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Ludwig van Beethoven (1770-1827)

Fidelio

René Kollo Florestan
Gundula Janowitz Leonore
Hans Helm Don Fernando
Hans Sotin Don Pizarro
Manfred Jungwirth Rocco
Lucia Popp Marzelline
Adolf Dallapozza Jaquino
Karl Terkal Erster Gefangener
Alfred Sramek Zweiter Gefangener

Chor und Orchester der Wiener Staatsoper
Leonard Bernstein

Otto Schenk, mise en scène
Günther Schneider-Siemssen, décors
Leo Bei, costumes

Durée : 147 min
Enregistré le 29 janvier 1978 au Wiener Staatsoper
1 DVD DGG 044007341599


Fidelio maestoso


Serions-nous (devenu) passéiste ? Après avoir dédaigné successivement deux récentes productions de la Finta giardiniera, ce n'est pas sans un certain plaisir que nous retrouvons ce Fidelio viennois (dont la bande-son a depuis longtemps été diffusée par DG) auquel nous n'accordions jusqu'ici qu'une oreille distraite.

On avait oublié combien il pouvait être réconfortant de voir un spectacle de bout en bout prévisible et de bout en bout à la mesure de nos attentes. Pas de relecture faussement révolutionnaire, pas de second degré douteux : Otto Schenk est avant tout soucieux d'efficacité et de lisibilité, et ne s'embarrasse de rien d'autre que du livret. Et pourtant, avions-nous jamais mesuré à ce point l'humanité et surtout l'humanisme de l'opéra de Beethoven ?

Dans des décors jamais lourds ni surchargés (et dont la scène finale, éclairée à la manière d'une toile du Lorrain, aurait enchanté Appia), Janowitz toute de dévouement, d'espoirs, de doutes et d'amour conjugal est poussée jusque dans ses retranchements pour incarner une Leonore comme jamais elle n'a incarné de rôle sur scène, furie véhémente face à Pizarro, épouse passionnée aux côtés de Florestan. Lucia Popp est d'une tendresse et d'une douceur quasi in-humaine qui rend presque douloureuse la révélation finale de son amour impossible pour Fidelio. Et René Kollo, qui n'a pas la vaillance d'un Vickers, mais qui fait de Florestan un héros de la résignation et de la foi que n'aurait probablement pas désavoué Kierkegaard. Et Hans Helm, et Manfred Jungwirth, et Hans Sotin... tous semblent portés par une sorte de grâce à laquelle Leonard Bernstein n'est sûrement pas étranger.

On aurait pu d'ailleurs se contenter de filmer le chef tout le long de la représentation, le résultat n'en aurait pas été moins passionnant. Comment imposer un silence, une autorité, une vision avec le moins de gestes possibles. Comment construire un discours musical à partir d'une partition des plus morcelées. Comment rendre chacun des phrasés, des enchaînements, des silences nécessaires et évidents. C'est cela la leçon que nous offre le chef américain. Et c'est aussi cela qui fait les grands artistes : avoir le courage de laisser faire la musique et se « contenter » de la servir.


 
Sévag TACHDJIAN


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