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Un jour, une création : 26 décembre 1770, peut-on être sérieux quand on a 14 ans ?

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26 décembre 2020
Un jour, une création : 26 décembre 1770, peut-on être sérieux quand on a 14 ans ?

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En décembre 1769, Leopold Mozart entreprend un nouveau voyage avec son fils Wolfgang histoire de remplir les caisses en exhibant le prodige, recette qui avait déjà bien marché durant l’enfance du jeune compositeur. Il choisit pour la première fois de l’emmener en Italie, où ils vont rester tous les deux pendant près de 18 mois. Ce n’est pas par hasard que Mozart père choisit la péninsule : elle reste – et pour longtemps – la terre promise de l’opéra, le genre qui va devenir roi en Europe et qui a émergé à peine plus de 150 ans auparavant. Leopold y voit à la fois l’opportunité d’y faire connaître son fils, qui s’est déjà fait un nom partout, mais aussi de lui permettre d’approfondir sa propre technique lyrique. Le jeune adolescent n’a en effet écrit jusqu’alors deux petits opéras, un en latin pour des chanteurs lycéens (Apollo et Hyacintus) et un en italien (La Finta semplice), ainsi qu’un singspiel en allemand (Bastien und Bastienne). Les bases sont donc là, et Leopold veut que son fils les consolide en Italie.

La première partie du voyage se passe sous les meilleurs auspices. Celui qui est toujours l’enfant prodige qui a étonné l’Europe est accueilli triomphalement en remontant le Pô jusqu’à Milan, où ils arrivent en janvier 1770. Là, ils sont placés sous la protection directe du gouverneur général de Lombardie, le comte von Firmian, ce qui va leur ouvrir bien des portes. Les concerts devant les sommité de la ville se succèdent et, en guise d’entraînement pour la suite, Wolfgang doit mettre en musique quelques textes du librettiste star qui sera si important pour lui, plus tard : Métastase. Le jeune homme y réussit si bien qu’il reçoit une commande ferme pour un opéra destiné à être créé au lendemain de Noël, date traditionnelle d’ouverture de la saison théâtrale. Le contrat est signé le 24 mars et les Mozart auront droit à toutes les facilités imaginables, en même temps qu’une somme d’argent rondelette. Il doit cependant attendre juillet pour connaître le sujet et le livret : il s’agira d’une adaptation par le librettiste Vittorio Amadeo Cigna-Santi du Mithridate de Jean Racine, devenu pour l’opéra Mitridate, re di Ponto, et qui avait déjà été – au moins en partie, utilisé en 1767 pour un opéra signé par l’abbé Gasparini.

Mozart écrit sa partition durant tout l’été, à Bologne, à l’invitation du prince Pallavicini, après avoir visité à peu près toute l’Italie entre mars et juillet. Il rencontrera notamment à Bologne le padre Martini, personnalité musicale très célèbre en son temps, joyeux compère qui donnera de très précieux conseils à Mozart, qui l’admirera toute sa vie. Comme il est encore un enfant, il doit se soumettre à une sévère sélection pour être reçu, dans le même temps, à l’académie philharmonique bolognaise. Après avoir composé les récitatifs jusqu’à l’automne, il fait la connaissance des chanteurs de retour à Milan, en novembre. C’est là qu’il conçoit ses airs, puisqu’alors, ils n’avaient pour principal but que de mettre en avant les interprètes. Le jeune Mozart devra donc comme les autres s’y soumettre. Son âge ne l’aide pas à imposer sa propre volonté aux chanteurs, mais il parvient, après de nombreuses versions, à les satisfaire tous. Les répétitions commencent le 12 décembre et le soir du 26, lors de la création au théâtre ducal voici donc 250 ans aujourd’hui, l’œuvre remporte un immense succès, qui aura une résonnance dans toute l’Europe (la cour portugaise en demande par exemple une copie sans tarder).

Mozart a donc écrit sa première tragédie lyrique ou plutôt son premier opera seria, à moins de 15 ans, et en recourant à un orchestre très étoffé pour l’époque (les bois par 2, 4 cors, 2 trompettes, 2 trombones et timbales), dans une réduction pour 3 actes de l’œuvre originale de Racine et avec une fin heureuse. Il y réussit du premier coup à assimiler les caractéristiques de l’opéra italien en montrant de quoi il est capable à un public médusé. 

En 1986, Jean-Pierre Ponnelle signe un film tourné au splendide théâtre de Vicence. C’est Nikolaus Harnoncourt qui en assure la direction musicale avec son Concentus Musicus et il a convoqué une distribution de premier ordre, magnifiée notamment par Ann Murray (Sifare, rôle travesti) ici dans l’air « Lungi da te, mio bene », à l’acte II. Le rôle titre y était tenu par Gösta Winbergh et on voit également dans cet extrait l’excellente Yvonne Kenny (Aspasia). Un beau cadeau juste après Noël…

 

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