Berlioz s’intéressait depuis toujours à Shakespeare, comme tant d’autres de ses contemporains et eut l’occasion, à la fin des années 1850, d’adapter pour l’opéra l’un de ses ouvrages. Le casino de Baden-Baden, où Berlioz se rendait souvent depuis plusieurs années, lui commanda en effet une œuvre originale pour inaugurer le nouveau théâtre. Le livret proposé n’avait au départ rien de shakespearien, puisqu’il avait pour cadre la guerre de Trente Ans. Après avoir accepté, Berlioz renia son engagement et proposa d’adapter Beaucoup de bruit pour rien. Il en rédigea lui-même le livret, comme d’habitude, et acheva la partition en février 1862. Six mois plus tard, la création de cet opéra-comique finalement très librement adapté de la comédie de Shakespeare dont il ne reprend qu’une (petite) partie de l’intrigue, remporta un franc succès, qui n’empêchera pas Berlioz de modifier un peu son ouvrage l’année suivante. Echaudé par les railleries dont il fit si souvent l’objet, il s’opposa de son vivant à toute création parisienne de son ultime opus lyrique et l’œuvre ne fut donc créée à l’Opéra-Comique qu’en 1890.
Voici l’un des passages les plus fameux de cette partition délicate et loin du grand spectacle des Troyens, « Dieu que viens-je d’entendre », ici chanté par Joyce DiDonato dans un excellent français, au Théâtre des Champs-Elysées et sous la direction de l’éminent redécouvreur berliozien que fut sir Colin Davis.