C  R  I  T  I  Q  U  E  S
 
...
[ Historique des critiques CD, DVD]  [ Index des critiques CD, DVD ]
....
......
Robert SCHUMANN (1810-1856)

Lieder Edition 1.

Liederkreis, Op.24
Dichterliebe, Op.48
Der arme Peter, Op.53, N°3
Belsazar, Op.57

Thomas E. Bauer (baryton)
Uta Hielscher (piano)

1 CD NAXOS n° 8.557075 - Publié en 2005
Enregistré les 4 et 6 octobre 2004


 




Dans ce premier volume d'une intégrale des lieder de Schumann en 10 volumes prévue chez Naxos International, c'est le poète Heinrich Heine (1797-1866) qui sert de fil conducteur, ou plus exactement "líâme", puisque l'ensemble du programme est tiré du Livre des Chants (Buch der Lieder).

Une oeuvre considérable du romantisme allemand qui inspira à Robert Schumann ses plus beaux lieder. Si le jeune compositeur les avait lus à dix-huit ans, ce n'est qu'en 1840, alors que son mariage avec Clara est annoncé, qu'il se jette fiévreusement dans la composition de ces cycles. 

La substance psychologique dont relèvent les créations poétiques de Heine nous plonge 
dans une suite de variations sur le regret d'un double amour malheureux. Hormis la musicalité ineffable des poèmes, Heine s'attache à rechercher une langue riche et pure à souhait. Rarement la langue allemande a chanté aussi mélodieusement, affirment certains linguistes. Nietzsche ne s'y est pas trompé en proclamant qu'"on dira un jour que Heine et moi avons été de loin les plus grands artistes de la langue allemande".

De toute évidence, cíest cette quintessence linguistique alliée aux visions, hantises, nostalgies, ardeurs du poète et à son mal d'amour, qui a inspiré à Schumann ses plus bouleversantes pages vocales (comme plus tard avec Eichendorff et Chamisso). On le dit souvent moins inspiré par les textes de Schiller, Goethe et Müller, qui expriment un désespoir existentiel, peut-être parce qu'il entre alors en concurrence directe avec Schubert.

Cet enregistrement présente donc deux chefs-d'oeuvre de la composition romantique, Liederkreis et Dichterliebe, pièces maîtresses de l'ambition artistique de Schumann, par lesquelles il voulait "parvenir à une poétisation de toute la musique", et qui ont fait les beaux soirs des récitals des plus grandes voix. Sans doute, trop díinterprètes exceptionnels s'en sont saisis, dont les disques ont préservé la magie, pour que nous puissions être vraiment enthousiastes à l'écoute du jeune Thomas E.Bauer.

Si l'on en croit Dietrich Fischer-Diskau, le récital de lieder est en voie de disparition, "un monde qui disparaît" et de regretter les "grandes individualités capables de créer ces instants qui restent gravés dans les mémoires au moins quelques minutes" [Le monde de la musique n°299]. Pour les professionnels, les salles se videraient devant ce type de concert, et la formule n'est plus guère retenue dans les saisons musicales. Comment dès lors un jeune, mais encore assez pâle baryton peut-il espérer se faire une place de choix dans des créneaux de programmation exigus où brille déjà la nouvelle génération, les fortes personnalités de Thomas Quasthoff ou Matthias Goerne ?

Car Thomas E.Bauer, au timbre solide et brillant mais sans caractérisation (l'aigu est par instants un peu court), à la fougue certaine et à la technique assurée, cherche encore trop l'effet. Il passe à côté de l'émotion vraie et l'on reste assez éloigné de l'univers sentimental voulu par Schumann et Heine. A sa décharge, son accompagnatrice (Uta Hielscher) ne l'aide guère avec un jeu très individualiste et une frappe parfois brutale.

D'après la photo du livret ces deux interprètes jouissent díun physique avantageux ; ils font peut-être davantage impression sur scène, mais líoreille, elle, juge sans concession.
 
 

Jean VERNE


Commander ce CD sur  Amazon.fr
Schumann%20-%20Bauer" target="_blank">
[ Sommaire de la Revue ] [ haut de page ]