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Antonio VIVALDI (1678-1741)
IL TEUZZONE
drame musical en trois actes
Livret de Apostolo Zeno (1706)
Première représentation au Théâtre Archiducal à Mantua en 1719
Mauro Pagano, ténor (Troncone, empereur de Chine - Argonte, général et prince tartare)
Maurizia Barazzoni, soprano (Teuzzone, son fils)
Fernanda Piccini, contralto (Zidiana, jeune veuve de Troncone)
Susanna Bortolanei, contralto (Zelinda, princesse Tartare)
Angelo Manzotti, sopraniste (Cino, premier ministre)
Marcello Lippi, basse (Sivenio, général)
Andrea Favari, basse (Egaro, capitaine des gardes)
Orchestre de l’Opéra Baroque de Guastalla
Direction Sandro Volta
3 Compact Discs Brilliant Classics BRIL93351
CD 1 : 75’40 ; CD 2 : 57’30 ; CD3 : 63:04
En attendant Cecilia Bartoli
L’intérêt qu’on témoigne
aujourd’hui aux opéras de Vivaldi est-il à porter
au seul crédit de Cecilia Bartoli ? Non, la preuve :
l’intégrale d’Il Teuzzone
fut enregistrée par Sandro Volta en 1996 trois avant le
« Vivaldi Album ». Depuis évidemment
l’eau a coulé sous les ponts et, emporté par le
flôt du projet Naive/Opus 111, on ne compte plus au disque le
nombre d’œuvres lyriques du prêtre roux. Pourtant,
aucune autre version d’Il Teuzzone n’a vu le jour.
Est-ce parce qu’il s’agit d’un opéra de
jeunesse, le douzième parmi une production qui en compte,
parait-il, plus de cent ? Le compositeur avait tout de même
41 ans et un sacré métier quand il le présenta
pour la première fois au Théâtre Archiducal de
Mantoue. Il Teuzzone n’a pas à rougir de ses glorieux cadets : Orlando furioso, L’Olimpiade, Farnace.
On y retrouve la même jubilation vocale, la même
imagination mélodique, une théâtralité plus
évidente que d’autres fois et quelques bonnes trouvailles
instrumentales.
Est-ce parce que le sujet prête à sourire ? Le livret
de Zeno, revu et corrigé par l’auteur lui-même,
sacrifie au goût de l’époque pour les chinoiseries
en portant l’action du côté de la Cité
Interdite et en baptisant les personnages de noms exotiques :
Zediana, Zelinda, Troncone… Son exotisme consiste aussi à
présenter des pratiques inconnues à l’époque
en Europe : la polygamie, les sacrifices humains, le culte du dieu
Amida… Pour le reste, il n’est ni plus ni moins
alambiqué que les autres livrets d’opera seria. Il brasse
comme à l’habitude des reines, des princes et des
généraux autour de questions d’amour et de pouvoir.
Devenue veuve, l’impératrice de Chine Zedania –
mélange chop suey de Phèdre et Sémiramide –
veut conserver la couronne et épouser l’héritier du
trône, son beau-fils Teuzzone, pour lequel elle nourrit une
passion secrète. A priori, les deux desseins ne seraient pas
incompatibles - au contraire - si le jeune homme n’en
pinçait pour la princesse Zelinda. Deux anciens
prétendants, le général Sivenio et le premier
ministre Cino, vont alors se charger de faire des nœuds dans
l’intrigue au point qu’on a vite fait d’en perdre le
fil. L’arrivée inopinée du père de Zelinda,
le général Argonte, apporte à l’histoire
l’heureuse conclusion qu’impose l’usage.
A priori donc rien dans le livret, comme dans la partition, ne justifie
une mise à l’écart. Un concours de circonstances
rend sans doute l’enregistrement de Sandro Volta unique et par
conséquent incontournable pour qui veut découvrir
l’œuvre. Il faut tout de même un certain courage pour
se lancer dans l’aventure car le parcours s’avère
rocailleux. Rude même si l’on songe au tapis orchestral. Il
n’est pas ici sol touffu qui porte la marche autant qu’il
l’accompagne mais verdeur plutôt que verdure, terre
asséchée aux pierres coupantes et carrément chemin
de croix quand il s’agit des cuivres et des bois censés
donner une allure martiale à « Di trombe
guerriere ».
Vocalement, on n’est pas plus à la fête ; on
atteint même des pics d’aigreur. Et quand les timbres
donnent moins à souffrir, c’est la technique qui blesse.
On n’en dira pas plus. On préfèrera
s’attarder sur Marcello Lippi
dont le Sivenio aux sonorités musclées fait l’effet
d’un baume. La partition heureusement ne le néglige pas.
Le ton affirmé, la parole déliée, la ligne souple
et expressive rendent chacune de ses interventions appréciables.
Son morceau de bravoure avec un basson pour seul accompagnement est un
moment de bonheur qui console de bien des peines.
On reviendra pour terminer sur l’air « Di trombe
guerriere » cité plus haut. Il est le plus connu de
l’œuvre car il figure sur le fameux album de Cecilia
Bartoli. Il aide à réaliser que si le retour des
opéras de Vivaldi au premier plan n’est pas le seul fait
de la cantatrice italienne, leur interprétation, elle, lui doit
tout.
Christophe RIZOUD
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