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BADEN-BADEN
24/02/2006
© Johann Jacobs (De Munt)
AÏDA
Giuseppe VERDI
Opéra en 4 actes
Livret d’Antonio Ghislanzoni
Direction musicale : Kazushi Ono
Mise en scène, décors et éclairages : Robert Wilson
Costumes : Jacques Reynaud
Chorégraphie : Makram Hamdam
Aïda : Norma Fantini
Radamès : Richard Margison
Amonasro : Mark Doss
Amneris : Michaela Schuster
Ramfis : Orlin Anastassov
Il Re : Guido Jentjens
La prêtresse : Marianne Kienbaum
Le Messager : Cristiano Cremonini
Chœur du Théâtre Royal de la Monnaie, Bruxelles
SWR Sinfonieorchester Baden-Baden und Freiburg
Production de l’Opéra de la Monnaie, Bruxelles
Baden-Baden, Festspielhaus, 24 février 2006
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Cette
production venant de Bruxelles a été ici commentée
lors de sa création à la Monnaie en 2002 (1). La reprise au
Festspielhaus de Baden-Baden voyait cependant une distribution et un
orchestre différents mais toujours la même mise en
scène de Robert Wilson.
L’esthétique wilsonienne - on l’a encore vu récemment à Paris pour le Ring (2) ou la reprise de Madama Butterfly - convient plus ou moins bien selon les ouvrages voire selon les diverses scènes d’un même ouvrage.
Ainsi, dans cette Aïda,
comment ne pas être subjugué par la stupéfiante
beauté des images et des éclairages du Prélude ou
de tel épisode plutôt statique (la scène au Temple
entre le Grand Prêtre et Radamès, l’affrontement
entre Amneris et Aïda) ? Tout cela convient parfaitement au
style de Wilson, mais d’autres scènes, où les
passions les plus fortes animent les personnages (comme la scène
du Nil par exemple) supportent moins bien ce parti pris rigide et
glacé, aussi beau soit-il. Les personnages sont le plus souvent
immobiles, se déplacent mécaniquement, ne se touchent
jamais... on souhaiterait parfois (les chanteurs aussi sans doute) un
peu plus de passion et d’ardeur.
Par ailleurs, on peut parfois friser le grotesque et le comique
involontaire avec une gestique saccadée ou des changements
d’éclairages subits, synchronisés avec tel ou tel
accord fortissimo de l’orchestre.
Il n’en reste pas moins qu’une certaine fascination
naît au fur et à mesure du spectacle, pour
l’esthétique, mais aussi pour la perfection de la mise en
place (ces fameux éclairages qui ne mettent en valeur
qu’une tête ou/et une seule main sur une scène
obscure, comme dans la dernière scène).
© Johann Jacobs (De Munt)
Musicalement, la distribution donne l’impression de chanteurs en
dessous de la pointure exigée par leur personnage. Norma Fantini
affiche une voix trop claire et non exempte de dureté. Parfois
elle impressionne par une puissance et quelques demi-teintes (rares)
bienvenues, mais l’Ut du Nil sera émis en force tout comme
presque tous les aigus.
Le Radamès de Richard Margison connaît un peu les
mêmes problèmes, on devine un timbre qui fut certainement
fort beau et un chanteur stylé, mais l’usure de la voix ne
lui permet plus de soutenir proprement la tessiture du rôle. A
partir du haut-medium, tout n’est que force et les aigus sont
entachés d’un vibrato lent des plus pénibles,
gâchant ainsi la fin de son premier air et surtout, avec sa
partenaire poussant elle aussi en force ses aigus, tout le duo final.
L’Amneris de Michaela Schuster convaincrait davantage si le
timbre était un peu moins clair et les graves plus sonores. Le
tempérament et les aigus compensent le manque
d’épaisseur de la voix mais aussi de puissance dans
certains ensembles où la chanteuse est parfois presque inaudible.
Manque d’épaisseur aussi chez l’Amonasro de Mark
Doss dont les aigus sont en outre un peu étranglés.
C’est sans doute le Ramfis d’Orlin Anastassov qui
séduit le plus par une voix solide et une belle prestance. Les
seconds rôles ne marquent pas particulièrement si ce
n’est lorsqu’ils déraillent comme la Prêtresse
de Marianne Kienbaum dont l’intervention en coulisse fait
entendre fausses notes et fort vibrato, gâchant ainsi les
sublimes phrases que la partition lui confie...
Les chœurs de l’Opéra de la Monnaie remplissent de
manière honorable leur partie exigeante mais on regrette ici ou
là quelque manque d’homogénéité.
C’est sans doute l’excellent Orchestre Symphonique de la
SWR de Freiburg et Baden-Baden qui comble le plus musicalement, ainsi
que la très bonne direction de Kazushi Ono. La scène du
triomphe emporte le spectateur du fait d’un élan
irrésistible. Le chef fait par ailleurs preuve d’une
grande délicatesse et cisèle admirablement la fine
orchestration verdienne.
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