Pour la fin de la saison 1724-1725, Haendel revient à l’Histoire des Lombards de Paul Diacre, qu’il avait déjà utilisée pour son opéra Flavio en 1723. C’est d’ailleurs au même librettiste, Niccolò Francesco Haym, que le compositeur confie la mission de bâtir un nouveau texte sur cette base et le choix se porte sur le personnage de Rodelinda, à partir d’un autre livret signé Antonio Salvi pour Giacomo Perti 15 ans auparavant ; mais aussi en référence à la pièce de Pierre Corneille, Pertharite, roi des Lombards.
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Haendel termine la partition fin janvier 1725 et comme on ne change pas une équipe qui gagne, il reprend les mêmes chanteurs que pour sa précédente production, Tamerlano. Francesca Cuzzoni tiendra donc le rôle-titre, Senesino, créateur de Giulio Cesare, celui de Bertarido, tandis que Borosini, qui avait créé le rôle de Bajazet dans Tamerlano sera Grimoaldo.
Créé au King’s Theatre de Haymarket à Londres voici juste trois siècles et le lendemain du 40e anniversaire de son auteur, Rodelinda remporte d’emblée un véritable triomphe, clôturant une saison bénie pour Haendel qui fait un triplé avec Giulio Cesare, Tamerlano et Rodelinda en un an à peine. Pourtant, comme Tamerlano, cette partition va disparaître durablement des scènes, jusqu’en 1920 : elle sera cependant le premier des opere serie du maître saxon à renaître, pour ne plus jamais disparaître, même s’il n’est pas encore le plus joué des opéras de Haendel.
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L’intrigue se déroule à Milan au VIIe siècle et plusieurs thèmes s’y entremêlent : le pouvoir, la trahison et la fidélité conjugale
Le roi Bertarido a été exilé par Grimoaldo, qui a usurpé le trône et souhaite épouser Rodelinda, la femme du roi, pour asseoir son propre règne. Rodelinda, croyant son mari mort, refuse les avances de Grimoaldo, ce qui n’empêche pas Eduige, sœur de Bertarido et amante de Grimoaldo, d’être jalouse de Rodelinda, qu’elle va tenter d’éliminer. Bertarido, quant à lui, revient incognito à la cour pour reconquérir son trône et sauver sa femme.
Grimoaldo, amoureux mais qui a de la notion de consentement une vision assez distanciée, tente de forcer Rodelinda à l’épouser. Eduige est furieuse d’être ainsi écartée et accepter d’épouser Garibaldo, un duc ambitieux prêt à tout pour avoir du pouvoir. Il va jusqu’à menacer de tuer Flavio, fils de Rodelinda, si celle-ci ne cède pas aux demandes de Grimoaldo. Rodelinda, furieuse mais acculée, accepte d’épouser le nouveau roi, mais affirme que son premier acte de reine sera de faire exécuter Garibaldo.
Bertarido, qui a compris le piège dans lequel tombe sa femme, se dévoile à Rodelinda par l’intermédiaire d’Unulfo, un fidèle de Bertarido. Mais ils doivent garder le secret, bien qu’Eduige reconnaisse son frère elle aussi. Malheureusement pour eux, ils sont découvert et Grimoaldo décide d’éliminer Bertarido une bonne fois pour toutes et le jette en prison. Unulfo et Eduige – qui s’aperçoit que son frère ne revient pas pour le trône et que Rodelinda n’en veut pas davantage – veulent l’aider à s’évader. Dans la confusion, Bertarido blesse Unulfo, mais parvient à se cacher. Grimoaldo survient, en proie à des sentiments ambivalents et s’endort non loin de la cachette de son rival. Garibaldo essaie d’en profiter pour le tuer, car il aimerait bien prendre sa place, mais Bertarido surgit, le désarme et tue le vilain comploteur. Devant cet acte de bravoure qui l’a sauvé, et voyant que Bertarido a bénéficié de l’aide de Rodelinda, d’Unulfo et même d’Eduige, Grimoaldo décide d’épouser cette dernière et de rendre la couronne de Milan à Bertarido pour partir lui-même comme roi de Pavie.