C O N C E R T S 
 
...
[ Sommaire de la rubrique ] [ Index par genre ]
 
......
METZ
13/10/04
Giacomo PUCCINI

TOSCA

Opéra en trois actes
Livret de Illica et Giacosa, d'après la pièce de Victorien Sardou

Direction musicale : Jeremy Silver
Mise en scène : Nadine Duffaut
Décors : Emmanuelle Favre
Lumières : Patrice Willaume

Floria Tosca : Valérie Millot
Mario Cavaradossi : Dominic Natoli
Scarpia : Alain Fondary
Angelotti : Jacques Calatayud
Le Sacristain : Jean-Philippe Marlière
Spoletta : Yvan Rebeyrol
Sciarrone : Jean-Loup Pagesy
Le Geôlier : Patrice Moll
Le Pâtre : Marie Foetz / Anne-Victoire Commaille

Orchestre National de Lorraine
Choeurs de l'Opéra de Metz (Chef de chant : Marie-Claude Papion)
Choeur d'Enfants Spécialisé du Conservatoire National de Région de Metz

Opéra-Théâtre de Metz
13*, 15 & 17 octobre 2004



L'Opéra de Metz a ouvert sa saison 2004-2005 avec une Tosca importée d'Avignon, en lieu et place des rarissimes Orazi e Curiazi de Mercadante qu'avait envisagés le précédent directeur, Laurence Dale, démissionnaire pour cause d'impossible entente avec la municipalité messine sur des coûts financiers que cette dernière jugeait trop importants. Bien que Metz ait déjà affiché deux autres Tosca en 1992 et 1998, le public messin a semblé rassuré de retrouver ses habitudes et le célèbre ouvrage de Puccini n'a eu aucune difficulté à remplir la salle de l'Opéra-Théâtre. Il faut hélas reconnaître que Gustave III d'Auber ou Médée de Cherubini, productions pourtant très réussies de la saison dernière, n'avaient pas fait autant d'entrées.

La nouvelle direction nous a proposé une lecture d'un classicisme qui confine au conventionnel. Les décors d' Emmanuelle Favre, composés de parois verticales et d'un escalier en fond de scène (la tarte à la crème des mises en scène d'opéra !), agrémentés seulement des quelques éléments nécessaires à la caractérisation des divers lieux où se déroule le drame, relève de l'iconographie traditionnelle archi-rebattue. Seul élément constant, le tableau de Marie-Madeleine, que peint Cavaradossi au 1er acte, domine les trois actes de sa piété. La mise en scène de Nadine Duffaut s'avère sans surprise, en suivant très fidèlement le livret. Les rares moments où elle s'écarte de la tradition, tombent un peu à plat, voire frisent parfois le ridicule : aucune pantomime de Tosca avec cierges et crucifix autour du cadavre de Scarpia, qu'elle recouvre sobrement de sa mantille en se lavant compulsivement les mains du sang de Scarpia pendant le "O dolci mani", aucun saut du Château Saint-Ange, l'héroïne disparaissant simplement, les bras levés, derrière le rideau de fond de scène...

La soprano française Valérie Millot incarne une Tosca convaincante, un rôle qu'elle a déjà chanté, notamment à Dijon. Certes, le vibrato s'est accentué dans l'aigu, le médium est un peu grêle et la texture vocale tend à se raréfier dans les piani, mais elle affronte crânement les difficultés vocales du rôle. Très engagée dramatiquement, frémissante au 1er acte, désespérée puis agressive au 2ème, volontaire au 3ème, elle est totalement crédible dans les différentes facettes du personnage. C'est peut-être cet engagement de tous les instants qui explique sa fatigue perceptible en fin de spectacle, ce petit accident sur le contre-ut de "Quella lama" et certaines difficultés dans le duo final avec Mario.

Son amoureux de peintre était le ténor australien Dominic Natoli, remarqué la saison dernière à Metz dans le rôle-titre de Gustavo III). Scéniquement, il a du mal à être crédible en jeune premier et offre un jeu assez sommaire. Vocalement, son premier acte déçoit ; l'émission est engorgée, l'aigu court et pris par en dessous... "On dirait du sous-Galouzine" me confiera un ami à l'entracte. Heureusement, la voix se libère par la suite ; "Vittoria !" est triomphant comme il se doit, "E lucevan le stelle" emporte l'adhésion en dépit du tempo étiré qu'impose le chef, la vaillance et le brillant inhérents à tout Cavaradossi sont enfin retrouvés.

Alain Fondary renouait avec le vil Scarpia qu'il a interprété à de nombreuses reprises et en de multiples endroits. Ce n'est pas faire injure à la fabuleuse carrière de cet immense baryton français que d'admettre que ce énième Scarpia n'ajoutera rien à sa gloire. La voix ne suit désormais plus les intentions de l'artiste, l'obligeant à se réfugier dans le cri pour l'aigu et dans le parlando pour le grave. Le métier ne compense pas tout et les grands moment du rôle ("Va, Tosca", "Ha più forte sapore", "Già mi dicon venal ") sont douloureux. Sic transit gloria mundi, hélas, trois fois hélas... Quant au choix des seconds rôles, il laisse sans voix, comme eux d'ailleurs, qui nous gratifient d'un festival de ë'non-chant'' absolu.

L'anglais Jeremy Silver reprenait la tête de l'Orchestre National de Lorraine, qu'il avait déjà mené au succès dans Les Huguenots en juin dernier. On a retrouvé avec enthousiasme sa direction énergique et spectaculaire et un orchestre en grande forme. Le seul reproche qu'on puisse lui faire est de privilégier le dramatisme de la partition et de refuser l'abandon des moments de pur lyrisme, comme le duo Tosca-Mario du 1er acte.

Au final, une soirée honnête mais qui ne marquera pas les esprits. Le public a fêté dignement, sans enthousiasme excessif, tous les protagonistes. Metz a-t-il décidé de renouer avec l'opéra traditionnel et un peu routinier de grand-papa ?
 
 

Michel THOME
[ Sommaire de la Revue ] [ haut de page ]