Les derniers jours du mois de février sont toujours l’occasion pour le cinéphile de s’arracher les cheveux en découvrant, à quelques jours d’intervalle, le palmarès des Césars et celui des Oscars. Lorsque le cinéphile est aussi mélomane, les motifs de mécontentement sont parfois dédoublés : pourquoi se pâmer devant le travail réalisé par Alexandre Desplat pour le « Discours d’un roi » au point de s’insurger quand l’Oscar lui échappe, alors que les plus belles musiques de ce remarquable film sont signées Beethoven et Mozart ? Faut-il s’acharner, au fond, à composer des bandes originales, quand les plus grands compositeurs offrent aux cinéastes les plus inventifs des oeuvres où les atmosphères les plus diverses, les scenarii les plus improbables, les dialogues les plus farfelus et les images les plus fortes peuvent trouver non seulement un mode d’expression, mais plus profondément une authentique illustration, et une vraie raison d’être ? L’utilisation de la musique classique dans le cinéma est un vaste sujet, et les exemples abondent ; au ballet d’hélicoptères orchestré par la Chevauchée des Walkyries dans Apocalypse Now, nous préférons aujourd’hui le cadre plus intimiste de notre cinéma hexagonal. Mozartien devant l’éternel, Claude Chabrol avait su, dans « la Cérémonie », déplacer subtilement les points d’appui dramatiques de « Don Giovanni », utilisant « Deh vieni alla finestra » comme fond sonore d’un meurtre. Mais saurez-vous reconnaître qui murmure ainsi une si carnassière sérénade ? Clément Taillia
—