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Giacomo PUCCINI (1858-1924)
 

EDGAR

"Dramma lirico" en quatre actes de Ferdinando Fontana 
d'après le drame La Coupe et les lèvres d'Alfred de Musset

Composé en 1885-87 et créé le 21 avril 1889 au Teatro alla Scala de Milan 
Première révision, en trois actes, créée au Teatro Comunale de Ferrare, le 2 février 1892
Seconde révision, en trois actes, créée au Teatro Colòn de Buenos Aires, le 8 juillet 1905

Edgar - Carl Tenner, ténor
Fidelia - Julia Varady, soprano
Franck - Dalibor Jenis, baryton 
Gualtiero - Carlo Cigni, basse
Tigrana - Mary Ann McCormick, mezzo-soprano

Maîtrise, Choeur et Orchestre de Radio France
Yoel Levi, direction

Radio France - CD Naïve V4957

Enregistré le 7 décembre 2002 en la Salle Olivier Messiaen de Radio France
Textes de présentation en français et anglais ; 
livret en italien, français et anglais.
Durées : acte I : 33mn.53 ; 
acte II : 29mn.22 (cd1) ; 
acte III : 47mn.18 (cd 2)






Comme Le Villi, Madama Butterfly et La Rondine, Edgar - deuxième des douze opéras de Puccini - existe en plusieurs versions. Ceci laisse à penser que son auteur n'était pas content de l'originale, sentiment que l'on a souvent imputé au livret mélodramatique de Fontana. Le sujet est tiré d'une pièce de Musset, flamboyante de romantisme, avec un personnage principal analysant, de sa sensibilité exacerbée, les contradictions de l'âme humaine. Il est en cela le frère d'autres brigands au coeur (très) tendre comme le Karl Moor de Schiller ou le corsaire de Byron, qui ont, eux aussi, inspiré bien des opéras de Mercadante, de Pacini et de Verdi. 

Alors, d'où vient le malaise ? d'un sujet romantique traité à une époque qui ne l'était plus ? Mascagni ne se tire pourtant pas si mal des fantômes et de la folie masculine sur fond de châteaux écossais dans son Guglielmo Ratcliff, d'après Heinrich Heine. Il faudrait aussi voir ce que Leoncavallo a fait du Chatterton d'Alfred de Vigny et comment Giordano dans sa Regina Diaz réécrivit la donizettienne Maria di Rohan. Évidemment, il existe un contre-exemple : La Bohème ! mais n'oublions pas que la source de Henri Murger (1896) ne date pas non plus de l'époque romantique... Ce n'est pas en vain que l'expression italienne parle de "Ridurre a libretto", car tout texte littéraire doit vraiment être "réduit" pour devenir un livret. La pièce de Musset telle qu'elle est, reflétant (tellement !) son époque, se tient comme l'on dit, mais le livret n'en conserve que les fortes teintes alors que romantisme signifie aussi nuances et couleurs pastel ! Puccini appuie aussi son pinceau, comme son époque, prête à basculer dans la "Giovane Scuola", à la suite de la toute proche Cavalleria rusticana, et il force encore peut-être le trait de l'emphase, sans pour autant trouver toujours l'inspiration. Malgré cela, des pages réellement belles témoignent de son talent - les préludes/interludes, les ensembles concertants - de même que le traitement des choeurs et certains airs. C'est tout de même le Requiem en l'honneur d'Edgar (que l'on croit mort) qui fut choisi pour accompagner Puccini (hélas vraiment défunt) lors de ses funérailles au Duomo de Milan.

Le deuxième enregistrement commercial de l'oeuvre (1977) proposait des trésors : le flot de chaleureuse poésie d'un Carlo Bergonzi, toujours généreux, la poignante humanité d'une Renata Scotto et la direction discrète d'Eve Queler. L'actuel enregistrement de Radio France rappelle déjà qu'une saison lyrique de radio s'intéresse, à juste titre, à des opéras moins donnés et les interprètes sont, d'ailleurs, tous convaincus. A commencer par le Choeur de Radio France, dont l'engagement et la précision frappent, révélant le métier d'un vétéran tel que Norbert Balatsch. 

L'Edgar de Carl Tanner possède une certaine chaleur et se montre vaillant. Julia Varady prête son métier et sa voix pleine à Fidelia, mais il est dommage que ses aigus soient parfois un peu tendus ou même étranglés. Du reste, elle ne peut rivaliser avec l'admirable Renata Scotto qui, notamment dans l'air du troisième acte "Nel villaggio d'Edgar", suit avec une telle ferveur contenue la notation "Con molta semplicità" de Puccini ! Là où Renata Scotto intériorise, Julia Varady soupire, cherche à nuancer, mais se résout à faire dramatique.

La Tigrana de Mary Ann McCormick est l'efficace "mauvais ange" d'Edgar, pulpeuse et vibrante comme il se doit pour le détourner de la pure Fidelia. Dalibor Jenis apporte à Frank la solidité d'un timbre agréable et dépasse le côté "jaloux de service" pour donner au personnage une dimension d'homme réellement amoureux. Carlo Cigni est un beau Gualtiero, le "vieux père noble". Bien préparée par Toni Ramon, la Maîtrise de Radio France tient efficacement sa place. A la tête du très correct Orchestre national de France, Yoel Levi appuie un peu parfois et joue vraiment le jeu du mélodrame au point de frôler parfois la caricature, montrant ainsi sa confiance dans la partition.
 
 

Yonel BULDRINI



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Dans la même collection, en collaboration avec Radio France, voir aussi :
Le Villi de Puccini
Pelléas et Mélisande de Debussy
Ivan IV de Bizet

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