Gustav MAHLER (1860-1911)
Symphonie n° 3 en ré
mineur
Suites de Bach (arrangement
Gustav Mahler)
Riccardo Chailly, direction
Orchestre Royal du Concertgebouw
Petra Lang, mezzo-soprano
Choeur Philharmonique de Prague
Choeurs d'enfants des Pays-Bas
Chef de Choeur : Wilma ten Wolde
2 Super audio CD hybride n°
1 470 653/654
durée totale : 1 h 59
- DECCA 2000/2003
CD 1
1 - Krâftig
- Entschieden. - Yvan Meylemans, trombone
2 - Tempo di minuetto.
Sehr mässig
3 - Comodo. Scherzando.
Ohne Hast. - Frits Damrow, cor de postillon
CD 2
4 - Sehr Langsam.
Misterioso : "O Mensch ! Gib acht !"
5 - Lusitg im tempo
und keck im Ausdruck : "Bimm bamm... Es sungen drei Engel"
6 - Langsam. Ruhevoll.
Empfunden.
Suite de Bach (arr.
Mahler)
Annelie de Man,
clavecin
1 - Ouverture -
Richard Ram, orgue
2 - Rondeau - Badinerie.
- Paul Verhey, flûte
3 - Air
4 - Gavottes 1
et 2
LE POIDS DE L'ACADÉMISME...
Décidément, par les temps qui courent - au disque du moins,
car au concert, Dieu merci, il y a Bernard Haitink - Mahler n'a pas beaucoup
de chance, et en particulier la symphonie n°3, qui est pourtant
une de ses oeuvres majeures...
Il y a quelques mois, en 2003, nous écrivions à propos
de la lecture de Pierre Boulez et
du Philharmonique de Vienne à quel point celle-ci nous avait déçu.
Cette nouvelle version de Riccardo Chailly à la tête d'une
autre phalange célèbre, l'orchestre du Concertgebouw d'Amsterdam,
n'est pas plus convaincante que la précédente, mais pour
des raisons totalement différentes...
Chailly nous donne à entendre, non pas une "cathédrale
de glace", mais un puissant édifice, pompeux, martelé, "grandiose",
qu'on serait tenté de qualifier de "plombé", tellement il
est pesant, académique et, au bout du compte, aussi peu émouvant
que celui érigé par Boulez.
Certes, l'orchestre est somptueux, légèrement moins brillant
peut-être que la phalange viennoise et par nature d'une sonorité
très particulière et reconnaissable, profonde, colorée.
Mais pourquoi, alors, n'utiliser que son côté solennel, empesé
? Pourquoi transformer cette oeuvre bouleversante en un pensum mégalomaniaque
et grandiloquent, en abusant, par exemple, des percussions ? Là
où Boulez élaborait ses structures dans la transparence,
Chailly a tendance à procéder aussi avec rigueur, certes,
mais à grands coups de hache. Boulez était cérébral,
Chailly devient basique, en un mot "brut de décoffrage".
Les choses ne s'arrangent guère avec la soliste, Petra Lang,
dont le timbre chaud et charnu aurait semblé, a priori, plus adéquat
que celui, certes plus clair, de la mezzo suédoise. Hélas,
là où von Otter, désincarnée et comme absente,
livrait, grâce à sa musicalité habituelle et sa voix
lunaire, une interprétation froide, certes, mais de haute tenue,
Petra Lang n'est pas plus habitée et parfois même à
la limite du trivial. Elle aurait même tendance à utiliser
trop de vibrato et à se livrer à des effets comme
le "poitrinage", déplacés ici et qui ne sont finalement pas
plus porteurs d'émotion que le détachement "vonotterien"...
Si l'on ajoute que les choeurs, bons, sans plus, ne semblent pas plus concernés
que la chanteuse, on peut conclure que l'on se trouve là face à
une version bien décevante, elle aussi, et comparativement moins
"respectable", sur le plan musical du moins, que la version Boulez.
Pourtant, il faut avouer qu'au tout début du sublime dernier
mouvement "Langsam. Ruhevoll. Empfunden.", une sorte de miracle semble
se produire. Soudain, Chailly dépose la hache pour empoigner la
lyre de la profonde douleur et l'orchestre, comme las de marteler et de
vociférer, se met enfin à chanter la plainte voulue par Mahler.
Hélas, ce moment de grâce est de courte durée, et les
choses reprennent leur cours chaotique. Dommage...
Enfin, il est toujours intéressant, certes, d'entendre une suite
de Bach orchestrée par Mahler qui, on le sait, vouait à ce
compositeur une véritable dévotion. Mais, somme toute, mis
à part l'intérêt "musicologique" (tout relatif, d'ailleurs,
à notre époque de "rigueur baroque"), l'attrait artistique
est, là aussi, plutôt limité, et un tel choix semble
discutable. Certes, DG était plutôt chiche sur le timing
et Decca se montre plus généreux, peut-être aussi pour
justifier le prix du super audio CD. L'adjonction de quelques lieder
de Mahler, par exemple, aurait été plus judicieuse... La
magnifique version de Bernstein parue chez Sony nous offrait en complément
rien moins que quelques lieder par... Dietrich Fischer-Dieskau.
De là à penser que Decca ait préféré
ajouter la suite de Bach à des Rückert Lieder par Petra
Lang, il n'y a qu'un pas, qu'on peut être tenté de franchir...
Juliette BUCH
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