Elina GARANČA
Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Airs d'opéra et de
concert
Konzertaria KV 582 - Chi sa,
chi sa, qual sia
La clemenza di Tito - Deh,
se piacer mi vuol
Konzertaria KV 486 - Basta,
vincesti... Ah, non lasciarmi, no
La finta giardiniera - Va
pure ad altri
Konzertaria KV 578 - Alma
grande e nobil core
Konzertaria KV 77 - Misero
me... Misero pargoletto
La finta giadiniera - Se l'augellin
sen fugge
Cosi fan tutte - Ah scostati...
Smanie implacabili
Konzertaria KV 505 - Ch'io
mi scordi di te... Non temer amato bene *
Cosi fan tutte - Temerari...
Come scoglio
Elina Garanca, mezzo-soprano
* Frank Braley, piano
Camerata Salzburg
Louis Langrée
Durée : 62'15"
Enregistré à Salzburg
en mai et août 2005
CD Virgin Classics 0946 332631
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La Letttone qui étonne... ?
Andronico dans le Bajazet de
Biondi, Adalgisa dans la NormaAix et
Garnier : loin de tout matraquage
publicitaire et par son seul talent, Elina Garanca a imposé en quelques
mois sa blondeur de pin-up et sa voix de miel. On a beau se dire que les
premiers récitals sont toujours prometteurs parce qu'on a tendance
à exagérer les qualités et à fermer les yeux
sur les défauts, on ne peut s'empêcher d'être frappé
par le charisme inédit de la belle Lettone. Qui peut en effet s'enorgueillir
actuellement d'un timbre d'un tel velours et d'une telle rondeur ? Qui
peut prétendre, Kozena exceptée, à une telle homogénéité
sur toute la tessiture, d'un grave opulent à un aigu lumineux et
corsé ? Qui peut rivaliser avec un legato et une conduite
de la ligne vocale héritée de l'enseignement de Zeani ? Voilà
pour les qualités de la dame, ce qu'elle en est fait est confondant
de beauté purement vocale et d'engagement dramatique, à l'instar
de l'air de concert Misero me, que l'on avait pas entendu aussi
frémissant et juvénile depuis Berganza.
de Haider, un premier récital chez Ondine et une Dorabella tout
feu tout flamme à
Etape obligée pour tout jeune chanteur, le récital Mozart
devient dans ce contexte attendu sinon espéré. La mezzo,
débarrassée des incontournables airs de Cherubino et Sesto
dans son précédent récital, peut se concentrer sur
des pages qui reflètent davantage son tempérament et sa personnalité.
Un programme qui laisse bien peu de place à l'élégie
ou au lyrisme : au suave Dolce d'amor compagna de la Finta giardiniera,
l'interprète préfère ainsi les deux autres airs de
Ramiro, la haine vindicative de Va pure ad altri in braccio et la
virtuosité tourmentée de Se l'augelin sen fugge (où
l'on évite parfois de justesse de savonner les vocalises !) Du Se
piacer mi vuoi enjôleur et manipulateur de Vitellia à
la fureur cyclothymique du Smanie implacabili de Dorabella en passant
la noblesse outragée de Alma grande e nobil core, tout ici
n'est que tension, doute, fureur et véhémence. Du coup, les
personnages finissent par se ressembler, les portraits, réduits
à leurs seuls affetti, deviennent redondants. Mais depuis
quand n'avions nous pas entendu récitatifs aussi percutants ! Qu'il
soit secco, comme dans Basta vincesti ou accompagnato
dans Temerari ou Misero me, le mot est omniprésent,
bien senti, sinon toujours parfaitement prononcé.
Peut-être aurait-il fallu à la jeune interprète
un chef plus directif que Louis Langrée qui l'encadre, la soutient
et l'entoure admirablement (la Camerata Salzburg, bien qu'en terre archi-connue
parvient à surprendre et à trouver des sonorités enivrantes)
alors qu'il aurait fallu la canaliser, la guider. L'artiste attend encore
de trouver un mentor qui puisse lui permettre de dompter et son tempérament
et sa voix. Mais peut-on demander à une artiste encore à
l'orée de sa carrière d'être déjà au
sommet de ses moyens ?
Ceux qui attendaient ce récital sortiront forcément déçus
de la première écoute parce qu'ils en auront peut-être
trop espéré. La deuxième écoute, même
si elle n'efface pas les limites réelles de ce disque, ne pourra
qu'être savourée à sa juste valeur.
Sévag TACHDJIAN
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