Claudio MONTEVERDI
Il Ritorno
d'Ulisse in Patria
Kresimir Spicer, Ulisse
Marjana Miljanovic, Penelope
Cyril Auvity, Telemaco
Joseph Cornwell, Eumete
Bertrand Bontoux, Antinoo
Andreas Gisler, Antifonomo
Christophe Laporte, Pisandro
Zachary Stains, Eurimaco
Katalin Karolyi, Melanto / Fortuna
Robert Burt, Iro
Geneviève Kaemmerlen,
Ericlea
Rachid Ben Abdeslam, L'Umana
fragilità
Olga Pitarch, Minerva / Amore
Paul-Henri Vila, Nettuno / Il
Tempo
Eric Raffard, Giove
Rebecca Ockenden, Giunone
Les Arts Florissants
William Christie
Adrian Noble, mise en scène
Anthony Ward, décors et
costumes
Jean Kalman, lumières
Sue Lefton, chorégraphies
Festival d'Aix-en-Provence juillet
2002
174 min
(+ bonus : 11 minutes d'interview
de W. Christie)
1 DVD Virgin Classic 7243 4 90612
9 3
Il devait ressembler à ce
Retour
d'Ulysse dans sa Patrie, le spectacle total dont rêvaient les
membres de la Camerata de Bardi, le cénacle florentin dont faisaient
partie Caccini, Strozzi, Cavalieri ou encore Rinuccini. Spectacle de bout
en bout éblouissant dont la réussite revient à Adrian
Noble qui parvient à nous rendre sensible et humain le drame de
Monteverdi, tout en le maintenant dans la sphère mythique et antique
à laquelle le compositeur voulait le rattacher.
Captée lors du Festival d'Aix-en-Provence, au terme d'une tournée
de deux ans, cette représentation fut donnée dans le cadre
idoine du théâtre du Jeu de Paume, qui évoque par ses
dimensions (modestes) et son architecture (italienne) les salles vénitiennes
de l'époque de Monteverdi. Mille détails font que le bonheur
est total et l'émerveillement constant. Dans une Grèce caniculaire
aux couleurs vives et à la lumière méditerranéenne
qui n'est pas sans rappeler quelques toiles de Chirico, les images d'une
beauté plastique rare se succèdent - on pense notamment aux
interventions divines, particulièrement réussites. Aidé
par des chanteurs qui possèdent le physique de leur rôle et
évoluent avec une totale liberté, le metteur en scène
sait être tour à tour virtuose et bouleversant dans sa direction
d'acteurs : la reconnaissance de Télémaque et d'Ulysse reste
assurément le moment de grâce absolu du spectacle. De même,
il peut se montrer tantôt élégant, tantôt vulgaire
dans le traitement des personnages - Ino est à cet égard
d'une délicieuse répugnance. Essence même du dramma
per musica qui tente de saisir l'existence humaine dans sa totalité,
le mélange des genres ne s'est jamais imposé avec une telle
évidence, avec un naturel aussi désarmant.
Il faudrait citer un à un tous les solistes ; on se contentera
du couple royal, tout simplement exceptionnel. Elle, Marijana Mijanovic,
est
Pénélope : grande figure tragique au timbre étourdissant,
voix rauque et matricielle qui porte en elle vingt années d'attente
et de désolation. Lui, Kresimir Spicer, a d'Ulysse la grandeur mythique
: stature impressionnante, voix d'airain qui va du désespoir initial
à la félicité retrouvée et nous étreint
à chacune de ses apparitions... Mais puisque le spectacle parfait
n'existe pas, regrettons l'italien parfois inintelligible de certains protagonistes,
un élément pourtant essentiel dans cette oeuvre qui cherche
en permanence la fusion (voire la réconciliation) du chant et du
verbe.
Les Arts Florissants, attentifs aux chanteurs, tissent un tapis sonore
idéal, varient couleurs et tempi et font que les trois heures
du spectacle passent comme un rêve - bien réel cependant,
heureusement pour nous.
A regarder jusqu'à l'éblouissement.
Sévag TACHDJIAN
Lire également la critique
de la représentation à l'Opéra Comique
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