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SAINT DENIS
20/06/2007
Christophe Dumaux
© DR
Jean-Sébastien BACH
Première suite pour orchestres en ut majeur BWV 1066
Vergnügte Ruh, beliebte Seelenlust BWV 170
Agréable repos, vif désir de l’âme
Geist und Seele wird verwirret BWV 35
L’Esprit et l’âme se confondront
Christophe Dumaux, contre-ténor
Les Folies Françoises
Patrick Cohën-Akenine, direction
Mercredi 20 juin 2007,
Festival de Saint-Denis, Basilique, 20h30
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Dumaux passe son Bach
Dans le cadre grandiose de la basilique débarrassée pour
l’occasion de ses royaux gisants, Patrick Cohën-Akenine nous
propose un florilège Bach, alliant la
légèreté courtisane de Cöthen et deux
cantates pour alto composées à Leipzig en 1726.
Protestons tout d’abord avec force contre la sonorisation
déplorable du concert. Pendant un peu plus d’une heure, le
son nous sera parvenu par l’intermédiaire d’un
haut-parleur grésillant, fixé à notre dextre, et
qui donnait la fâcheuse impression d’assister à un playback digne du Don Giovanni
de Losey. En outre, l’ingénieur du son a favorisé
des basses bourdonnantes, qui déséquilibrent le spectre
sonore.
Un malheur n’arrivant jamais seul, la Suite pour orchestre offerte
en guise d’amuse-gueule nous laisse sur notre faim. Il semblerait
que les Folies Françoises les aient prises au
débotté, et l’interprétation manque à
la fois d’engagement et de relief. Est-ce le même Patrick
Cohën-Akenine qui dirigea d’admirables Nuits de Sceaux
de Bernier chez Alpha ? On en douterait presque à
l’écoute d’une lecture d’une
décontraction confinant à la mollesse, et où
l’on peine à percevoir une vision propre du chef, ce qui
est d’autant plus flagrant pour des morceaux aussi
célèbres. L’ouverture a le souffle asthmatique, les
gavottes et autres menuets sont peu dansants, les temps forts
invisibles. Dans cette routine peu festive, l’orchestre
lui-même paraît imprégné de la grisaille des
voûtes. Les amateurs de hautbois grainés dignes de
Jürg Schaeftlein ou Marcel Ponsele passeront leur chemin. Le
constat sera le même pour le cornet pendant les cantates,
totalement inaudible.
Heureusement, l’intérêt de la soirée
était naturellement la présence du jeune
contre-ténor Christophe Dumaux, qui s’était révélé un excellent Tolomeo dans le Giulio Cesare
de Haendel donné à Glyndebourne (2005). On retrouve avec
plaisir un chant généreux et théâtral, avec
une belle égalité des registres, des aigus lunaires, et
même une diction germanique impeccable. L’air
« Gott hat es wohl gemacht » lui permet de faire
preuve de son agilité dans les passages virtuoses qu’il
affectionne particulièrement, accompagné d’un
violoncelle obligé qui retrouve enfin un peu d’allant.
Toutefois, il faut émettre deux réserves. D’une
part, alors que le soliste tire l’œuvre vers le drame et
l’Italie, vers l’extériorité fracassante de
l’oratorio opératique, les Folies Françoises sont
toujours aussi sages et retiennent ses élans. Cela est
d’autant plus regrettable que le continuo
est réalisé à la fois par un clavecin et un orgue
de chambre dans un souci musicologique louable (cf. entre autres
Laurence Dana Dreyfus, Bach’s continuo group,
Harvard University Press, 1987), en dépit d’une
claveciniste peu inspirée, notamment dans « Mir ekelt
mehr zu leben » où elle se contente de plaquer
quelques accords de temps à autre. D’autre part, le timbre
de Christophe Dumaux demeure relativement uniforme. Un peu plus de
couleurs, de nuances, de sons filés auraient été
bienvenus pour apporter de la variété aux mélodies
ciselées du Cantor, à l’instar de visions plus
fragiles de Paul Esswood ou Andreas Scholl, mais plus
évocatrices.
Enfin, pour finir la soirée, les artistes offriront un « Venti turbini » de
d’une qualité telle qu’elle fait regretter que ce
récital n’ait pas été consacré
entièrement à des airs de fureur de Haendel.
« Un récital Bach magnétisant »
promettait pourtant le programme…
Viet-Linh NGUYEN
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