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Mais que se passe-t-il à La Scala ?

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Actualité
25 juin 2019
Mais que se passe-t-il à La Scala ?

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Nous l’annoncions il y a quelques jours : selon le Figaro,  Dominique Meyer, actuel directeur de l’Opéra de Vienne depuis 2010, devrait prendre la tête de la Scala de Milan en 2022. Pour autant, la décision officielle ne sera connue que fin juin, et les lobbies s’activent dans les coulisses pour contrer ce choix. Le processus de décision est en effet complexe du fait du statut de fondazione lirico-sinfonica de l’institution. Légalement, il s’agit d’une fondation de droit privée. Mais statutairement, son conseil d’administration est présidé par le maire de Milan, Giuseppe Sala (Parti Démocrate), et l’État, ainsi que la région, désignent leurs représentants : l’historien et journaliste Philippe Daverio a ainsi été nommé par la région lombarde, présidée par la Ligue du Nord. Celle-ci et le Mouvement Cinq Etoiles qui gouvernent l’Italie n’ont pas semblé s’intéresser beaucoup à la Scala, jugée trop loin des préoccupations des électeurs. La perspective de la nomination d’un français, à la tête d’une des institutions italiennes les plus prestigieuses, pourrait toutefois être l’occasion d’un geste politique spectaculaire.

Les enfants du pays

Localement, les candidatures ne manquent pas. Carlo Fuortes, directeur de l’Opéra de Rome, s’est déclaré intéressé : son bilan est plutôt bon, et le théâtre est aujourd’hui revenu sur la scène internationale. Responsable de la Fenice, Fortunato Ortombina a su combiner les impératifs de rentabilité et des spectacles plus prestigieux : bénéficiant d’une chalandise exceptionnelle, le petit théâtre n’est pas non plus trop difficile à remplir. A la tête du Teatro Stabile de Turin, Filippo Fonsatti a vu son mandat renouvelé jusqu’en 2022 (ça tombe bien) dans la foulée d’une réussite peu contestée. Il se verrait bien adoubé à Milan mais le Stabile est consacré au théâtre et non à l’opéra (ça tombe mal). Aucun des prétendants ne peut toutefois se targuer d’une expérience à la tête d’une grande institution internationale. Meyer réunit a priori toutes les qualités attendues (d’autant que la direction de la Scala n’est pas soumise au respect d’une absurde limite d’âge, comme à l’Opéra de Paris). Contrairement à son compatriote Stéphane Lissner, considéré localement comme un excellent gestionnaire  (financier et aussi politique et social) mais ne connaissant rien à l’opéra italien, il maîtrise parfaitement ce répertoire et parle impeccablement la langue de Dante.

L’homme à la baguette

Meyer doit aussi séduire le directeur musical, Riccardo Chailly. Les deux hommes ont peu (voire pas) collaboré. Mais à 66 ans, de santé désormais fragile, le chef italien ne dirige plus guère qu’à la Scala et à Lucerne, et ne semble pas tenté par d’éventuelles luttes de pouvoir. Le chef italien pourrait même ralentir encore ses activités. Daniele Gatti semble son successeur naturel, mais Gianandrea Noseda, milanais comme lui, est en embuscade. Meyer peut aussi décider de se passer de directeur musical, le poste n’étant pas statutairement obligatoire. Comme on le voit, les intérêts particuliers en jeu ne sont pas minces.

The man who knew too much

Quant à Alexander Pereira, actuel patron de l’institution, il est peu probable qu’il jouera les facilitateurs dans le processus de décision. Maintenu jusqu’en 2022, mais en double commande avec son successeur à partir de 2020, il a vu le soutien tardif mais spectaculaire de Cecilia Bartolicelle-ci vient en effet de renoncer à chanter Cleopatra dans Giulio Cesare la saison prochaine, pour protester, précise sa page Facebook, contre le non renouvellement de Pereira. Ceci n’a pas empêché le théâtre de ne pas communiquer la nouvelle… et d’ouvrir la location en vendant les billets sur le nom de la diva… Rappelons que Cecila Bartoli est directrice artistique du Festival de Pentecôte de Salzbourg depuis 2012, et confirmée jusqu’en 2021. Localement, le bilan de Pereira est jugé décevant. L’érosion des abonnés est spectaculaire et n’est toujours pas contenue : de près de 6.000 il y a 10 ans, le nombre de souscripteurs est passé à moins de 3.000 aujourd’hui. Le répertoire italien est jugé insuffisamment défendu (encore !) et Pereira ne s’est pas beaucoup intéressé au reste de la vie lyrique italienne. Enfin, les pratiques de Pereira sont considérées comme manquant de transparence. On se souvient qu’au début de son mandat scaligère, Pereira (nouveau directeur de la Scala) avait acheté à Pereira (ancien directeur du Festival de Salzbourg) un certain nombre de productions déficitaires du festival. Le conseil d’administration avait moyennement apprécié une manœuvre dont il avait été informé après coup.

Plus récemment, le partenariat avec l’Arabie Saoudite avait été contesté. En l’espèce, l’affaire Khashoggi avait servi de détonateur en déclenchant les fureurs de la Ligue du Nord. Mais l’entrée du mécène au conseil d’administration, en contrepartie d’un « petit » don de 15 millions sur trois ans semblait déjà disproportionnée. Pereira, par ailleurs intéressé financièrement aux objectifs de mécénat, avait été jugé un négociateur trop hâté de conclure. Les 5 premiers millions couvraient certes 4% du financement de la Scala, mais le montant reste à relativiser, comparé par exemple aux sommes obtenues par le Louvre d’Abu Dhabi (l’utilisation de la marque Louvre est facturée 400 millions sur 30 ans et Abu Dhabi versera 540 millions d’euros sur 20 ans pour bénéficier des conseils du musée parisien. Ramené à l’année, c’est 8 fois plus au minimum, et sur une durée beaucoup plus longue…). Pendant ce temps-là, Paris cherche toujours un repreneur. Mais dans la capitale, c’est plus simple : il suffit de demander au président du moment.

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