Un
lugubre pavillon, à peine illuminé par une faible lampe
suspendue au milieu.
Dialogue. Adelson est assis au fond, concentré dans ses pensées,
il a toutes les décorations et attributs d'un Lord-Juge de canton.
Serait-il donc l'offensé et le juge ?... non ! il veut une vengeance
plus noble. On commence par introduire Bonifacio, dont le bon sens commente
immédiatement ce lieu qui lui semble être " l'antichambre
du palais de Pluton " ! Sa bonne humeur et sa logique simple et parfois
sarcastique impatientent l'autre, jusqu'au moment où Bonifacio
conclut avec l'innocence de Nelly et de Salvini. Le coupable est autre,
un certain " Milord... " Adelson s'étonne : " Un
Lord ? -Non, Lordissimo. " fait l'impayable Bonifacio, avant de révéler
qu'il s'agit d'Adelson, lui-même !
Duetto Adelson-Bonifacio. a) première partie : Bonifacio, à
force de comparaisons et de métaphores (!) fait prendre conscience
à Lord Adelson qu'il a mis " la mèche près de
l'incendie " : Salvini, vivant près de Nelly... Musicalement,
Bellini réussit un contraste intéressant entre la partie
musicale de Bonifacio en notes rebattues, typiques de l'opéra bouffe,
et les tirades sérieuses de Lord Adelson. Ce contraste s'accentue
dans la Stretta [b)], où la décision d'Adelson et sa menace
envers Bonifacio s'expriment en nottes " serrées ", typiques
des Strette, tandis que la crainte de Bonifacio est fort bien rendue par
un savoureux crescendo mi-dérisoire, mi-sérieux.
Dialogue. Le " Lordissimo " renvoie Bonifacio, le laissant finalement
libre, mais avec la consigne de tenir sa langue. Pour l'instant, il tente
de résister à l'émotion de voir un Salvini à
l'aspect lamentable, entrer comme une ombre, suivi des officiers de justice
et du choeur de serviteurs. Salvini a beau montrer à son ami la
fausse lettre adressée à Struley, Lord Adelson le tient
pour responsable de l'enlèvement de Nelly. Quant au coup de feu,
il fut tiré par le colonnello contre Salvini qui l'a évité...
mais dut faire face au poignard de Geronio. Struley l'accusa alors d'avoir
tué Nelly !... Fou de douleur, Salvini courut chercher la mort
et c'est à ce moment qu'il fut arrêté par les hommes
de Lord Adelson. Ce dernier demeure inflexible et l'abandonne à
son sort de traître....
Scena ed Aria Salvini. Dans une Scena très dramatique, Lord Adelson
déclare être en possession de la dépouille de Nelly
et vouloir la mettre en présence de Salvini, qui se révèle
éperdu de douleur à cette idée... Le cor anglais
introduit longuement son air mélancolique... Il mourra mais conservera,
défunt, sa flamme ardente pour elle ! le choeur et Adelson réalisent
la force d'un amour si fort et si désespéré ! L'air,
fort beau, ne méritait pas d'avoir été écarté
de la seconde version.
Dialogue. Un geste de Lord Adelson fait lever des rideaux au fond, dévoilant
madama Rivers, Fanny et les paysannes couronnant une Nelly bien vivante
! Celle-ci raconte comment le manteau de Struley l'a protégée
du coup porté par Salvini à son oncle. D'ailleurs, celui-ci
et son homme de main Geronio furent rejoints et placés sous bonne
garde. Lord Adelson pardonne à Salvini, maintenant que Nelly, malgré
elle, a servi à sa " generosa vendetta " ! On entend
une voix au loin : c'est Bonifacio qui accourt et fait une belle fête
à Nelly, quant à Salvini, Adelson l'invite à retourner
en Italie avec une belle rente le mettant à l'abri du besoin.
Finale III°. Il commence par plusieurs couplets dans lesquels les
personnages principaux tirent chacun sa leçon, puis tous se lancent
dans un ensemble joyeux vraiment " standard " et impersonnel
: on est loin, musicalement, de l'air de Salvini !
On peut dire, en guise
de commentaire final sur les deux versions, que la seconde est plus réussie,
plus resserrée, mais sans apporter de musique nouvelle majeure.
On regrettera, au contraire, l'abandon du bel air de Salvini au troisième
acte, et l'affadissement du savoureux Duetto original Lord Adelson-Bonifacio,
en Duetto Nelly-Bonifacio.
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