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PARIS
25/05/2007
Dmitri Hvorostovsky
© DR
Giuseppe Verdi (1813-1901)
Simon Boccanegra
Melodramma en un prologue et trois actes
Livret de Francesco Maria Piave, revu par Arrigo Boito, d’après la pièce d’Antonio Garcia Guttierez.
Crée le 12 mars 1857 à la Fenice de Venise, et repris
dans une version remaniée le 24 mars 1881 à la Scala de
Milan
Direction musicale : James Conlon
Mise en scène : Johan Simons
Décors : Bert Neumann
Costumes : Nina von Mechow, revus par Philippe de Saint Mart Guilet
Lumières : Lothar Baumgarte
Dramaturgie : Koen Haagdorens
Chef des chœurs : Peter Burian
Simon Boccanegra : Dmitri Hvorostovsky
Maria Boccanegra (Amelia Grimaldi): Olga Guryakova
Jacopo Fiesco (Andrea): Franz Josef Selig
Gabriele Adorno: Stefano Secco
Paolo Albiani: Franck Ferrari
Pietro: Nicolas Testé
le Hérault : Jason Bridges
Chœurs et orchestre de l’Opéra National de Paris
Paris, Opéra Bastille, le 6 mai
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Aux urnes citoyens !
Un second tour d’élections présidentielles dont on
connaîtra le résultat dans quelques heures, des costumes
refaits, une direction d’acteur partiellement
renouvelée… C’est beaucoup, mais pas suffisant pour
rendre palpitante la production de Johan Simons. En effet, le metteur
en scène néerlandais a beau imposer à ses
chanteurs soit une immobilité quasi-totale, soit une gestuelle
sans inspiration, il ne réussit pas à éclairer de
manière réellement éloquente les arcanes
politiciennes qui forment le cœur de Simon Boccanegra. Pire, il
force plus d’une fois le spectateur à fermer les yeux afin
d’esquiver les gigantesques rideaux pailletés argent
sortis tout droit d’une soirée d’hommage à
Claude François. Résultat : on s’ennuie le
plus souvent et, ni l’utilisation de costumes contemporains, ni
celle de bouteilles d’eau en plastique, ni même la bataille
de chaises de bureau entre les patriciens et les
plébéiens ne parviennent à retenir
l’attention.
Dans un contexte qui ne les aide pas toujours à paraître
crédibles, les chanteurs réunis pour cette reprise sont
dans l’ensemble admirables. Annoncé souffrant, Dmitri
Hvorostovsky offre un Simon digne des plus grands. Le style, le timbre,
la présence, tout, dans cette incarnation, est splendide et
magnétique. Il possède ce mélange subtil de
bonté et de sévérité que requiert le final
du premier acte, et la mort du doge, au troisième, coupe le
souffle.
Le Gabriele de Stefano Secco se situe au même niveau (c’est
tout dire !), exalté, le timbre irrésistible,
à l’aise finalement dans un rôle qu’on aurait
cru trop large pour lui. Après de telles prestations, on attend
impatient et confiant les retrouvailles du baryton russe et du
ténor italien dans Don Carlo l’année prochaine.
L’Elisabeth en sera justement Olga Guryakova. Le rôle
devrait mieux lui convenir qu’Amelia car malgré les
grandes qualités de cette très belle artiste
(présence émouvante, beauté du timbre), son air
d’entrée semble lui poser problème sur le plan du
style comme des couleurs.
Si Franz Josef Selig ne réitère pas le miracle de
poésie atteint avec Marke sur cette même scène il y
a deux ans, son Fiesco n’en est pas moins touchant et
sincère. Verdi n’est certes pas le compositeur que la
basse allemande fréquente le plus, et cela s’entend. Il
nous gratifie cependant d’une interprétation
intelligemment menée ; il réussit notamment à
exprimer cette sorte d’aigreur accumulée durant un quart
de siècle de haine qui s’évanouit tout d’un
coup lors de l’ultime et bouleversant face-à-face.
Franck Ferrari, enfin, est un Paolo sombre à souhait, aussi
idéal que Nicolas Testé en Pietro et Jason Bridges en
Hérault.
Pour son grand retour dans la fosse de l’Opéra de Paris,
James Conlon dirige avec amour une partition dont il fait ressortir
magistralement tout ce qu’elle a de poétique. Les autres
aspects de la partition, plus violents ou tendus, passent
malheureusement à la trappe. Force cependant est de
reconnaître le travail, remarquable et justement acclamé
par l’orchestre ainsi que par le public. Des applaudissements
très chaleureux sont également réservés aux
protagonistes.
En conclusion, une reprise certes
imparfaite, mais dont on ressort enthousiaste, comme en apesanteur car
soulevé par Dmitri Hvorostovsky et Stefano Secco.
Clément TAILLIA
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