le Metropolitan envisage d'interdire l'accès aux épileptiques. Fort heureusement, après un air d'entrée qui donnerait le mal de mer aux coeurs les mieux accrochés, la voix finit par se stabiliser et l'artiste s'en tire grâce à sa prestance et à sa musicalité. Un conseil : chauffer la voix une heure de plus.

Leo Nucci est la seule raison qui justifie cette reprise en italien. Malgré son âge, ce chanteur reste un sommet de bel canto et d'intelligence, sensible au mot comme à la beauté de la ligne de chant.

Au-delà des performances individuelles, il faut signaler des ensembles, et en particulier des duos, absolument miraculeux. Chanter magnifiquement, c'est une chose. Le faire à plusieurs, ça n'arrive pas tous les jours. De ce point de vue là surtout, il faut saluer le travail des quatre principaux protagonistes.

Glissons sur les seconds rôles, très corrects comme souvent au Met : ils n'ont franchement pas grand chose à dire dans cet ouvrage.

La direction de Frédéric Chaslin : des tempi nerveux, une vraie urgence dramatique, couplés à une véritable attention envers les chanteurs dont il accompagne les acrobaties vocales avec un dévouement digne de Richard Bonynge. Dans l'hypothèse assez improbable d'une reprise de la production de Bastille, espérons que Paris pensera à lui ; mais les bons chefs français sont rarement prophètes en leur Opéra National (3).
 

Placido Carrerotti

1. Parmi les artistes qui ont été entendus dans cette production (vue également à Hambourg et Paris sous Liebermann), on peut citer en vrac : Domingo, Gedda, Bonisolli, Caballé, Arroyo, Deutekom, Scotto, Milnes, Raimondi, Soyer, Diaz et Plishka.

2. A noter, néanmoins, qu'on chercherait en vain ces typiques ruelles dans Palerme même.

3. Stéphane Denève a claqué la porte la saison passée ; Patrick Fournillier, pourtant dévoué serviteur du répertoire français, n'y a jamais mis les pieds mais il dirige régulièrement en Italie ; Emmanuel Vuillaume conduit Domingo, mais à Washington ; Manuel Rosenthal eut juste le temps de voir son nom dans le programme de Bastille avant que Padmavati ne soit annulé ; et ne parlons même pas de Michel Plasson !

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